Des ruminants et un humain infecté par le H5N1 aux Etats-Unis - Le Point Vétérinaire.fr

Des ruminants et un humain infecté par le H5N1 aux Etats-Unis

Tanit Halfon

| 03.04.2024 à 12:19:00 |
© iStock-PixelCatchers

Des chevreaux et des vaches laitières ont été testés positifs au virus de l’influenza aviaire hautement pathogène. Les autorités sanitaires américaines ont également rapporté une infection humaine d’un travailleur d’un des élevages bovins touchés.

Aux Etats-Unis, les autorités sanitaires ont rapporté des cas de contamination au virus hautement pathogène de type A d’origine aviaire H5N1… de ruminants domestiques ! Suivis quelques jours plus tard d’un cas de contamination humaine d’une personne exposée aux bovins d’un des élevages touchés !

Selon une revue de la littérature publiée en 2019 dans la revue Viruses, des éléments suggèrent que les bovins aient déjà pu être touchés par des virus influenza de type A dans le passé, dans les périodes 1970-1981 et 1997-2006. Mais « bien que des cas naturels d'influenza se soient produits chez des bovins provoquant une maladie respiratoire de type influenza avec bronchopneumonie, toux épizootique, écoulement nasal, larmoiement ou d'autres signes extrapulmonaires tels que la chute du lait, seuls quelques cas ont abouti à l'isolement réussi du virus », avaient écrit les auteurs. De plus, « les souches IAV d'origine bovine ont été isolées au début des années 1970, à peu près à l'époque où les souches IAV humaines de Hongkong/1968 (H3N2) étaient répandues. Bien que la parenté de la glycoprotéine HA de ces souches IAV bovines avec les prototypes humains H2 et H3 ait été signalée, il manquait des données/études de caractérisation suffisantes pour étayer l'étendue de la parenté génétique ».

Selon ces auteurs, étant donné que les porcs qui sont naturellement sensibles aux quatre types de grippe, ont été domestiqués par l’humain 1500 ans après les bovins, « la nature réfractaire des bovins à la grippe A pourrait être due à une interférence spécifique de l'espèce associée à l'hôte ».

Une dizaine d’élevages touchés

En 2024, c’est le 20 mars que les autorités sanitaires américaines ont pour la première fois rapporté la contamination d’un ruminant, une première depuis le début de l’épizootie Outre-Atlantique. Début mars, le propriétaire d’une ferme du Minnesota avait signalé de la mortalité inhabituelle chez ces chevreaux, sachant que la ferme abritait une basse-cour de volailles déclarée positive au virus en février. Les volailles et les chèvres avaient accès au même espace, dont une source d’eau commune. Tous les chevreaux testés se sont révélés positifs pour le virus H5N1, avec des souches fortement apparentées à celles des volailles. Toutes les chèvres adultes étaient en bonne santé, avec les échantillons associés qui se sont tous révélés négatifs pour le virus.

Puis quelques jours plus tard, le 25 mars 2024, les autorités sanitaires américaines ont révélé que des échantillons de lait non pasteurisé issus de vaches malades, et un échantillon oropharyngé, étaient aussi revenus positif pour le virus influenza. Les élevages concernés, au nombre de quatre, étaient des troupeaux laitiers, situés au Texas et au Kansas. Côté clinique, avait été notamment observée une baisse de la lactation, ainsi qu’un manque d’appétit, avec 10% de chaque troupeau contaminé qui serait touché, et peu ou pas de mortalité. Le 29 mars, un nouvel élevage contaminé a été confirmé dans le Michigan ; il avait reçu des vaches du Texas. Selon les experts, pour le troupeau du Michigan, à ce stade, il n’est pas possible d’exclure la transmission entre bovins. Par la suite, plusieurs nouveaux cas ont été rapportés, à savoir un cas dans un élevage laitier au Nouveau-Mexique, et cinq autres au Texas.

Au 1er avril, ce sont ainsi déjà 11 élevages qui ont été touchés, dont 7 au Texas, 2 au Kansas et 1 au Michigan et 1 dernier au Nouveau-Mexique. Sachant qu’un résultat de test est en attente pour un troupeau de l’Idaho.

Les premières analyses montrent que les souches virales sont proches les une des autres, à savoir le H5N1 de la lignée Guangdong clade 2.3.4.4b. De plus, elles ne révèlent pas de modifications génomiques en faveur d’une plus grande transmissibilité à l’humain. L’origine de la contamination serait le contact avec les oiseaux sauvages.

Une contamination humaine

Malgré ces résultats rassurants pour l’humain, un cas de grippe aviaire à H5N1 a été rapporté au Texas….sur un travailleur d’un des élevage laitier touché. La contamination s’est révélée bénigne, avec pour seul signe clinique de la rougeur oculaire correspondant à une conjonctivite. Le patient a tout de même été mis sous traitement antiviral. Il s’agit de la deuxième personne confirmée positive au H5N1 aux Etats-Unis après un premier cas en 2022 au Colorado chez une personne exposée aussi au virus dans l’industrie avicole. A ce stade, on ne connaît pas avec certitude l’origine de la contamination, oiseaux/environnement…voire bovins.  Pour les experts, cela ne change en rien l’évaluation du risque de grippe aviaire pour le grand public qui reste faible. Seules les personnes exposées à des animaux infectés, oiseaux ou autres, ou à des environnements contaminés, sont plus à risque d’infection. Pour eux, le suivi des règles classiques d’hygiène et biosécurité reste de mise. Dans ce cadre, il convient d’éviter les expositions non protégées avec des animaux malades ou morts, dont les animaux domestiques « y compris le bétail », et le contact avec tout matériau qui aurait été contaminé comme les liquides biologiques d’animaux infectés, excréments et lait cru. Il est aussi déconseillé « de préparer ou consommer des aliments non cuits ou insuffisamment cuits ou des produits alimentaires non cuits apparentés, tels que du lait non pasteurisé (cru) ou des produits à base de lait cru comme les fromages, provenant d'animaux présentant une infection confirmée ou suspectée par le virus de l'IAHP A(H5N1) (influenza aviaire ou grippe aviaire). »

Pas d’inquiétude pour les produits laitiers

Selon les autorités sanitaires, le lait issus des troupeaux contaminés a été détourné ou détruit, afin qu’il n’entre pas dans l’alimentation humaine. Il est, de plus, précisé que tous les produits laitiers sont obligatoirement pasteurisés avant commercialisation, une méthode qui « a prouvé qu'elle inactivait les bactéries et les virus, comme celui de la grippe, présents dans le lait. » « La position de longue date de la FDA est que le lait cru non pasteurisé peut abriter des micro-organismes dangereux qui peuvent présenter de graves risques pour la santé des consommateurs, et la FDA rappelle aux consommateurs les risques associés à la consommation de lait cru à la lumière des détections d'IAHP », est-il indiqué.

Dans ce contexte, la FDA précise tout de même à l’industrie de ne pas fabriquer ou vendre de lait cru ou de produits fromagers à base de lait cru/non pasteurisé provenant de vaches avec des signes cliniques. Mais « à l'heure actuelle, la FDA n'a pas connaissance de l'entrée dans le commerce interétatique de lait ou de produits laitiers provenant de vaches présentant des symptômes. »

Tanit Halfon

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