Reproduction bovine
Formation continue
RURALE
Auteur(s) : Anne Thébault
Un excès ou un déficit en énergie, en azote ou encore des carences minérales influent sur les performances.
Une alimentation équilibrée est primordiale chez la vache laitière, aussi bien en période de production qu’au tarissement. Elle influence la régularité et l’expression des chaleurs, la réussite à l’insémination artificielle, et, dans une moindre mesure, les problèmes au vêlage, comme la non-délivrance et la métrite. Elle peut aussi intervenir, de façon anecdotique, dans les phénomènes de nymphomanie.
L’anœstrus est un syndrome caractérisé par l’absence de chaleurs. Il peut être primaire : les chaleurs ne sont jamais apparues chez la génisse, ou ne réapparaissent pas après le vêlage chez la vache.
L’alimentation est un facteur essentiel dans la survenue de ce phénomène chez la vache laitière. Deux périodes sont particulièrement sensibles : le tarissement et le début de la lactation. Lorsque la vache est tarie, un excès d’apport en énergie et en protéines favorise le développement de maladies métaboliques après le vêlage et retarde l’apparition des premières chaleurs. C’est ainsi que lors de stéatose, la diminution de l’activité hépatique entraîne une augmentation de trente-trois jours de l’intervalle vêlage-vêlage par retard des premières chaleurs et une diminution du taux de réussite en première insémination artificielle (IA, voir bibliographie 1).
En début de lactation, un déficit énergétique se traduit par un retard des premières chaleurs. Celui-ci est lié à une ovulation plus tardive, consécutive à un ralentissement de la croissance folliculaire et à des chaleurs silencieuses. L’insuffisance d’apport en énergie est responsable d’une mobilisation des réserves de la vache, d’où un amaigrissement prolongé incompatible avec une reproduction normale. Il est souvent considéré que la reprise d’une activité sexuelle normale correspond à un bilan énergétique qui devient positif, c’est-à-dire lorsque les vaches commencent à reprendre du poids (voir bibliographie 1).
Il s’agirait d’une régulation métabolique par l’insuline et les insuline like growth factor (IGF) du contrôle hormonal de l’activité ovarienne et de la croissance folliculaire : les IGF sont synthétisées sous la stimulation de la growth stimulating hormone (GSH), sauf lors de déficit énergétique. Ainsi, en début de lactation, la forte sécrétion d’hormone de croissance ne s’accompagne pas d’une importante production d’IGF (voir bibliographie 2).
D’autres éléments de la ration sont également mis en cause (voir tableau « Influence de carences ») : une carence ou un excès de phosphore, une carence en vitamine A, en cuivre, en cobalt, en manganèse et en iode (par le biais des hormones thyroïdiennes stimulant l’activité gonadotrope de l’hypophyse).
Lors d’anœstrus secondaire, les chaleurs sont déjà survenues. Un état d’engraissement trop important, dû à une alimentation presque exclusivement énergétique, semble favoriser l’absence de cycle œstral. Dans la majorité des cas d’anœstrus primaire ou secondaire, les chaleurs réapparaissent en quelques jours ou quelques mois, après des modifications des conditions d’entretien et l’amélioration de l’état d’engraissement (perte ou prise de poids). Il convient de veiller à un apport correct en phosphore et vitamine A (cette mesure a un effet préventif, les résultats ne sont pas immédiats). La mise à l’herbe au printemps peut aussi améliorer la situation via une meilleure alimentation, un bon éclairage et de l’exercice.
Une vache infertile est celle qui n’est pas gestante, malgré des chaleurs régulières, un appareil génital normal et trois inséminations artificielles successives, pratiquées au bon moment. Cette infertilité est souvent confondue avec une mortalité embryonnaire précoce. L’alimentation a une incidence à plusieurs niveaux. Certains nutriments sont nécessaires aux synthèses hormonales : la lysine pour la follicle stimulating hormone (FSH), le carotène pour la synthèse du corps jaune, le phosphore pour l’activité enzymatique.
Le cuivre intervient par le biais des prostaglandines (rôle dans la nidation, l’ovulation et la lutéolyse). Il assure aussi la cohésion de l’embryon. Une carence provoque donc une perturbation du fonctionnement gonadique et une résorption embryonnaire précoce (voir bibliographie 7 et 8).
L’apport énergétique et protéique est essentiel : la sous-nutrition joue sur la reproduction par l’hypoglycémie qu’elle entraîne et qui provoque un retard de l’apparition de follicules matures associé à des anomalies ultérieures de l’ovulation et de la mortalité embryonnaire (voir bibliographie 1). L’excès d’azote dégradable a des conséquences encore plus nombreuses, en raison de la transformation en urée de l’ammoniac absorbé par la muqueuse ruminale : l’ammoniémie élevée engendre une diminution du pH utérin qui affecte la survie des spermatozoïdes, un effet cytotoxique sur les spermatozoïdes, l’ovocyte, voire l’embryon, une baisse de la progestéronémie et une augmentation de la sécrétion de PgF2α (voir bibliographie 2). De plus, l’élimination de l’azote sous forme d’urée consomme de l’énergie, d’où un déficit énergétique (voir bibliographie 6).
En pratique, il convient d’adapter l’alimentation aux besoins de production. Un apport régulier de minéraux correctement dosés est recommandé. Un flushing (augmentation importante de l’apport énergétique pendant une courte période) n’a d’intérêt chez les génisses que si la croissance est faible et a même un effet défavorable si elle est normale.
Les métrites, dues à la présence de diverses bactéries, évoluent de façon chronique ou aiguë dans les semaines qui suivent le vêlage.
Bien qu’aucune démonstration ne l’ait prouvé de façon rigoureuse, l’alimentation interviendrait dans l’apparition de ces affections : un excès énergétique et protéique, surtout en fin de gestation, favorise les rétentions placentaires, avec comme conséquence la survenue de métrite (voir bibliographie 1). Les autres éléments incriminés sont un déficit en calcium et en magnésium, ainsi que des apports insuffisants en cuivre, zinc, vitamines A et E (voir bibliographie 3). Le sélénium, en général associé à la vitamine E, aurait également des effets protecteurs contre les rétentions placentaires et les métrites (voir bibliographie 5 et 10). En début de lactation, un amaigrissement excessif entraîne cétose et métrites. Il est responsable de la libération d’une quantité importante d’acides gras non estérifiés dans la circulation sanguine, d’où une diminution de l’efficacité de la phagocytose nécessaire à la décontamination bactérienne de l’utérus. Un état acidosique, dû à un défaut de transition alimentaire ou à un apport excessif de concentrés, peut conduire à un amaigrissement intense, avec les mêmes conséquences (voir bibliographie 3).
En pratique, pour prévenir les métrites, il convient d’éviter toute suralimentation, surtout pendant le tarissement. Cela suppose donc une séparation entre les vaches taries et celles en lactation. L’alimentation doit toutefois être équilibrée (apport protéique, minéral et vitaminique).
La vitamine A peut être fournie dans la ration ou en injection intramusculaire, un mois avant le vêlage. En fin de tarissement, l’apport de concentrés est progressif (pas plus de deux ou trois kilos d’augmentation par semaine). Mieux vaut limiter les apports de calcium en fin de gestation (pour éviter les hypocalcémies puerpérales), sans toutefois provoquer de carence (voir bibliographie 1). Un apport de sélénium dans les trois dernières semaines de gestation peut diminuer la fréquence des rétentions, à condition que la carence en sélénium soit leur seule cause, ce qui est rarement le cas (voir bibliographie 5 et 10).
Après le vêlage, l’alimentation est à adapter aux besoins de production de la vache, en particulier chez les vaches hautes productrices pour lesquelles les risques de sous-alimentation sont importants, étant donné que la capacité d’ingestion augmente beaucoup moins vite que les besoins en début de lactation (voir bibliographie 2).
La nymphomanie est caractérisée par une exacerbation, en durée et en intensité, des signes de chaleurs, qui reviennent tous les quinze jours. Ce syndrome est presque toujours associé à la présence de kystes folliculaires ovariens. Il concerne surtout des vaches laitières hautes productrices, prédisposées génétiquement, sous l’action de mauvaises conditions d’entretien.
La nymphomanie apparaît essentiellement lors d’alimentation à base de légumineuses, de feuilles de betterave ou d’ensilages ne contenant que peu de fourrage grossier, et concerne souvent les animaux à forte production. Il existe soit un excès protéique de la ration, soit des phyto-œstrogènes dans les légumineuses ou les moisissures de l’ensilage. Ces substances se trouvent en quantité non négligeable dans les jeunes légumineuses, et d’autant plus que la fumure azotée est élevée alors que la phosphatée est pauvre. Elles se rencontrent également dans des végétaux parasités : la luzerne “tachée” est en réalité parasitée par Pseudopeziza medicaginis, et enrichie en coumarol. La moisissure du maïs grain ensilé (Fusarium roseum) est responsable d’un syndrome d’hyperœstrogénisme. Le composé en cause est la zéaralénone. Ainsi, les vaches hautes productrices doivent avoir une alimentation adaptée pour éviter d’extérioriser leur prédisposition à la nymphomanie.
La prévention des troubles de la reproduction repose sur le respect de règles d’hygiène (des locaux et des animaux), le respect du niveau et de l’équilibre alimentaires selon les périodes de production, et la prévention d’autres affections ou maladies. Si une vache présente des troubles de la reproduction qui ne s’expliquent pas par un examen clinique, et à plus forte raison si plusieurs animaux du troupeau sont touchés, une vérification des rations et une analyse alimentaire s’imposent.
Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »
L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.
En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire
Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.
Recevez tous les jours nos actualités, comme plus de 170 000 acteurs du monde vétérinaire.
Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire