Le bœuf de Toscane prouve l’origine des Etrusques

D’où sont venus les Etrusques, dont la civilisation a régné sur l’Italie centrale (actuelles Toscane et Ligurie orientale) du VIII^e au I^er siècle avant Jésus-Christ ? Quantité d’hypothèses ont été formulées, avec deux orientations majeures : un peuplement à partir d’autres régions italiennes ou bien une immigration depuis le Moyen-Orient. Les études philologiques et génétiques sont contradictoires. Et si de nombreux auteurs de l’Antiquité ont pris fait et cause pour l’hypothèse moyen-orientale, ils se sont appuyés sur la tradition orale, qui ne constitue pas une preuve suffisante.

Il a été nécessaire de comparer le destin commun de l’homme et du bœuf (Bos taurus) pour éclairer le débat⁽¹⁾. L’évolution du bœuf, depuis sa domestication, est liée à celle de l’espèce humaine, qu’elle accompagne dans tous ses déplacements majeurs de population.

Des scientifiques ont analysé l’ADN mitochondrial de populations humaines et bovines d’Europe, d’Egypte, du Moyen-Orient et d’Anatolie. Les principales races bovines italiennes, notamment, étaient représentées. Pour les bœufs, les résultats des séquences d’ADN de quatre races toscanes et liguriennes orientales ont permis de regrouper celles-ci avec des races des Balkans, d’Anatolie et du Moyen-Orient. Plus précisément, la comparaison des haplotypes a relié les quatre races à celles d’Anatolie et du Moyen-Orient. Deux autres races bovines, l’une en Sicile et l’autre en Italie du Nord, pouvaient aussi se comparer à d’autres en Anatolie et au Moyen-Orient. Les auteurs, à ce sujet, rappellent que la Sicile avait représenté dans l’Antiquité un carrefour important de cultures, et que le peuple d’Italie du Nord concerné, celui des Raeti, partagerait une origine commune avec les Etrusques.

Mais une objection pouvait être formulée : ces bœufs auraient pu être importés, et non accompagner une migration. L’examen de l’ADN humain a permis de confirmer les premiers résultats. L’ADN de deux populations toscanes sur trois est bien plus proche de celui de populations d’Anatolie et du Moyen-Orient que de celles d’autres populations italiennes actuelles. Pour les auteurs, l’affaire est entendue : ce sont bien des peuples originaires de Méditerranée orientale qui se sont établis en Italie pour fonder le royaume d’Etrurie, accompagnés de leurs races de bœufs. Les données archéologiques placent le début de cette civilisation à l’âge du Bronze terminal, du XII^e au X^e siècle avant Jésus-Christ. La migration a peut-être été causée par les tremblements de terre documentés en Méditerranée orientale durant la même période. Ainsi, les relations des auteurs anciens, dont certains vivaient à l’époque des Etrusques (Hérodote et Thucydide, notamment, vécurent au V^e siècle avant Jésus-Christ), prouvent qu’elles n’étaient pas tout à fait sans fondement.

• (1) M. Pellecchia et coll : « The mystery of Etruscan origins : novel clues from Bos taurus mitochondrial DNA », Proceedings of the Royal Society, vol. 274, n° 1614, mai 2007, pp. 1175-1179.