Le 6 mars dernier, le Président de l’Académie Vétérinaire de France a adressé une lettre à la Commission Européenne pour souligner l'importance stratégique de la recherche sur l’Edition Génomique et a réitéré la demande de modification de la législation européenne concernée.
"Les textes législatifs Européens concernant l’Edition Génomique sont devenus obsolètes" déplore le Président de l’Académie Vétérinaire de France, Jean-Pierre Jégou, dans une lettre adressé à Madame Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, le 6 mars dernier. En effet, comme demandé dans un précédent communiqué de l’Académie en 2019, "les contraintes de la Directive Européenne actuelle (directive 2001/18/CE), vieille de 20 ans, sont devenues inadéquates et devraient être modifiées car elles empêchent tout développement de projet de recherche".
Une meilleure résistance aux zoonoses
Or, bien que l’intérêt du recours à cette technologie de modification très ponctuelle de l’ADN, est actuellement reconnu pour la mutagenèse ciblée pour les végétaux, les études récentes (notamment les travaux d'Emmanuel Charpentier et Jennifer Doudna prix Nobel en 2020) ont montré ses applications pour les animaux de production. Ainsi, la méthode de CRISPR-cas 9 (2012) constitue une révolution technologique qui facilite l’édition du génome et dont les applications potentielles en médecine animale comme en médecine humaine ou en agronomie sont très nombreuses.« De telles recherches contribueront à améliorer la santé de l’animal voire la santé publique dans les cas de zoonoses en permettant en particulier d’augmenter la résistance de ces animaux aux maladies infectieuses dont l’impact économique global est considérable. Elles offriront ainsi de nouveaux moyens pour maitriser à terme la prophylaxie de ces grandes maladies animales panzootiques » indique ainsi le Président de l’Académie vétérinaire. Avant d'ajouter qu'il est donc urgent d’investir dans la recherche sur cette nouvelle technologie de l’Edition Génomique pour lutter contre les grandes épizooties animales (pestes Porcines, SDRP (Syndrome Dysgénésique Respiratoire Porcin), Fièvre Aphteuse etc…).
Un domaine de recherche compétitif
De plus, « au regard du retard incommensurable pris par la Communauté scientifique européenne par rapport aux Pays d’Amérique du Nord et du Sud ou de la Chine, et au vu du contexte actuel, il est important de développer des animaux « insensibles » à ces agents pathogènes microbiens ou viraux" alerte-t-il dans sa lettre. En effet, en 2018, après avoir produit des porcs insensibles au SDRP (2017), la Chine a développé des animaux insensibles à la Peste porcine classique. La situation est donc « préoccupante pour la compétitivité et l’indépendance agroalimentaire et sanitaire de l’Union Européenne car plus de 80 % des brevets déposés sur la technique de CRISPR-cas 9 sont déposés par des américains ou des chinois et moins de 10 % sont européennes ». Un assouplissement de la réglementation européenne sur l’Edition génique en Europe s’inscrirait enfin dans la stratégie du Pacte vert de l’UE en répondant aux objectifs de durabilité de l’économie de l’UE, d’investissement dans des technologies respectueuses de l’environnement et de soutien de l’innovation.
Clothilde Barde