Mise en péril de la biodiversité
Formation continue
FAUNE SAUVAGE
Auteur(s) : Alain Zecchini
Certains effectifs de reproducteurs sont si faibles que le renouvellement de l’espèce est compromis.
Après l’effondrement d’une population, il est courant de considérer qu’il existe une résistance lui permettant de se reconstituer, parce que la fraction qui subsiste peut encore se chiffrer à plusieurs milliers ou millions d’individus. Mais cette interprétation est trompeuse. Des populations fortement diminuées, dont la pêche n’est plus permise, n’arrivent pas à retrouver un niveau démographique satisfaisant. C’est le cas notamment de la morue dans les eaux canadiennes. Car la surpêche affecte sérieusement la dynamique de population d’une espèce marine.
La population efficace, celle des reproducteurs, ne représente qu’une petite fraction de l’effectif total. C’est pourtant elle qui est retenue pour évaluer la vigueur d’un stock, voire d’une espèce. Quand une population est surexploitée, la population efficace diminue drastiquement. Dès lors, la variation génétique, qui conditionne la vigueur, décroît d’autant, puisque le pool génique s’est contracté. Parallèlement, les risques de consanguinité augmentent. Une spirale mortelle peut alors se créer, car la consanguinité est néfaste (les mutations défavorables ont davantage tendance à s’exprimer). Ce schéma concerne plusieurs cas récemment décrits.
La plie (ou carrelet) était une espèce commune en mer du Nord. En 2001, elle s’est effondrée. En Islande, les stocks de ce poisson ont décru de moitié au cours des dix dernières années. L’ADN d’individus de cette espèce datant de la période 1924-1972 a été comparé à celui de 2002 (voir bibliographie 1). A partir de 1970, des taux élevés de consanguinité sont constatés. Actuellement, la population efficace des stocks restants serait de 2 000 individus en Islande et de 20 000 en mer du Nord. Cela représente le cinquième des populations totales. Un ratio qui est déjà, en lui-même, une preuve de vulnérabilité.
Cette espèce appartient à une classe de poissons caractérisée par une grande fécondité, mais aussi par une mortalité élevée des œufs et des jeunes. Elle touche davantage les mâles, dont la maturation est accélérée par rapport aux femelles. Cela réduit d’autant le nombre de reproducteurs. De plus, des structures sociales semblent exister chez ces classes de poissons. Dans les frayères, les accouplements se font souvent entre individus apparentés. Toute désorganisation de ces relations par les prises de pêche ne peut qu’affaiblir la cohorte des reproducteurs. En outre, les perturbations induites, en termes de bruit et de vibrations des chaluts, auraient aussi un effet négatif sur la reproduction. Il est estimé que l’intégralité du fond de la mer du Nord est ratissée par les filets au moins quatre fois par an.
Une étude antérieure a anticipé ces enseignements pour la dorade (du Pacifique) de Nouvelle-Zélande (voir bibliographie 2). Elle montre que le ratio population efficace/population totale est aussi de 1/5 dans cette espèce. En dépit d’un effectif estimé à plus de 3 millions d’individus en 1985 (soit une réduction de 75 % par rapport à la population de 1950), une nette baisse de l’hétérozygosité et du nombre moyen d’allèles est notée, en raison de la diminution de la population efficace. Cela met en cause la survie de cet animal, car avec une variabilité génétique réduite, il a nettement plus de difficultés à s’adapter aux changements de son environnement.
Chez un mammifère comme le céphalorhynque d’Hector, un dauphin, le danger vient des prises incidentes de la pêche. Comme nombre de dauphins, marsouins ou tortues, il est pris dans les filets destinés aux poissons. En Nouvelle-Zélande, ses effectifs actuels ne seraient pas supérieurs à 4 000 individus, ce qui en fait l’une des populations de mammifères marins les plus menacées au monde. L’examen de l’ADN mitochondrial d’individus, entre 1870 et 1998, montre que la variation génétique a largement chuté dans la période contemporaine. Celle-ci correspond, à partir de 1970, à l’utilisation de filets plus performants, couplée avec une dérégulation du secteur des pêcheries (voir bibliographie 3).
A l’époque de cette étude (2000), les auteurs ont estimé que l’une des deux populations de référence devait perdre, dans les vingt ans à venir, toute variabilité de l’ADN : en d’autres termes, son taux de consanguinité et sa fragmentation devaient atteindre leur optimum, lui laissant peu de chances de se perpétuer.
La loutre de mer a connu, du fait de sa surexploitation, des goulets d’étranglement dont les effets se font sentir jusqu’à nos jours. A la suite de l’abattage de 99 % des individus d’origine d’une population de l’Etat de Washington (Etats-Unis), 62 % des allèles et 43 % de l’hétérozygosité sont perdus chez les loutres actuelles (voir bibliographie 4). Un constat du même ordre a pu être effectué pour plusieurs autres espèces presque décimées aux siècles antérieurs, notamment l’éléphant de mer septentrional, très recherché au xixe siècle par les phoquiers et les baleiniers pour sa graisse et son huile.
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