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Retour d’expériences sur l’épizootie d’IAHP

Tanit Halfon | 22.06.2021 à 19:24:00 |
© iStock-georgeclerk

L’Anses a dévoilé son analyse de la crise d’influenza aviaire hautement pathogène 2020-2021. La dérogation à la claustration apparaît comme un point critique majeur pour expliquer l’ampleur de la crise.

Comment expliquer l’ampleur de l’épizootie d’influenza aviaire hautement pathogène, alors même qu’un plan de lutte avait été élaboré à la suite des deux précédentes crises de 2015-2016 et 2016-2017, a demandé la Direction générale de l’Alimentation le 10 février dernier, à l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses). Cette dernière a livré une première partie de réponse, à travers un avis récemment rendu public.

Des questions sur la biosécurité

Si les facteurs de risque d’introduction et de diffusion de la maladie sont multiples, il ressort que la dérogation à la claustration dans plusieurs élevages au début de l’épizootie a participé fortement à la diffusion inter-élevages de la maladie. « Couplé à une densité d’élevages particulièrement élevée, ce facteur est sans aucun doute le point critique majeur qui a permis une diffusion de proche en proche de l’infection entre les élevages de canards, dont beaucoup étaient restés sur parcours. Ce phénomène explique sans doute la vitesse de propagation importante relevée par tous les acteurs auditionnés », indiquent ainsi les experts.

Comme ils le précisent, confiner les animaux va permettre de réduire :

- les risques d’introduction primaire, à partir de l’avifaune sauvage à risque, et secondaire via l’avifaune commensale (contact indirect avec foyers voisins) ;

- les risques de diffusion à partir de l’environnement contaminé de l’élevage (parcours) via la faune sauvage (oiseaux, mammifères) fréquentant les parcours ;

- Et les risques de résurgence (difficulté d’assainir les parcours en période hivernale).

De plus, la pratique de la claustration est associée à une meilleure observance de la biosécurité.

Au-delà de la mise à l’abri, cette biosécurité, externe et interne, justement, a en réalité bien plus globalement fait défaut. « Selon les informations recueillies lors des auditions, l’absence de risque lié à la faune sauvage pendant plusieurs années consécutives a entrainé un relâchement dans cette dynamique : manque d’observance de la biosécurité; matériel de protection inadapté; flux de personnes, de véhicules et d’intrants inadaptés, que ce soit au sein des exploitations elles-mêmes ou entre les exploitations; mouvements d’oiseaux d’élevages ou de produits de l’aviculture posant question, qu’ils soient déclarés ou non », soulignent les experts.

Plusieurs recommandations

L’avis montre aussi des failles au niveau des modalités de gestion du risque. Par exemple, il y a eu un retard au dépeuplement, notamment préventif, ce qui a finalement abouti à courir derrière la crise plutôt que d’empêcher la diffusion de la maladie.

De ces constats, découlent plusieurs recommandations. Parmi elles, citons la suppression de toute possibilité de dérogation de mise à l’abri, la réduction du délai pour les autocontrôles avant mouvement à 48heures, ou encore l’organisation d’un abattage préventif immédiat dans un rayon d’a minima 1 km autour des foyers, dans les zones où les canards sont en plein air et/ou à forte densité d’élevage. Les experts recommandent aussi de forme un groupe d’intervention d’urgence qui pourrait venir en aide en cas en crise, et d’engager une réflexion sur la densité des élevages, en particulier dans le sud-ouest.

Au-delà des recommandations, les experts appellent à la vigilance : en effet, depuis 2015, le clade 2.3.4.4b se maintient au niveau mondial, et on ne peut exclure un risque de nouvelles introductions chaque année en Europe. Dans ce contexte, « même si le risque zoonotique associé aux virus IAHP (clade 2.3.4.4.b) est actuellement considéré comme très faible, des cas humains ont été rapportés en Russie début 2021. La virulence du H5N8 chez l’être humain semble très faible, comme le suggèrent les symptômes très légers reportés pour les cas russes et les données expérimentales in vitro et sur modèles animaux (furet). Ce risque zoonotique existe toutefois, il est reconnu et surveillé par l’OMS, qui s’était déjà penchée sur cette question pour le clade 2.3.4.4.b en 2016. L’évolution potentielle des génomes pourrait faire bouger le curseur de niveau de risque zoonotique à l’avenir. »

Tanit Halfon
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