IAHP aux Etats-Unis : une sous-estimation du nombre de cas humains ? - Le Point Vétérinaire.fr

IAHP aux Etats-Unis : une sous-estimation du nombre de cas humains ?

Tanit Halfon

| 13.11.2024 à 16:30:00 |
© iStock-vora

Une étude sérologique révèle une séropositivité chez 7% d'une centaine de travailleurs agricoles testés à postériori. Tous avaient été exposés à des vaches malades.

Le nombre de cas humains contaminés par le virus H5N1 d’influenza aviaire hautement pathogène (IAHP) aux Etats-Unis pourrait-il être sous-estimé ? C’est ce que suggère une récente étude sérologique menée par les CDC dans les Etats du Colorado et du Michigan. Dans cette étude, 115 travailleurs d’élevages bovins laitiers touchés (45 du Michigan et 70 du Colorado) ont été interrogés et prélevés (échantillon sanguin) entre juin et août 2024. Résultat : 8, soit 7% d’entre eux, présentaient une séropositivité pour le virus H5. Parmi eux, 4 ont indiqué avoir été malades peu avant ou pendant la période durant laquelle a été confirmée la contamination des bovins. Les signes cliniques déclarés étaient le plus souvent bénins, compatibles avec une conjonctivite, mais un des 4 travailleurs a signalé de la fièvre, des maux de gorge, de l’écoulement nasal, des éternuements, de la diarrhée et des maux de tête. Toutefois, ces signes ont aussi été signalés par des personnes ayant eu des tests sérologiques négatifs. Au global, la moitié des travailleurs séropositifs n’ont pas déclaré de signes cliniques particuliers.

Le nettoyage de la salle de traite, une activité à haut risque

Comme il est indiqué, ces résultats sont à mettre en parallèle avec ceux d’études ultérieures qui avaient montré que la séroprévalence pour les travailleurs exposés à des volailles infectées avant l’émergence des virus du clade 2.3.4.4b était estimé au niveau mondial d’environ 0 à 0,6% ; et après l’émergence, dans une étude en Egypte de l’ordre de 4,6%.

Toutes les personnes séropositives avaient déclaré participer au nettoyage de la salle de traite, et pour certaines participer à la traite des vaches. Selon les auteurs de l'étude, « le nettoyage de la salle de traite pourrait être une activité à plus haut risque sur le lieu de travail étant donné la charge virale élevée du virus H5 dans le lait des vaches infectées ». Un risque qui se heurte à la réalité du terrain, puisqu’aucun des travailleurs séropositifs n’avait utilisé d’équipements de protection individuelle pour travailler avec des animaux infectés. Une situation qui appelle à mieux sensibiliser à l’importance de ces équipements, et aux mesures de prévention de manière générale. Aux Etats-Unis, les travailleurs parlaient majoritairement espagnols, impliquant de traduire les informations dispensées. Il est également recommandé d’encourager les déclarations de signes cliniques même légers, afin de ne pas passer à côté de cas.  Ces données confortent aussi le besoin d’une surveillance active des travailleurs exposés.

Renforcer la biosécurité ....

Face à ces résultats, les CDC ont actualisé leurs recommandations générales de prévention pour les autorités sanitaires. Il s'agit d'améliorer les stratégies de prévention du risque de contamination humaine, mais aussi de renforcer la surveillance pour ne pas passer à côté de cas.

Dans cette optique, il est notamment recommandé d’améliorer les stratégies d’usage des équipements de protection individuelle (EPI) en se basant sur le risque d’exposition. Les EPI sont à envisager prioritairement dans les environnements à forte ou moyenne exposition. L’exposition élevée est le travail en salle de traite dans des élevages bovins touchés ; l’exposition moyenne est le travail avec des animaux sains non allaitants dans des exploitations touchées ou à proximité d’élevages contaminés. C’est à l’employeur de fournir les EPI (et de manière générale, faire de telle sorte que toutes les mesures préventives de biosécurité adaptées soient mises en place).

... et la surveillance

Au vu de l'enquête sérologique, il est préconisé de tester également les travailleurs asymptomatiques exposés à un risque élevé qui ont déclaré ne pas porter d'équipements de protection approprié ou ayant subi une défaillance des équipements. Jusqu'à présent, les tests visaient les travailleurs exposés symptomatiques. Concrètement, « l'exposition à haut risque pourrait inclure une projection non protégée au visage de lait de vache cru provenant d'une vache infectée ou potentiellement infectée, ou la non-utilisation des EPI recommandés lors d'activités de dépeuplement de volailles dans une ferme avicole où la présence du virus H5N1 est avérée » (voir brief du 8 novembre).

Ces tests sont à associer à une prophylaxie post-exposition incluant un traitement antiviral. Jusqu'à présent, un traitement antiviral, le Tamiflu, était proposé aux seuls travailleurs exposés et présentant des signes cliniques compatibles avec le H5N1. Cette extension du traitement vise à « réduire les niveaux de virus chez les travailleurs concernés, ce qui aide à maintenir le risque de transmission de personne à personne, qui est faible, à un niveau aussi bas que possible » (voir brief du 8 novembre).

Au 12 novembre 2024, 46 cas humains ont été confirmés depuis avril 2024, dont 25 en lien avec une exposition à des vaches laitières contaminées.  Entre le 24 mars et aujourd’hui, plus de 6800 personnes ont été surveillées après une exposition à risque (au moins 4000 exposées à des vaches laitières, et au moins 2800 à des oiseaux et autres animaux), dont plus de 360 testées. Côté élevage, 492 élevages bovins laitiers ont été confirmés positifs dans 15 Etats. Pour les experts des CDC, le risque pour la population générale reste faible.

Tanit Halfon

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