La société française d’hygiène hospitalière maintient ses propos recueillis dans un précédent article, et réaffirme que la transmission par aérosols n’apparaît pas à ce jour comme le mode de transmission principal du Sras-CoV-2.
Un précédent article sur le risque de transmission aéroportée du virus Sars-CoV-2 avait fait réagir. Y étaient développées les conclusions de la Société française d’hygiène hospitalière sur les modes de transmission du virus : la transmissions aéroportée est possible, mais elle n’apparaît pas comme le mode transmission relevant en clinique, et c’est la voie des « gouttelettes » qui constitue le mode de transmission majoritaire.
Sollicité par nos soins, le président de la SF2H, le Dr Grandsbastien, est revenu sur ces conclusions. « Si l'émission de gouttelettes et toujours associée à l'émission de particules plus fines restant plus longtemps en suspension, cela ne supporte pas que la transmission "gouttelettes" et toujours associée à une transmission "aérosol". Un des mécanismes peut être prédominant, maintient-il. La SF2H assume que la transmission du SARS-CoV-2 peut se faire par aérosols ; ce n'est cependant pas le mode de transmission principal. »
Deux positions scientifiques
Il explique notamment que ce sujet fait l’objet d’un « dialogue et débat scientifique », entre deux groupes d’experts, les premiers soutenant que la transmission aérosol est importante, et les deuxièmes s’interrogeant sur le caractère relevant en clinique.
Ce débat s’est matérialisé par une première publication dans la revue scientifique, Clinical infectious diseases, appelant les instances nationales et internationales à davantage prendre en compte le risque de transmission aéroporté dans les mesures de lutte contre la maladie. « « A notre sens, il y a assez d’évidence pour appliquer le principe de précaution vis-à-vis de la transmission aéroportée », indiquaient les auteurs de ce papier, publié en juillet dernier. « Le lavage de main, et la distanciation physique sont des mesures de lutte appropriées, mais de notre point de vue, elles sont insuffisantes pour protéger contre le virus. C’est particulièrement vrai dans les environnements clos, notamment ceux qui sont surpeuplés ou avec un système de ventilation inadéquat ».
En réponse, un nouvel article a été publié un mois plus tard dans la même revue. « Nous sommes d’accord sur le fait qu’il existe un gradient dans les particules en suspension. Nous sommes d’accord que dans des conditions expérimentales, et possiblement dans des environnements mal ventilés, surpeuplés, le risque de transmission par aérosols n’est pas exclu. Nous sommes d’accord qu’une ventilation adéquate en intérieur, et l’usage d’espaces extérieurs sont des mesures valables pour limiter la transmission du virus. Néanmoins, nous affirmons que les données épidémiologiques et l’expérience clinique de la gestion de la pandémie, supportent le fait que la voie principale de transmission est celle des gouttelettes et les contacts rapprochés », ont soutenu ces auteurs.
D’autres recherches à mener
Le Dr Grandsbastien est également revenu sur le manuportage. « La transmission de pathogènes respiratoires par contact - et donc avec un rôle important du manuportage - est bien connue ; l'impact d'une politique renforcée d'hygiène des mains sur la transmission de la grippe par exemple a déjà été documenté, explique-t-il. Que la part de la transmission manuportée du SARS-CoV-2 ne soit pas connue ne signifie pas qu'elle n'existe pas ... et toutes les recommandations internationales incluent une hygiène des mains avec un haut niveau de respect pour prévenir la transmission du SARS-CoV-2 ». Enfin, il revient sur le R0 : « si le R0 d'une maladie n'est qu'un indicateur mathématique de sa contagiosité, il demeure cependant un témoin intéressant du mode de transmission d'une maladie infectieuse en l'absence de toute mesure spécifique de prévention de cette transmission. Si la transmission aérosol était le mécanisme principal voire unique de Covid-19, outre le R0, le nombre de cas nosocomiaux et de soignants contaminés aurait été bien plus important qu'observé. Pour illustration, plusieurs enquêtes sérologiques ont été réalisées dans la population des soignants médecins et paramédicaux ainsi que dans la communauté ; les données que j'ai pu voir montraient que les soignants (au sens large du terme) avaient des séroprévalence du même ordre de grandeur que la population générale et que le fait d'être fortement exposé à des patients connus Covid-19 positifs n'influait également pas ce taux de séroprévalence alors que les soignants de ces secteurs se protégeaient contre les gouttelettes essentiellement et pas systématiquement contre les aérosols. C'est ce regard qui a conduit la SF2H à porter les recommandations qu'elle a émises avec d'autres sociétés savantes et avec le Haut Conseil de la santé publique ».
Dans un avis publié cet été, le Haut conseil de la Santé publique avait identifié trois conditions favorables à la transmission aéroportée du virus : les conditions de ventilation et de flux d’air, celles de l’atmosphère (basse température, humidité) ainsi que les activités et efforts physiques pratiqués au sein de ces espaces. « Le HCSP souligne que la transmission par aérosol peut être tout particulièrement envisagée dans certains milieux professionnels particuliers, comme ceux qui ont des atmosphères froides et humides, ou une densité en employés. Ce risque de transmission doit être pris en compte et intégré aux modes de prévention de ces milieux professionnels », était-il notamment indiqué. Des propos qui en avaient appelé d’autres : accentuer la recherche sur les modes de transmission, afin de mieux définir le place spécifique des aérosols dans la transmission de la Covid-19.