Une association de protection animale néerlandaise tire la sonnette d’alarme sur le risque réel d’importation de rage en même temps que des chiots venus d’Europe de l’Est en toute illégalité.
Troisième trafic mondial après celui des armes et de la drogue, le commerce illégal de chiens est une industrie en plein essor dans toute l'Europe. 8 millions de chiots sont nécessaires chaque année pour répondre à la demande des consommateurs sans méfiance, qui souhaitent acquérir des races spécifiques. Les vendeurs frauduleux exploitent de manière créative les plateformes en ligne. Dans l'Union Européenne, 1,3 milliard d'euros serait généré chaque année par ce trafic.
Fermes d’Europe de l’Est
Originaires pour la plupart d’Europe de l’Est, principalement de République Tchèque, de Pologne, de Hongrie ou de Slovaquie, les chiots sont souvent élevés dans des fermes illégales aux conditions insalubres et irrespectueuses du bien-être animal. Enfreignant la réglementation qui interdit l’importation d’animaux qui ne sont pas en âge d’être vaccinés contre la rage, certains revendeurs n’hésitent pas à transporter des chiens d’à peine 1 ou 2 mois pendant une journée entière. Ils arrivent en Europe de l’Ouest, souvent malnutris, avec une protection vaccinale faible ou nulle. Beaucoup de chiots sont porteurs de maladies transmissibles et constituent donc une menace réelle pour la santé animale et humaine.
Une association néerlandaise dénonce l’inaction gouvernementale
Aux Pays-Bas, l’association de protection animale House of Animals, qui possède une cellule d’investigation, a enquêté de janvier à mai 2020 sur l’enregistrement officiellement requis des chiens importés d'Europe de l'Est. Elle a ainsi relevé de nombreuses infractions à la réglementation. Environ 80000 chiots sont importés chaque année, y compris des chiens sans papiers, trop jeunes et souvent gravement malades. Elle dénonce une inaction du gouvernement néerlandais et de la NWVA (l’autorité néerlandaise de sécurité des produits alimentaires et de consommation). « Les chiots qui meurent pendant le transport ne sont pas signalés. Des chiens enregistrés comme chow-chows dans leur pays d'origine sont vendus aux Pays-Bas comme carlins. Un chien, déclaré de sexe mâle sur son passeport, s'avère être une chienne. Enfin, selon la base de données hongroise, des centaines de chiots qui ont été exportés, n’ont pas été enregistrés ici », constate la présidente de l'association Karen Soeters.
Menace de rage
Paul Overgaauw, vétérinaire microbiologiste à la Faculté de médecine vétérinaire d'Utrecht et conseiller de l’association tire la sonnette d'alarme concernant le risque d’importation de la rage aux Pays-Bas : « c'est très inquiétant, il y a un risque réel que ce virus pénètre dans notre pays par le biais du commerce de chiots ». Selon lui, les papiers des chiens mentionnent souvent des vaccinations qui ne sont pas administrées. La majorité des chiots ont moins de 15 semaines, âge légal pour être commercialisé avec une vaccination antirabique effective. Les chiens plus âgés sont sans intérêt pour ces exportateurs car les soins et la nourriture leur coûteraient trop cher, explique-t-il.
House of Animals a effectué des tests sanguins sur des chiots détenus par un marchand dans la province de Brabant et exportés de Hongrie où la rage sévit toujours. « Pas ou trop peu d'anticorps » contre la rage ont été trouvés dans les échantillons de sang. Sur la base de ces tests, « il ne s'agit pas de savoir si oui, mais quand la rage réapparaîtra dans notre pays » déclare l’association. House of Animals a porté plainte le 8 septembre contre la NVWA pour négligence grave et contre l'éleveur de chiots : « ces échantillons ne montrent que la partie émergée de l'iceberg. Chaque année, des dizaines de milliers de chiots hongrois viennent dans notre pays. La NVWA est consciente de la falsification des vaccinations et n'intervient pas. Il est incompréhensible qu’il n’y ait pas d’application de règles juridiques pour empêcher une zoonose mortelle dans notre pays. »