En Australie, la disparition du dingo menace la survie des marsupiaux

Les grands prédateurs sont-ils les alliés des petites espèces, contre les ennemis de celles-ci ? Plusieurs travaux tendent à le montrer. Les grands prédateurs (tant terrestres que marins), en contrôlant par leur présence les prédateurs de taille moyenne (les “mésoprédateurs”), permettent aux espèces chassées par ces derniers de subsister. Or ces grands prédateurs, notamment les grands canidés ou les grands félins, déclinent de plus en plus, ce qui remet en question les chaînes alimentaires, et donc le fonctionnement des écosystèmes. Un exemple, en Australie, confirme le rôle important que jouent les grands prédateurs au sommet de la chaîne alimentaire⁽¹⁾.

Les chercheurs ont testé l’hypothèse qu’en Australie, le dingo (Canis lupus dingo) était bénéfique pour la perpétuation des marsupiaux, lesquels sont les proies des renards et des chats féraux, introduits par l’homme lors de la colonisation du continent australien, au XIX^e siècle.

Le dingo est maintenant rare ou absent de la moitié du continent australien

Le dingo a été (et reste) persécuté par l’homme, car il est accusé de s’en prendre aux moutons. Mais il peut également éliminer localement les renards et les chats. Les chercheurs ont examiné les tendances du déclin du dingo, pour voir notamment si la juxtaposition de l’aire de répartition de cet animal avec celle des marsupiaux avait du sens. Ce sens, ils l’ont trouvé : les zones où les dingos ont résisté sont celles où les marsupiaux se sont maintenus et où les renards comme les chats se sont faits rares. Un point complémentaire s’est dégagé : là où les moutons sont nombreux, les dingos ont largement décliné, ainsi que les marsupiaux. Cela s’explique par l’éradication du dingo, abattu par les éleveurs, mais aussi par la prolifération des lapins dans les zones à moutons. Ceux-ci favorisent l’abondance des renards, qui se nourrissent aussi des marsupiaux. Ainsi, presque tout le sud de l’Australie, région traditionnelle d’élevage du mouton, est dépourvu de dingos.

Pour les auteurs, il serait temps de reconsidérer l’appréciation portée sur le dingo. Il est considéré comme un nuisible, alors qu’il représente une espèce clé pour la préservation de la biodiversité en Australie. Particulièrement en tant qu’élément important de dissuasion envers les renards et les chats féraux qui sont, eux, de vrais nuisibles, et dont les ravages continuent.

• (1) C. Johnson et coll. : « Rarity of a top predator triggers continent-wide collapse of mammal prey : dingoes and marsupials in Australia », Proceedings of the Royal Society B, 2007, vol. 274, n° 1608.