Résavip : une 6ième journée d’informations bien remplies - Le Point Vétérinaire.fr

Résavip : une 6ième journée d’informations bien remplies

Tanit Halfon

| 19.10.2022 à 18:15:00 |
© iStock-SrdjanStepic

La journée annuelle du réseau national de surveillance des virus influenza A chez le porc s’est tenue le 11 octobre dernier. L’occasion de présenter les tendances observées ces dernières années.

Chaque année, le Résavip, ou réseau national de surveillance des virus influenza A chez le porc, organise une journée d’informations pour présenter les données terrain de l’année précédente. Pour cette année 2022, cette journée s’est déroulée 11 octobre dernier, sous un format mixte présentiel/virtuel. Plusieurs présentations se sont succédées permettant de faire le point sur les grandes tendances du terrain, et les données issues d’activités de recherche associées.

Une variation saisonnière

En 2021, 302 visites ont été comptabilisées. Comme les années précédentes, les données de 2021, et celles des premiers mois de 2022, montrent que les virus influenza porcins sont détectés toute l’année sur le territoire, avec deux extrêmes : le mois de juillet qui est le mois avec le moins de visites d’élevages et le mois de cas détectés positifs. A l’inverse le mois de novembre qui se caractérise par un pic des visites ainsi que celui des cas positifs. Les visites concernent surtout la Bretagne avec 204 visites, suivent les Pays-de-la-Loire avec 40 visites, et de la Normandie avec 28 visites. La répartition est la même pour les élevages positifs. Au total, 8 régions de France regroupent des élevages détectés positifs (sur 10 régions concernées par des visites).

Une atteinte des porcs en croissance

Près de ¾ des visites concernent des élevages type naisseurs-engraisseurs. La proportion d’élevages positifs oscille autour des 45 % depuis 2017, excepté pour l’année 2020 qui était hors norme avec 52% d’élevages revenus positifs. Ce sont les élevages naisseurs-engraisseurs qui sont les plus positifs. A l’échelle individuelle, environ 80% des animaux testés sont des porcs en croissance ; et c’est aussi pour cette catégorie de population que le taux de positivité est le plus élevé, du même ordre de grandeur. La fréquence de positif chez les porcs en croissance a toutefois diminué à partir de 2020 par rapport aux années 2017-2019 (83 % vs 88 % avant 2020). L’âge médian des animaux positifs est de 7 semaines. A l’échelle de chaque catégorie de population, on observe un taux de positivité toujours meilleur chez le porc en croissance par rapport aux reproducteurs (porcs en croissance positifs / porcs en croissance testés vs reproducteurs positifs / reproducteurs testés), avec les taux qui augmentent en 2020 pour les 2 catégories. La proportion d’élevages positifs est plus élevée si les animaux sont prélevés moins de 27 heures après le début des signes cliniques.

Un nouveau génotype associé à des infections aigües

Depuis 2017, dans 70 à 80% des cas, la visite fait suite à l’appel de l’éleveur pour un syndrome grippal. Depuis 2017, la forme classique de la grippe, d’intensité normale, est de loin la plus fréquente dans les élevages positifs ; en parallèle, est observée une baisse nette de la forme récurrente d’intensité élevée, ainsi qu’une baisse, moins marquée, de la forme récurrente d’intensité normale. Pour les formes classiques d’intensité élevée, elles oscillent généralement entre 10 et 20 % sauf en 2020, où on a atteint presque les 30%. C’est en lien avec l’émergence d’un nouveau génotype H1avN2#E qui est devenu majoritaire, au détriment du H1avN1 qui l’était jusqu’à présent.

Ce nouveau génotype reste prédominant en 2021, mais il y a un léger infléchissement en 2022. Le génotype H1avN2#E est particulièrement détecté en Bretagne, mais d’autres départements peuvent aussi être concernés (nord, sud-ouest, sud-est). Le H1avN1 a une distribution plus hétérogène sur le territoire. En parallèle, est notée une plus grande diversité virale au fur et à mesure des années, notamment depuis 2020. 

Des retours de la recherche

La journée d’informations a été aussi l’occasion de présenter des résultats de deux projets de recherche. Une première étude menée à l’Anses, chez des porcs de la station expérimentale, a corroboré les retours terrain sur l’intensité des signes cliniques. Il a été ainsi montré que l’infection était beaucoup plus marquée et plus longue, chez des porcs infectés par le nouveau génotype, par rapport au H1avN1.

De plus, dans les conditions de l’étude, le vaccin trivalent disponible sur le marché, le respiporc Flu3, n’est pas efficace contre le nouveau génotype. Ce qui va aussi dans le sens des données du terrain, ainsi que des analyses complémentaires de laboratoire. Côté laboratoire, les analyses avaient mis en évidence une distance antigénique du H1avN2#E avec les antigènes vaccinaux.

Un autre projet de recherche, basé sur la modélisation à partir des données du terrain, s’est penchée sur l’étude de la diffusion spatio-temporelle du nouveau génotype H1avN2#E. En croisant les données épidémiologiques relatives à 252 foyers, ainsi que les données relatives aux mouvements entre les élevages, il a été mis en évidence un niveau élevé de connectivité entre les élevages, avant et après une notification d’un foyer, via les tournées (camions de transport des animaux), sans compter les liens qui existent du fait de la proximité des élevages (voisinage). Cette réalité du terrain peut poser la question des modalités de surveillance, qui pourrait être renforcée au niveau des élevages voisins d’un foyer, mais aussi des contacts amont et aval (via les camions) pas forcément proches géographiquement. Par ailleurs, il est apparu que les élevages multiplicateurs, bien que minoritaires dans le nombre de foyers, contribuaient fortement aux mouvements entre les élevages, pouvant suggérer un rôle finalement pas forcément négligeable, dans la dynamique virale des virus influenza porcins.

Un lien avec Santé Publique France

Toutes ces informations sont utiles pour la santé animale, et la lutte contre la maladie ; mais elles sont aussi essentielles pour la santé publique étant donné que tous les virus influenza porcins sont à potentiel zoonotique. De plus, le porc est un animal qui est réceptif à des virus influenza d’autres espèces, notamment humains, ce qui en fait un bon candidat pour la production de virus réassortants en cas de co-infections, potentiellement plus adaptés à l’humain. Le Résavip collabore avec Santé Publique France, dont une représentante était présente pour cette journée. Cette collaboration se renforce d’années en années, avec les experts de médecine humaine qui font depuis le début de l’année 2022, partie du groupe de suivi des virus influenza porcins, au côté des acteurs de santé animale. Cette collaboration s’est notamment matérialisée lors de la découverte en 2021 d’un cas d’infection humaine à virus influenza d’origine porcine, proche du H1avN2#E. Cela a amené à une saisine de la Haute autorité de santé publique sur la prévention de la transmission à l’humain des virus influenza porcins ce qui n’avait jamais été fait. Dans la continuité, la Haute autorité de santé a acté l’inclusion des professionnels exposés aux virus influenza porcins, et aussi aviaires, comme populations cibles pour la vaccination contre la grippe saisonnière. L’objectif est de réduire le risque d’évènements de réassortiments. En cas de co-infections, il ne peut être exclu l’émergence de virus grippaux plus adaptés à l’espèce humaine.

Le bilan de 2021 du Résavip est disponible depuis mars 2022 sur le site de la plateforme ESA (voir aussi article dédié). Plus d’informations sur la journée 2022 Résavip dans un prochain article du numéro 1963 de La Semaine Vétérinaire.

Tanit Halfon

Réagir à cette actualité
Cet espace a vocation à débattre et partager vos avis sur nos contenus. En réagissant à cette actualité, vous vous engagez à respecter les conditions générales d’utilisation de Le Point Vétérinaire.fr. Tout commentaire calomnieux ou injurieux sera supprimé par la rédaction.