IAHP : un appel pour un plan régional de biosécurité - Le Point Vétérinaire.fr

IAHP : un appel pour un plan régional de biosécurité

Tanit Halfon

| 23.10.2024 à 14:53:00 |
© iStock-EkaterinaUlianova

Une approche de lutte à un niveau collectif apparaît centrale pour lutter contre le risque d’épidémies ingérables, a-t-il été mis en avant dans une récente publication de l’ENVT. Dans cette optique, une répartition moins concentrée des élevages serait à envisager. 

Dans une publication d’octobre 2024 d’Eurosurveillance, des scientifiques de la chaire de biosécurité aviaire de l’Ecole nationale vétérinaire de Toulouse (Envt) en appellent à faire évoluer l’approche stratégique de lutte contre l’influenza aviaire hautement pathogène (IAHP). Pour eux, on ne peut pas faire l’impasse sur le long terme d’une approche plus collective, incluant notamment une stratégie de dé-densification territoriale en élevage. L’objectif final étant bien-entendu d’éviter d’en arriver à des situations incontrôlables.

La vaccination « pourrait ne pas être une solution durable »

Comme ils l’expliquent, les virus IAHP du clade 2.3.4.4b, notamment ceux qui circulent depuis 2021, ont démontré leur capacité à mettre à mal le modèle habituel de gestion épizootique. « L'abattage de millions d'oiseaux à la suite d'épidémies massives est une illustration frappante de la façon dont ces stratégies traditionnelles ont échoué à contrôler efficacement les quatre épidémies d'IAHP (H5N8, H5N1) qui ont balayé l'Europe depuis l'hiver 2016 », ont-ils écrit.

Dans ce contexte, la décision prise par l’Europe de lever les restrictions sur la vaccination, puis celle de la France de vacciner dès la saison 2023-2024, a été salutaire. « La réduction de la pression infectieuse exercée sur les autres troupeaux de volailles et sur l'environnement devrait limiter la circulation du virus dans les oiseaux et les mammifères sauvages, et en fin de compte, réduire le risque d'émergence de souches zoonotiques », ont-ils indiqué

Pour autant, ils estiment qu’il faut encore aller plus loin. En effet, ils soulignent que la vaccination est associée à d’énormes défis logistiques, tout comme a un coût non négligeable. Ce dernier s'élèverait à environ 100 millions d’euros pour la première année, incluant la vaccination et la surveillance. A cela s’ajoutent les conséquences financières d’éventuelles restrictions commerciales. Pour eux, « la vaccination pourrait ne pas être une solution durable à long terme ».

Gérer le risque à un niveau collectif

De fait, ils défendent une approche collective, ce qu’ils nomment « une approche régionale de la biosécurité ». Selon eux, « cette approche étendrait les principes de biosécurité au-delà des limites des exploitations individuelles pour s'attaquer aux groupes d'exploitations au sein d'un territoire, dans le but de réduire leur taux de contact effectif (c'est-à-dire le taux de contact conduisant effectivement à un événement de transmission) ». Au-delà des limites possibles du maintien d’une vaccination telle que faite aujourd’hui, cette approche collective est rendue d’autant plus nécessaire que la biosécurité individuelle a montré ses limites. « De nombreux foyers ont été signalés dans des exploitations à haute sécurité biologique, y compris des fermes d'élevage qui doivent se conformer à des protocoles de biosécurité stricts », ont-ils écrits.

Cela passerait par des plans régionaux de biosécurité. Dans ce cadre, une mesure collective à envisager serait de revoir la distribution spatiale des élevages de volailles, notamment les espèces plus à risque. Avec deux étapes : une première de court terme, qui limite la densité via la restriction de placements de volailles en période à haut risque, et un plus long temps d’arrêt entre cycles de production. Une deuxième étape, de long terme, serait de mettre en place des « mesures incitatives pour promouvoir l'établissement de nouveaux sites de production dans des territoires où la densité des élevages de volailles est plus faible, ou des cadres réglementaires pourraient définir des distances minimales entre les nouveaux élevages de volailles et les élevages existants. » Selon eux, cela permettrait de « réduire le risque d'une flambée incontrôlable de foyers dans les zones à forte densité, empêchant les services vétérinaires d'être débordés même si une région plus vaste est touchée. »

A noter que ce type de réflexion n’est pas une nouveauté. Sur le terrain, il y avait déjà eu une décision de réduire drastiquement la densité de canards, dans la période à risque : il s’agissait du plan Adour mis en place dans le sud-ouest en saison 2022-2023, à l’initiative des professionnels. Plus tôt, en juin 2022, l’Anses avait publié une synthèse de ces travaux sur les crises d’IAHP, dans laquelle était mise en avant l’importance de la baisse de densité des élevages en période à risque, mais aussi à plus long terme ; tout comme l’importance du « cloisonnement géographique des activités aviaires afin de limiter la multitude de croisements constatés dans les régions touchées par les épizooties ».

Tanit Halfon

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