Une journée d’informations sur la vaccination des maladies aviaires - Le Point Vétérinaire.fr

Une journée d’informations sur la vaccination des maladies aviaires

Laure Bignon, membre du CA de la WPSA

| 07.06.2023 à 12:46:00 |
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Dans un contexte mondial dominé par l’influenza aviaire hautement pathogène, la World poultry science association, en collaboration avec l’Association mondiale vétérinaire avicole, a organisé sa journée annuelle de conférences sur la place de la vaccination dans la gestion des grandes pathologies aviaires.

Pour la première fois, les deux branches Françaises des associations scientifiques de la volaille, la World Poultry Science Association (WPSA) et l’Association mondiale vétérinaire avicole (AMVA) ont co-organisé un événement commun sur la thématique de « La place de la vaccination dans la gestion des grandes pathologies aviaires ». L’évènement, qui s’est déroulé à Nantes le 25 mai 2023, a mobilisé une quarantaine de participants. Il a permis de retracer l’histoire de la vaccination et, plus particulièrement, de faire le point sur les techniques existant à ce jour en élevage avicole avec leurs avantages, leurs inconvénients et leurs limites, le tout au travers d'exemples concrets, dont le sujet brûlant d’actualité qu’est l’influenza aviaire hautement pathogène (IAHP).

Un rappel des bonnes pratiques de vaccination

En filières avicoles, la vaccination représente un véritable défi, car il s’agit de mettre en place une administration assez efficace pour couvrir l’ensemble d’un lot de volailles. Les voies d’administration peuvent être collectives au travers le développement de l’immunité mucosale (nébulisation / eau de boisson) ou individuelles au couvoir avec des méthodes automatisées (injection ou in ovo). Deux objectifs sont possibles : le vaccin peut viser à diminuer ou supprimer les signes cliniques ou à diminuer la multiplication d’un agent pathogène ; il peut aussi empêcher l’infection ou la réactivation virale permettant dans ce cas d’avoir une véritable stratégie préventive de la maladie.

Dans tous les cas, la mise en place d’un programme vaccinal doit être associé à un contrôle de la qualité de la vaccination depuis le stockage des vaccins jusqu’à la vérification de la bonne prise vaccinale. Sur ce point, des audits peuvent être proposés pour aboutir à l’amélioration des pratiques vers une meilleure couverture. Par ailleurs, l’état sanitaire dans lequel se trouve les animaux au moment de la vaccination contribue de façon significative à la réponse immunitaire et à la couverture vaccinale. Ainsi la vaccination n’est pleinement efficace que sur des animaux sains, non immunodéprimés. C’est à ce niveau qu’interviennent l’ensemble des mesures de biosécurité, la qualité de la conduite d’élevage, du poussin, de l’eau et de l’aliment consommés par les volailles. Ces points sont souvent négligés lors de la mise en place de stratégies vaccinales.

Vers une vaccination contre l’IAHP

Pour l’IAHP, le challenge majeur est la surveillance de la maladie, pour laquelle les signes cliniques apparaissent après le début de la fenêtre d’excrétion. Actuellement, la vaccination est à l’étude pour limiter les formes cliniques, réduire l’excrétion virale et la sensibilité à l’infection, diminuer le dépeuplement et réduire l’exposition de l’humain au virus. Toutefois, cela génère d’autres problèmes comme le risque de circulation silencieuse, la restriction au commerce ainsi que le coût du vaccin et de la surveillance associée (stratégie DIVA - Differentiating Infected from Vaccinated Animals). Il faut donc définir une stratégie vaccinale claire et intégrative dans laquelle les canards sont prioritaires et établir une surveillance étroite pour distinguer lots vaccinés et/ou infectés (DIVA) tout en maintenant une bonne biosécurité. Cette stratégie vaccinale devrait être initiée en fin d’année 2023. En effet, le coût des dernières épizooties est très important pour l’ensemble des filières. Les pertes de chiffres d’affaires ont été évaluées à 120 millions d’euros en poulet avec en outre une baisse des exportations et une augmentation des importations pour satisfaire la demande. Sur les éclosions, on note un effet fort sur les palmipèdes (-50%) et notamment sur la filière Palmipèdes à foie gras et les dindes (-27%). Au-delà des chiffres, les impacts humains sont considérables.

Mais si elle est apparue comme un bon levier de maîtrise, la vaccination doit s’envisager dans une stratégie plus globale incluant surveillance, biosécurité, traitement voire indemnisations comme l’ont montré les exemples mis en lumière lors de cette journée de la vaccination contre l’IAHP en Egypte et au Mexique, ou encore de la vaccination contre la bronchite infectieuse (BI) en France.

Des retours d’expériences

 Pour le premier exemple, à ce jour, l’Egypte et le Mexique ne sont pas encore parvenus à endiguer l’épizootie mais l’étude de leurs pratiques peut éclairer les points de vigilance à avoir en tête lors de la mise en place d’un programme de vaccination pour contrôler l’influenza. La stratégie de surveillance épidémiologique et l’existence d’un monitoring DIVA permettant de faire la différence entre la souche issue du vaccin et la ou les souches sauvages circulant sont un des points clés, incomplètement mis en œuvre dans ces expériences. La stratégie d’indemnisation des éleveurs touchés est également un axe pour améliorer la surveillance épidémiologique avec une meilleure déclaration des cas et de leur prise en charge (biosécurité, transport, abattage préventif…). Les 2 autres points clés mis en évidence sont la difficulté du respect de la biosécurité en élevage, notamment par les équipes de vaccination, qui vient limiter l’intérêt du vaccin et l’opacité sur les vaccins locaux utilisés, leur qualité et leur efficacité. Toutefois, l’amélioration sanitaire en Chine avec l’absence de cas humains d’influenza aviaire recensés depuis la mise en œuvre de la vaccination des volailles ainsi que l’avancée de la recherche sur la qualité des vaccins ont apporté une note d’optimisme à ce retour d’expérience.

L’exemple local de la BI a bien illustré le cas d’une maladie endémique de l’espèce Gallus pour laquelle la vaccination systématique de toutes les volailles ne suffisait pas à l’éradiquer. Actuellement en France toutes les volailles reçoivent au moins une fois le vaccin BI classique (Massachusets – Mass). Bien souvent des rappels sont également réalisés en élevage pour étendre la protection mais cela ne suffit pas à endiguer toutes les conséquences économiques liées à cette maladie, causée par un virus variable, et dont le diagnostic clinique est difficile à établir. En effet, les signes cliniques sont frustes mais les pertes pour les éleveurs bien réelles que ce soit en poulets de chair et en poules pondeuses. Par ailleurs sur ce type de virus respiratoire, la biosécurité n’est pas suffisante du fait de la transmission par aérosols mais elle est néanmoins nécessaire pour limiter les risques de surinfection avec d’autres agents pathogènes opportunistes.

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Les conférenciers des « jeudis de la WPSA » étaient les suivants : Mily Leblanc Maridor (Oniris), Matthieu Pinson (Oniris), Christophe Cazaban (CEVA), Caroline Guittré (ANMV), Mathieu Désolé (ITAVI), Jean-Luc Guérin (ENVT), François Meurens (Université de Montréal), Jocelyn Marguerie (réseau Cristal), Jean-Michel Répérant (ANSES).

Laure Bignon, membre du CA de la WPSA

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