Equidés. Génétique et élevage
Actualité
Auteur(s) : Marine Neveux
Alors que le cheval de sport hexagonal peine à briller, le système du Blup, plus subi que choisi, est remis en cause.
Les indices de sélection font l’objet de controverses dans le milieu équin. Alors que l’élevage français n’est pas au beau fixe en termes de performances sportive, le Blup(1) apparaît pour certains comme le responsable de tous les maux dans la sélection équine. Il est ainsi régulièrement remis en cause par plusieurs éleveurs. Le contexte législatif ne participe pas à calmer les débats. En effet, un récent décret stipule que tout étalon peut être admis à la monte, qu’il soit agréé ou non. Une table ronde réunissant des vétérinaires, des généticiens et des éleveurs de chevaux de sport, organisée par le magazine L’Eperon à Paris, le 9 juin dernier, a permis d’initier le débat sur ces points.
Selon Luc Tavernier, directeur de la mission hippique du Centre d’études zootechniques (CEZ) de Rambouillet, consultant de l’Association nationale du Selle-Français (ANSF), « le Blup est un indice sur lequel s’appuient fortement les politiques d’élevage. Mais il serait réducteur de lui attribuer tous les maux de l’élevage ». Apparu dans les années 85 en France, « il s’agit d’un outil. Le plus important est de savoir ce qui est souhaité au niveau de la sélection, en amont ». « Au-delà de l’outil, il faut définir une stratégie. Or, à l’heure actuelle, cette dernière n’est pas claire. »
« Cela fait vingt ans que nous utilisons le Blup. Comment peut s’expliquer le résultat actuel de l’élevage de chevaux de sport en France ? », s’interroge Jean-François Noël, éleveur de renom (élevage du Thot), membre de la commission génétique de l’ANSF. Il déplore un grand nombre d’imprécisions au niveau de cet indice, notamment la non-intégration des critères commerciaux et le fait qu’il se fonde essentiellement sur la sélection des jeunes chevaux. En outre, il regrette que les animaux qui partent vers l’étranger ne soient plus intégrés dans le système de calcul.
Selon Luc Tavernier, « le résultat de l’élevage français ne s’explique pas par une sélection sur le Blup ». Néanmoins, l’agrément automatique des étalons par les Haras nationaux d’après le Blup joue un rôle. « Avec la complicité des Haras, cet indice est mal utilisé », surenchérit Jean-Baptiste Thiébot (élevage de Neville, membre du bureau de l’ANSF). Selon lui, « cela a abouti à un classement par le Blup, réduisant l’élevage à la production de produits standardisés, où les croisements se font en fonction de points et d’un livre ! Or les juments qui ont les indices de Blup les plus élevés ne sont pas celles qui présentent forcément les meilleures performances ». Il déplore, en outre, que ce dispositif ait été imposé par les Haras nationaux. « Cela a fait beaucoup de dégâts. Par opportunisme, plusieurs éleveurs ont réalisé des croisements d’après ce système d’indice pour pouvoir vendre leurs poulains. »
Selon notre confrère Michel Guiot, praticien dans les Ardennes et éleveur de Selle-Français à l’affixe « de Talma », « le problème du Blup est qu’il n’a pas été avalisé par les éleveurs au départ ». Il estime qu’il convient de l’utiliser certes comme un outil, mais qu’il n’est pas responsable du déclin du Selle-Français.
Certains intervenants de la table ronde ont également abordé la limite du Blup, qui mesure les résultats en concours de sauts d’obstacle (CSO), mais pas le style, ni le “coup de saut” d’obstacle du cheval. Dans d’autres espèces animales, les Blup sont multifactoriels, alors que celui des équidés ne mesure pas tous les critères pris en considération par les éleveurs, ainsi que l’aspect commercial.
Frédéric Neyrat, praticien à Beligneux (Ain), évoque pour sa part la perte de diversité génétique induite par la sélection des souches normandes selon le principe d’un Blup élevé chez les géniteurs. Il estime par ailleurs que la non-intégration des critères des allures et de beauté dans l’indice a fait perdre beaucoup au Selle-Français. « Il faut réintroduire du sang, via le pur-sang anglais, l’anglo-arabe ou des sangs étrangers pour améliorer la beauté des produits. » En effet, certains estiment que le Blup a fermé la porte aux pur-sang. Pour sa part, Luc Tavernier juge que ces derniers ont montré de moins bonnes performances.
Jean-Baptiste Thiébot souligne aussi la nécessité de hiérarchiser les concours, car « les conditions de leur tenue peuvent être particulièrement différentes de l’un à l’autre et biaisent les résultats ». « Tant qu’il n’existera pas un Blup mondial, nous ne pourrons nous servir de cet indice », ajoute Frédéric Neyrat.
Luc Tavernier estime aussi que le niveau des cavaliers, ainsi que le profil de l’équitation française, plus ludique qu’ailleurs, peuvent être évoqués comme des obstacles à la mise en valeur des chevaux en France.
Pour sortir des écueils du Blup, notre confrère Francis Houdré (ANSF) avance plusieurs propositions : non-parution des indices ayant un coefficient de détermination faible, création d’un indice “modèles et allures”, standardisation des épreuves, création d’un indice phénotypique. Quant à Bernard Le Courtois, éleveur dans l’Orne et président de l’Association syndicale des étalonniers privés, il conclut en déplorant que « le Blup ait toujours été imposé en Selle-Français, alors que les intervenants du trot et du galop l’ont toujours refusé ».
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