Ethique et grippe aviaire. Gestion des peurs en cas de pandémie grippale
Actualité
Auteur(s) : Marine Neveux
Conséquences sociétales, éthique des médias ou incertitude scientifique ont été évoquées lors d’une réunion.
Le premier colloque national « Ethique et pandémie grippale » s’est tenu le 15 septembre dernier au ministère de la Santé, à Paris. Comme l’a souligné Xavier Bertrand, ministre de la Santé et des Solidarités, « il est important que l’organisation du dispositif des soins et que la gestion des éventuels risques de pandémie, d’un point de vue sociétal, soient considérés bien en amont ». L’objet de ce colloque était donc de poser les bases d’une réflexion, mais aussi celles d’une communication, bien qu’il convienne de rappeler que le virus pandémique n’existe pas à l’heure actuelle. Un groupe d’experts en sciences humaines a toutefois été mis en place afin de préparer l’éventuelle apparition d’un risque de pandémie grippale sur le plan sociétal. Cela exige notamment de positionner le débat sur le plan du rationnel versus irrationnel, de se pencher sur l’éthique à l’échelle médicale et animale, d’étudier la répartition et la disponibilité des soins, etc.
« Au-delà des aspects techniques, il faut savoir intégrer les aspects humains », a souligné le ministre. Il a ainsi insisté sur la nécessité d’un accompagnement de la population par l’analyse des comportements individuels et collectifs. Avant la crise, « le risque est de cantonner le discours entre le scepticisme et l’alarmisme », a analysé Xavier Bertrand. Il est donc nécessaire « d’adopter une communication rationnelle et raisonnable. Dans certains pays, la logique de responsabilisation individuelle est plus présente [que dans le nôtre]. C’est la raison pour laquelle il faut aujourd’hui informer ». En temps de crise, l’objectif est de « maintenir l’ordinaire en situation extraordinaire, a-t-il poursuivi. Il faut prendre en compte qu’une pandémie grippale s’inscrirait dans le temps. La résistance physique et morale des individus est alors à envisager durant plusieurs semaines ».
En outre, comment conviendrait-il de réagir vis-à-vis de l’extérieur : fermer les frontières ? Opter pour des restrictions ? Pour faire face à de telles questions, le ministre souhaite que « ce débat ne soit pas le seul fait des affaires publiques ».
Durant cette rencontre, le volet animal n’a pas été oublié. Notre confrère Jean-Pierre Kieffer, président de l’Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoir (OABA) et secrétaire général du Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL), a rappelé les comportements excessifs vis-à-vis des oiseaux sous l’effet d’une trop grande pression médiatique. Il a aussi souligné la faiblesse des mesures sanitaires dans les pays asiatiques. Evoquant celles appliquées dans notre pays, il a évoqué leurs conséquences, comme la mort de certains volatiles à la suite du confinement, mais également la réorganisation des élevages et la perte de labels. « Les images de volailles jetées vivantes ont choqué l’opinion publique, a-t-il également souligné. Cette destruction à grande échelle ne doit pas occulter la prise en considération du statut d’être sensible de l’animal. » Quant aux consommateurs, notamment déstabilisés lorsque les médias ont insisté sur “le danger venant du ciel”, « il faut les rassurer ». Citant les conséquences d’autres exagérations médiatiques, comme des abandons de perruches, l’utilisation de glue pour piéger les pigeons à Paris, des euthanasies d’oiseaux, des inquiétudes sur le sort des chats, etc., il a plaidé pour « une éthique de l’information, primordiale pour éviter les abandons ». En outre, si une pandémie survenait, « une entraide serait nécessaire pour la garde des animaux des personnes hospitalisées ».
Dans une situation où animaux de compagnie, d’élevage, faune sauvage et espèces détenues en réserves naturelles et parcs zoologiques seraient concernés, notre confrère a souligné le rôle essentiel des vétérinaires dans le maillage sanitaire et leur rôle dans le domaine de la santé publique, de la santé animale et du bien-être animal. Particulièrement exposés en tant que professionnels de l’animal, ils devraient, selon lui, bénéficier des moyens de protection adaptés si une crise sanitaire survenait.
Par ailleurs, si la pandémie avait lieu, l’équarrissage serait un maillon essentiel pour le traitement des animaux. Toutefois, ses capacités de destruction pourraient être dépassées. Surgirait alors le risque de s’orienter vers l’enfouissement.
Le rôle de la recherche a été abordé par Jean-François Girard, président de l’Institut de recherche pour le développement. Il a notamment évoqué l’insuffisance de la seule approche de l’agent pathogène. « Il ne faut pas rester monothématique », a-t-il insisté. Outre le fait que la contrainte du temps pèse sur la recherche, il faut également que « la société apprenne à tolérer l’incertitude scientifique ».
Pour sa part, Xavier Emmanuelli, cofondateur de Médecins Sans Frontières et président fondateur du Samu social, a détaillé les comportements humains susceptibles de survenir en cas de pandémie grippale, en s’appuyant sur l’exemple de crises passées. Selon lui, deux types de comportements pathologiques pourraient être observés : « Le premier consiste en une sorte de panique où, pressentant un danger mortel diffuset immédiat, les personnes se précipitent dans une fuite aveugle et égoïste. La deuxième attitude est aussi irrationnelle, mais dans un sens héroïque. Cet héroïsme d’altérité est spécifique des graves et soudaines crises entraînant un chaos sociétal. »
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