Revoir les modèles de gouvernance en termes de gestion de crise

Principe de précaution rime, bien entendu, avec gestion de crise. A cet égard, Patrick Lagadec, directeur de recherche à l’Ecole Polytechnique et spécialiste en la matière, explique qu’il est aujourd’hui nécessaire de revoir les modèles de gouvernance en termes de gestion de crise.

« Aussi longtemps que par crise nous entendrons une situation délicate qui exige des matériels particuliers, des règles organisationnelles spécifiques, des plans et des check lists adaptées, le gestionnaire n’aura guère de difficulté, somme toute, à décider, et la crise acquerra son “brevet d’acceptabilité”. Mais il en va tout autrement si l’on tente de faire travailler des individus et des groupes sur les enjeux essentiels d’une crise : un événement hors cadre, pour lequel, par définition, toutes les batteries de réponses souhaitées ne sont pas disponibles. Il est d’usage d’interroger l’expertise avant de décider, puis d’informer. Mais l’expert peut être rapidement hors du champ de validité de ses modèles. Qu’il s’agisse de la “vache folle”, du SRAS ou des tours du Word Trade Center, l’expertise s’est retrouvée démunie, au moins pour répondre, en temps réel, de la décision. »

Dominique Dormont, expert ESB, à partir de son expérience relative au prion, avait ainsi traduit cette rupture : « Le premier message à faire passer doit concerner les limites des connaissances dont nous disposons. »

Par ailleurs, Patrick Lagadec insiste sur le manque de retour d’expérience en matière d’épisodes graves, particulièrement en France, citant l’exemple de la catastrophe d’AZF survenue à Toulouse. « Concernant l’épisode du SRAS, il aurait été également important de lancer une initiative internationale forte réunissant les acteurs gouverenementaux, de la santé publique, et des transports, pour cerner les bonnes questions, les bonnes idées et les pistes de progrès », poursuit-il.

Selon lui, il convient en outre de se pencher sur bien d’autres fronts, des initiatives fortes devant être lancées : questionnements, simulations, formations, débats publics internationaux , etc. « L’heure est à la créativité devant les nouveaux enjeux de sécurité. Il s’agit dorénavant de développer une culture internationale de la crise et cela suppose notamment d’avoir d’autres visions de la science. »