Salmonella enterica au Royaume-Uni
Formation continue
FILIÈRES
Auteur(s) : Catherine Bertin-Cavarait
Les voyages à l’étranger et les importations d’œufs sont associés à l’augmentation de l’incidence de la résistance de Salmonella Enteritidis. Les ventes anglaises d’antimicrobiens vétérinaires sont disculpées.
Entre 2000 et 2004, les sérotypes de Salmonella enterica isolés le plus fréquemment chez les patients anglais et gallois étaient Enteritidis (SE) et Typhimurium (ST), soit respectivement 60 % et 15 % des 14 000 à 18 000 isolats. Durant cette période, le laboratoire des pathogènes intestinaux de l’Agence de la protection de la santé (Health Protection Agency Laboratory of Enteric Pathogens, HPA(1)) a enregistré une évolution de l’incidence de la résistance aux antimicrobiens pour ces deux sérotypes ( voir tableau 1).
Les résultats d’une étude visant à évaluer l’impact des voyages à l’étranger, des importations d’aliments, et celui de la quantité des antibiotiques prescrits par les vétérinaires sur les changements d’incidence de la résistance aux antimicrobiens de SE et ST en Angleterre et au Pays de Galles ont été présentés par notre confrère John Threlfall, membre du centre des infections de l’HPA de Londres (Grande-Bretagne), lors de la session “résistance aux antimicrobiens” du récent symposium Salmonella et salmonelloses(2).
En 2000, 80 % des 2 651 isolats humains de ST étaient résistants à au moins un antibiotique. 59 % étaient résistants à l’ampicilline, au chloramphénicol et aux tétracyclines, 20 % au triméthoprime, et 12 % à l’acide nalidixique, avec une diminution concomitante de la sensibilité des isolats à la ciprofloxacine. C’est à la fin des années 80 que le lysotype DT104 multirésistant a émergé en Angleterre et au Pays de Galles (voir courbes 1).
En 2004, l’étude des 1 787 isolats humains de ST a montré une diminution de 20 % de leur résistance aux antimicrobiens (voir tableau 2), avec une réduction concomitante de la résistance à l’ensemble des antibiotiques testés. Le principal facteur explicatif est la baisse du nombre de lysotypes de STDT104 multirésistants isolés en 2004. Pour SE, la situation épidémiologique est bien différente.
En 2000, seulement 19 % des 8 468 isolats étaient résistants aux antimicrobiens, avec 11 % des isolats résistants à l’acide nalidixique et une sensibilité à la ciprofloxacine diminuée. La majorité de ces isolats étaient des SE PT1 (phage type 1 = PT1) qui étaient pour la plupart associés à des voyages à l’étranger. En 2004, 35 % des isolats de SE étaient résistants, dont 26 % à l’acide nalidixique. 90 % des isolats de SE résistants à l’acide nalidixique appartenaient au type PT1 mais, contrairement à l’année 2000, moins de 10 % d’entre eux étaient associés à un voyage à l’étranger.
Le rapprochement de ces variations de résistance avec les consommations vétérinaires d’antimicrobiens n’a pas mis en évidence de lien (voir tableau 2). De 2000 à 2004, les ventes de tétracyclines au Royaume-Uni ont augmenté (7 %), de même que celles des bêta-lactamines (5 %). Les ventes de triméthoprime/sulfonamides ont diminué de 24 % et celles des fluoroquinolones ont baissé de 17 %.
Pour cette même période, l’épidémiologie des infections à SE a fortement évolué. L’incidence des gastro-entérites humaines à SEPT4, liées aux infections des œufs des élevages autochtones, a rapidement décliné, avec, dans le même temps, une hausse de l’incidence des infections dues à SEPT1 (+ 102 %) et à SEPT14b (+ 419 %, (voir courbes 1). La même évolution a été enregistrée par le réseau international de surveillance des infections gastro-intestinales “Enter-net”. Pour la période 1998-2003, les gastro-entérites à SEPT4 ont diminué de 30 %, celles dues à SEPT1 ont augmenté de 115 % et celles dues à SEPT14b de 396 %.
En 2002, une enquête faisant suite à une flambée de salmonellose à SEPT14b a montré que la souche de salmonelle impliquée dans l’épidémie était identique à une souche de salmonelle isolée dans des œufs importés d’Espagne. Pendant les deux années consécutives à cette épidémie, 11 718 œufs ont été échantillonnés en vue d’une recherche de salmonelles. Salmonella spp a été isolée dans 5,6 % des œufs espagnols utilisés en restauration et 1,1 % des œufs anglais qui ne disposent pas d’un signe de qualité. Parmi les œufs anglais produits sous signe de qualité, aucune salmonelle n’a été isolée. Le typage moléculaire, c’est-à-dire le profil plasmidique et l’électrophorèse en gel pulsé, n’a pas montré de différence entre les isolats de SE des œufs espagnols et les isolats humains.
Depuis 2000, les importations d’œufs au Royaume-Uni sont marquées par deux phénomènes. D’une part, elles ont plus que doublé (voir courbe 2), d’autre part, les importations d’œufs depuis l’Espagne ont progressé de telle façon que ce pays est devenu le plus important pays exportateur d’œufs vers le Royaume-Uni en 2004. En 2000, 54 % des œufs importés provenaient des Pays-Bas, 29 % d’Allemagne et moins de 1 % d’Espagne. En 2003, 33 % des œufs importés provenaient d’Espagne, 21 % d’Allemagne et 20 % des Pays-Bas. Au Royaume Uni, les œufs importés et les œufs locaux non produits sous signe de qualité sont destinés à la restauration et non mis en vente dans les magasins. Aussi, lors des flambées de gastro-entérites à salmonelles, les restaurants sont majoritairement impliqués, en lien avec le circuit de distribution des œufs importés.
L’implication des importations dans l’augmentation de l’incidence des résistances de SE est également rapportée aux Pays-Bas. A la suite de l’épizootie d’influenza aviaire en avril 2003, ce pays a accru ses importations d’œufs, en particulier en provenance d’Espagne. Parallèlement, le type de salmonelle (PT) et le profil de la résistance aux antibiotiques des isolats humains de S. Enteritidis n’étaient pas ceux trouvés dans les élevages autochtones de poulets de chair et de poules pondeuses. En revanche, ils figuraient parmi les cas rapportés en Espagne et au Portugal. Les enquêteurs avaient conclu à une augmentation probable de l’importation d’œufs espagnols contaminés.
Pour John Threlfall, l’ensemble de ces résultats suggère que l’évolution de l’incidence de la résistance des sérotypes les plus communs de Salmonella enterica n’est pas automatiquement liée aux ventes des antimicrobiens vétérinaires au Royaume-Uni. Pour Salmonella enterica serovar Enteritidis, les facteurs majeurs de l’augmentation de l’incidence des souches résistantes sont d’une part les voyages à l’étranger et d’autre part l’importation d’œufs contaminés par des souches résistantes aux antimicrobiens.
De plus, le chercheur considère que pour diminuer le portage de souches résistantes, il est vital de contrôler l’utilisation des antimicrobiens dans l’alimentation des animaux de production au niveau international. Enfin, un contrôle des résistances et de l’emploi des antimicrobiens vétérinaires a été mis en place dans les pays qui exportent régulièrement des produits alimentaires au Royaume-Uni.
Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »
L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.
En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire
Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.
Recevez tous les jours nos actualités, comme plus de 170 000 acteurs du monde vétérinaire.
Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire