Les croyances et les valeurs sont les deux piliers sur lesquels chacun bâtit son « monde »

Fin d’après-midi à la clinique. Aymeric est en salle de chirurgie, s’apprêtant à transférer au chenil un chien opéré. Son associée, Catherine, passe devant lui et tombe en arrêt devant la poubelle.

- « Qu’est-ce qu’il m’agace ! Regarde-moi ça, quel gâchis !

- Qu’est-ce que j’ai fait ?

- Pas toi, Jean-Bertrand. La poubelle déborde de morceaux d’Elastoplaste® non utilisés.

- Il faudrait le lui dire.

- Tu sais bien qu’à chaque fois que je discute avec lui, la situation se transforme en pugilat.

- Il faut reconnaître que de ton côté, tu es très “bouts de ficelle”.

- Vous êtes tous pareils ! Vous jetez l’argent par les fenêtres et après, vous rechignez pour acheter un échographe performant. Je suis la seule à me préoccuper de garder le bateau à flot. Quand il coulera, ne venez surtout pas vous plaindre !

- Je voulais juste relativiser un peu. »

La porte claque.

Après avoir exploré celui de Jean-Bertrand⁽¹⁾, Aymeric découvre le monde de Catherine. Il sait qu’elle est appréciée des clients pour sa rigueur, son sérieux et son investissement, mais ces qualités en font une associée et une manager perçue comme intransigeante.

Chacun est unique dans son interprétation du monde

Chaque individu, qui résulte d’un mélange de personnalité, d’expérience, d’éducation et d’une façon d’interpréter le monde, est unique. L’adulte est celui qui a la responsabilité de la gestion de sa vie, de sa famille et de son environnement. Pour cela, il s’appuie sur des références puissantes pour reconnaître ce qui est bon ou pas et faire ses choix. Les croyances et les valeurs sont deux des piliers de ce système⁽²⁾.

• Une valeur est un standard qui permet d’évaluer son expérience. C’est ce qui est important pour chacun et constitue le fondement de la motivation. Ainsi, le dialogue entre Aymeric et Catherine fait apparaître l’importance que cette dernière attache à la bonne gestion de l’argent, la solidarité, l’équipe et la qualité du travail.

• Une croyance est ce que chacun croit vrai à propos de lui et du monde. Elle se crée à partir de la généralisation d’une expérience. Elle comprend également les préjugés, qui consistent à prévoir, sans aucun fondement, le comportement ou les pensées d’un individu. Par exemple, Catherine développe la croyance que personne ne veut progresser (« (…) vous rechignez pour acquérir un échographe performant ») et que toutes les discussions avec Jean-Bertrand se terminent en pugilat.

Les valeurs et les croyances étant des bastions de la personnalité de chacun, quiconque y touche fait exploser une bombe dont l’effet est immédiat (regard “qui tue”, colère, porte qui claque) ou, parfois, différé (vengeance froide).

Seuls l’expérience et le temps permettent de modifier une valeur ou une croyance

A partir de ces principes, Aymeric peut traiter l’apparition (brutale) de la valeur “gestion raisonnée de son argent” chez Catherine en quatre étapes.

• Etre conscient que chacun a une carte du monde différente de la sienne et comprendre que cela peut être agaçant d’y être confronté.

• Comprendre qu’une valeur ou une croyance ne peut être changée par l’affrontement. Elle se remodèle avec le temps, au gré de nouvelles expériences. Parfois, “faire l’expérience” avec son interlocuteur (par exemple de l’emploi d’antalgiques en phase peropératoire) permet aussi de faire évoluer une croyance. Le coaching favorise également un tel changement.

• Respecter les valeurs et les croyances de l’autre et les accepter.

• Confronter ses propres valeurs et croyances à celles de l’autre : sont-elles compatibles ? Dans notre exemple, les valeurs de Catherine sont utiles à la clinique et il pourrait être judicieux de s’appuyer dessus plutôt que de se focaliser sur la façon dont elles sont exprimées. En cas d’incompatibilité, la séparation à court ou moyen terme est probable.

• Lorsque les valeurs et les croyances sont compatibles, dialoguer pour trouver un terrain d’entente. Ainsi, Aymeric aurait pu répondre : « Catherine, je respecte tes valeurs et peut-être en effet que [énoncé des valeurs]. Il serait utile que nous puissions mieux les partager pour améliorer le fonctionnement, sans que cela dégénère à chaque fois que nous discutons. »

Il peut aussi être utile d’inviter les membres d’une équipe à entamer un dialogue autour des valeurs de chacun. Un bon savoir-faire relationnel est indispensable.

• (1) Voir La Semaine Vétérinaire n° 1271 du 26/5/2006 en page 60.

• (2) La PNL en perspective, Monique Esser, Editions Labor.