Les animaux hypertypés bientôt interdits aux Pays-Bas ? - Le Point Vétérinaire.fr

Les animaux hypertypés bientôt interdits aux Pays-Bas ?

Bénédicte Iturria

| 07.02.2023 à 10:05:00 |
© Bénédicte Iturria

Le ministre de l’Agriculture néerlandais souhaite interdire la détention d’animaux « présentant des caractéristiques externes qui entraînent une souffrance permanente ».

Le ministre de l’Agriculture néerlandais Piet Adema a annoncé, le 20 janvier 2023 dans une lettre1 adressée au président de la seconde chambre, son souhait d’interdire les animaux de compagnie dont l’hypertype cause une souffrance permanente. Cela concerne par exemple les chiens brachycéphales comme les carlins et les bouledogues, constamment essoufflés à cause d'un museau trop court, ou les chats aux oreilles repliées tels les scottish fold. « Ce sujet me touche non seulement en tant que ministre, mais aussi en tant que personne. Nous rendons la vie misérable à des animaux innocents, uniquement parce que nous pensons qu'ils sont « beaux » et « mignons , écrit Piet Adema dans cette lettre. C'est pourquoi nous faisons aujourd'hui un grand pas vers des Pays-Bas où aucun animal de compagnie n'aura à souffrir de son apparence. Un Pays-Bas sans animaux aux caractéristiques externes nocives ».

Interdiction de détention et de publicité

Dans le cadre de son plan d'action pour prévenir la souffrance animale, le ministre souhaite développer deux mesures. La première est l'interdiction « d’expressions visuelles (publicités, réseaux sociaux) pour les animaux ayant des caractéristiques externes présentant un risque accru d’altération de leur bien-être ». La seconde est l’interdiction « de la détention d’animaux présentant des caractéristiques externes qui, par définition, entraînent une souffrance permanente ». Si cette mesure est imposée, cela signifiera automatiquement l’interdiction du commerce et de l'importation de ces chiens et chats. Une disposition transitoire s’appliquera cependant aux détenteurs d’un animal concerné, qui pourront le garder jusqu’à son décès.

Piet Adema est conscient de la complexité de ces mesures qui soulèvent selon lui de nombreuses questions : « Comment démontrer objectivement qu'un animal souffre de son apparence ? Comment gérer avec précaution la liberté des médias sociaux ? Comment assurer une application correcte ? ». Il faudra selon lui du temps pour répondre soigneusement à ces interrogations et élaborer cette nouvelle législation. Mais il souhaite d’ores et déjà informer le public et plus particulièrement les personnes qui envisagent d'adopter un nouvel animal de compagnie. Une liste de caractéristiques physiques, qui peuvent être objectivement déterminées comme causant des souffrances permanentes, est actuellement à l'étude. Les animaux qui répondent à ces critères ne pourront alors plus être détenus. Dans un premier temps, cette liste sera courte mais elle sera ensuite élargie sur la base de nouvelles recherches.

Une législation existante mais insuffisante

Depuis 2014 aux Pays-Bas, la réglementation2 définissant les obligations des détenteurs d’animaux mentionne qu’il est interdit d'élever des animaux de compagnie d'une manière qui nuit au bien-être et à la santé du parent ou de la progéniture. Cela signifie, entre autre, que lors de la reproduction, il faut veiller, dans la mesure du possible, à ce qu'aucune anomalie et maladie grave ne soit transmise ou ne puisse survenir chez les descendants. De plus, aucune caractéristique externe ayant des conséquences néfastes pour le bien-être et la santé de l'animal ne peut, si possible, être transmise. Il en va de même pour les anomalies graves du comportement. En 2019, des règles3 spécifiques ont été ajoutées pour les chiens à museau court. Les chiens dont le museau est inférieur à la moitié de leur crâne ont depuis été interdits de reproduction. Mais cette législation n’est pas suivie et un commerce illégal persiste.

Soutien des vétérinaires

L’association de protection animale Dier & Recht (Animal et Droit) s’est réjouie de la décision du ministre. Au mois d’août 2022, elle avait lancé la campagne4 « N'achetez pas un museau court » en collaboration avec l’association vétérinaire Caring Vets et les organisations de protection animale DierenLot et Sophia-Vereeniging. Cette initiative a été relayée par les vétérinaires néerlandais. Dans tout le pays, on pouvait voir des photos de carlins ou de bouledogues français ultratypés affichés sur les panneaux publicitaires. Un site web était dédié à la sensibilisation aux problèmes de ces animaux. Auparavant, des grandes entreprises néerlandaises  avaient déjà décidé de ne plus utiliser ces races dans leurs publicités, pour ne plus contribuer indirectement à leur popularité.

1.https://www.rijksoverheid.nl/documenten/kamerstukken/2023/01/20/aanpak-gezelschapsdieren-met-schadelijke-uiterlijke-kenmerken

2.https://zoek.officielebekendmakingen.nl/stb-2014-232.html

3.https://www.nvwa.nl/onderwerpen/honden-en-katten/fokken-met-uw-hond-of-kat/regels-voor-dierenartsen-over-fokbeleid-kortsnuitige-honden

4.https://www.koopgeenkortsnuit.nl

Bénédicte Iturria

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