Le bien-être animal s’inscrit dans un cadre européen - La Semaine Vétérinaire n° 1198 du 15/10/2005
La Semaine Vétérinaire n° 1198 du 15/10/2005

Colloque à l’Assemblée nationale. La protection animale fait débat

Actualité

Auteur(s) : Marine Neveux

Des mesures législatives en faveur des animaux existent, mais leur application se heurte à des écueils sur le terrain. De nouveaux enjeux, politiques, émergent.

Le bien-être animal était au cœur des premières rencontres organisées à l’Assemblée nationale, sous la présidence de Jean-Claude Lemoine, député de la Manche, le 7 octobre dernier.

La Fédération nationale des chasseurs, la Société centrale canine (SCC) et le ministère de l’Agriculture ont participé à l’organisation de cette journée. Le groupe chasse à l’Assemblée rassemble en effet plus de deux cent vingt parlementaires, comme l’a rappelé Jean-Claude Lemoine.

Un débat qui ne fait pas l’unanimité auprès des associations de protection animale

Josette Pons, députée du Var, a ouvert les débats par deux questions : « Faut-il traiter les animaux comme des humains ? N’avons-nous pas une vision trop anthropomorphique de la souffrance et de la mort des animaux ? »

Car cette journée n’a pas fait l’unanimité. Du côté des associations de protection animale, plusieurs ont sciemment refusé d’y participer. Parmi celles qui ont fait le choix inverse, certaines se sont alors senties prises en otage dans un débat orienté et dévalorisant pour leur action. Elles ont parfois déploré que les exemples choisis ne se réfèrent qu’aux extrémismes de la protection animale ou que le débat soit mal posé, orientant de fait les réponses. Selon le président d’une association de protection animale, « la question est plutôt de savoir s’il faut que la législation apporte à l’animal des droits conformes à sa nature d’être sensible ».

Reconnaître une spécificité animale et définir la “bientraitance”

Le rapport sur le régime juridique de l’animal, remis au printemps dernier par Suzanne Antoine (présidente de la chambre honoraire à la cour d’appel de Paris), a suscité les critiques de plusieurs intervenants. Ce texte, sorti sous le mandat de Dominique Perben, n’a jusqu’à présent pas trouvé d’écho au ministère de Pascal Clément, actuel garde des Sceaux. Ce rapport propose un aménagement du Code civil pour reconnaître une spécificité aux animaux. Jean-Pierre Digard, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), estime que le rapport est « totalement partial et d’un manque total d’objectivité ». Selon lui, « il convient d’appeler à des devoirs humains vis-à-vis des animaux plutôt qu’à une législation tatillonne qui pénalise et met en péril le monde rural ». « Les problèmes économiques et la détresse des éleveurs sont dus à de nombreux facteurs, il faut en tenir compte, mais ce n’est pas lié au bien-être animal », a souligné un autre intervenant dans la salle.

Dans le cadre des échanges entre les orateurs et la salle, notre confrère Jean-Michel Michaux, président de l’Institut scientifique et technique de l’animal de compagnie (Istav), a rappelé « que la dimension humaine est souvent oubliée. Car l’homme a besoin de la présence animale. Dans une société qui change, il est normal que la représentation évolue ».

Selon Serge Belais, président de la Société protectrice des animaux (SPA), « il peut être utile aussi de définir la notion de “bientraitance” ». Notre confrère a également souligné la nécessité de mettre à la disposition des directions départementales des services vétérinaires des moyens pour les aider à lutter contre les trafics d’animaux. En outre, la maltraitance animale étant souvent liée à la maltraitance humaine, elle mérite dans ce cadre une prise de conscience générale.

La majorité des intervenants ont reconnu que la législation est déjà conséquente. Le problème vient plutôt de sa mise en application sur le terrain, qui reste aléatoire.

La protection animale est une préoccupation européenne et mondiale

« La question du bien-être animal tient une place importante dans la législation européenne », a constaté Daniel Garrigue, député de Dordogne, rappelant aussi qu’il existe des divergences de vue entre les pays nord et sud européens.

Joseph Daul, député européen et président de la commission de l’Agriculture au Parlement européen, est venu analyser le cadre législatif en vigueur, qui concerne surtout les animaux de rente. « Dans la dernière réforme de la politique agricole commune, le bien-être est inscrit dans les aides que touchent les agricultures, a-t-il précisé. Nous n’aurons pas à rougir pour les éleveurs et les consommateurs. » Il a toutefois souligné la difficulté d’obtenir une majorité au niveau de l’Europe. En outre, « toutes les pratiques européennes que nous proposons à l’Organisation mondiale du commerce sont refusées, entraînant des distorsions de concurrence. »

En France, la préoccupation pour le bien-être animal n’est pas nouvelle. L’opinion publique y est toutefois de plus en plus sensible. La prise de conscience s’est aussi renforcée dans le cadre européen et il existe des enjeux dans lesquels les pouvoirs publics s’engagent. « La science du bien-être est nouvelle, estime Michel Cadot, directeur de cabinet du ministre de l’Agriculture. Il faut aller dans le sens d’une quantification des animaux en élevage pour faire évoluer les réglementations, non par une idéologie, mais par une analyse pertinente.  »

Une rencontre controversée

Geneviève Gaillard, députée et présidente du groupe d’étude parlementaire “protection des animaux”, a décliné l’invitation au colloque du 7 octobre.

« A rebours de l’esprit du groupe d’étude parlementaire que je préside, qui est affranchi de tout clivage politique, les organisateurs n’ont souhaité offrir une tribune qu’aux seuls élus de droite, dès lors qu’ils n’étaient pas membres de ce groupe », déplore-t-elle dans un communiqué.

« Ce colloque fait la part belle à l’expression d’autres groupes aux positions marquées à l’inverse de la protection animale, comme ceux de la tauromachie et de la chasse. Il en découle une volonté d’orientation et de partialité dans les débats. » Notre consœur a regretté aussi le clivage induit entre d’un côté « les ruraux, agriculteurs et chasseurs, présentés comme ayant une connaissance pratique, de proximité et culturelle de l’animal, et donc supposés pouvoir en parler avec légitimité » et, d’un autre côté, « les urbains déconnectés de la nature, ayant une approche angélique de l’animal, biaisée et teintée d’anthropomorphisme et de sensiblerie, bref qui ne savent pas de quoi ils parlent… »

M. N.
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