Les entéropathies ne sont pas toutes des lymphangiectasies - La Semaine Vétérinaire n° 1288 du 26/10/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1288 du 26/10/2007

Gastro-entérologie chez le chien

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Gwenaël Outters

La lymphangiectasie, caractérisée par un dysfonctionnement des vaisseaux lymphatiques intestinaux, est l’une des formes de l’entéropathie exsudative.

Les entéropathies exsudatives sont des affections digestives qui résultent d’une perte de l’intégrité pariétale ou d’une hypertension lymphatique. Les maladies pariétales peuvent être d’ordre inflammatoire (gastrites, entérites virales ou allergiques, entérites lymphoplasmocytaires, prolifération bactérienne, parasitisme intestinal massif, intolérance au gluten, intussusception, sub-occlusion, toxines, médicaments) ou ulcératif (gastrite, jéjuno-iléite ou colite ulcérative, lymphome). La maladie des cryptes est aussi une cause importante d’entéropathie exsudative sans lymphangiectasie. Son étiopathogénie reste méconnue, mais pourrait faire intervenir des germes, tels que E. coli, responsables de lésions de nécrose des cryptes. La réaction inflammatoire est auto-entretenue par des perturbations immunitaires locales. Dans certains cas, le pronostic est sombre, alors qu’une entéropathie exsudative secondaire à un épisode sévère de maladie inflammatoire chronique intestinale peut être parfaitement réversible.

Une lymphangiectasie peut être soit acquise, soit d’origine congénitale

Les lymphangiectasies acquises se caractérisent par un défaut de drainage lymphatique intestinal. Les causes les plus fréquemment décrites sont une obstruction de nature inflammatoire ou tumorale du réseau lymphatique interne, une obstruction lymphatique périphérique d’origine inflammatoire (hypertension lymphatique, insuffisance cardiaque droite, néoplasie, péricardite) ou une lymphangite granulomateuse.

Les lymphangiectasies peuvent être d’origine congénitale. Dans ce cas, le réseau lymphatique est incomplet. Le pronostic est particulièrement sombre. Les chiens de races rottweiler, yorkshire terrier, basenji, soft coated wheaton terrier sont les plus touchés. La maladie apparaît entre l’âge de six mois et de deux ans. Une dysplasie lymphatique, qui pourrait décompenser tardivement, est suspectée. Celle-ci se révèle à la faveur d’un épisode digestif inflammatoire ou d’une prolifération bactérienne intestinale.

Lors d’entéropathie exsudative, une diarrhée, le plus souvent de l’intestin grêle, parfois intermittente, voire absente, des vomissements, un mauvais état général, de l’ascite, un œdème des parties déclives, un épanchement pleural, de la dyspnée sont des éléments possibles du tableau clinique. Le diagnostic consiste à prouver que la fuite protéique est d’origine digestive. En effet, une panhypoprotéinémie peut résulter de fuites digestives, mais également d’un défaut de synthèse lors d’insuffisance hépatique sévère, de pertes sanguines, d’un apport insuffisant ou de pertes urinaires lors de glomérulopathie.

L’examen échographique permet la recherche de lésions pariétales fortement évocatrices, d’une adénopathie abdominale ou d’un épanchement. Lorsque peu de signes directs sont identifiés, il convient de rechercher des symptômes indirects associés.

La fibroscopie digestive, complémentaire de l’échographie, permet le diagnostic de toutes les entéropathies non focales, associées ou non à une lymphangiectasie. Cet examen est toutefois limité aux parties hautes et basses du tube digestif et ne permet le diagnostic que des lésions diffuses.

Le diagnostic de certitude fait appel à l’examen anatomopathologique

La laparotomie permet la mise en évidence de lésions isolées, de lipogranulomes et la réalisation des biopsies transpariétales. Les risques de déhiscence de suture – liés à l’hypoprotéinémie – doivent être évalués avant la chirurgie. Le diagnostic de certitude n’est confirmé que par les résultats de l’examen anatomopathologique des biopsies de l’intestin.

Les proliférations bactériennes de l’intestin grêle correspondent à un déséquilibre de la microflore. Les bactéries anaérobies, dominantes, provoquent une altération de la bordure en brosse et majorent les lésions inflammatoires.

L’hypoprotéinémie perturbe également le turn over cellulaire et renforce l’atrophie des villosités intestinales. Chez un jeune chien, les problèmes digestifs chroniques peuvent entraîner des lésions irréversibles de la bordure en brosse et une malassimilation à vie. Dans ce cas, l’échographie abdominale et l’endoscopie sont encore complémentaires. Par exemple, la présence de chyme adhérent à la muqueuse intestinale est un signe d’hypomotilité intestinale.

Les proliférations bactériennes chez l’adulte sont souvent associées à des maladies digestives intercurrentes. Fréquemment, elles sont le premier signe d’existence d’une tumeur intestinale, avant que celle-ci ne soit palpable. Les troubles de la motilité intestinale provoqués par la tumeur sont responsables de cette prolifération bactérienne.

Une prise en charge thérapeutique des entéropathies exsudatives

Dans la mesure du possible, le traitement est étiologique. Le pronostic est corrélé à l’affection qui génère cette fuite protéique. Il est impossible de suppléer un réseau lymphatique déficient ou inexistant. Les mesures diététiques sont primordiales et visent à augmenter l’apport en protéines et à diminuer l’apport lipidique.

Des aliments hyperdigestibles ou hypoallergéniques sont distribués. La frontière entre les deux est infime, puisqu’un aliment hypoallergénique est hyperdigestible.

La prednisolone est prescrite à la dose de 0,5 mg/kg matin et soir, voire plus en phase d’induction. La prescription de budésonide (Entorcort®) permet une libération de corticoïdes au niveau colique uniquement, mais les résultats cliniques sont inconstants.

Le métronidazole est préconisé à la dose de 15 mg/kg matin et soir. Il possède un effet immunomodulateur intéressant. Il est possible d’y associer des adjuvants locaux (Actapulgite®) et des acides gras. Lors de prolifération bactérienne primitive chez le jeune chien, la thérapeutique inclut une antibiothérapie prolongée sur plus de six semaines, accompagnée de mesures diététiques et de corticoïdes permettant d’entraver la réponse immunitaire inflammatoire. L’amoxicilline est à déconseiller. Elle peut provoquer une perturbation de la microflore intestinale. En effet, chez le jeune animal, le tube digestif renferme de nombreuses clostridies (C. difficile ou C. perfringens) à l’état de spores. L’utilisation de l’amoxicilline risque d’entraîner une desporulation à l’origine d’une colite hémorragique dramatique. L’enrofloxacine ou la marbofloxacine ont montré leur efficacité, notamment sur certaines souches d’E. coli (maladie des cryptes).

Le recours aux immunosuppresseurs azathioprine (Imurel®) est parfois indispensable.

Le dosage régulier de la protéinémie et de l’albuminémie sont de bons indices pronostiques, de même que la reprise pondérale. Le pronostic des entéropathies exsudatives reste variable. L’animal qui répond favorablement au traitement devra suivre un régime alimentaire strict à vie. Les risques de récidive ne sont pas négligeables.

La lymphangiectasie est la cause la plus fréquente d’entéropathie avec perte de protéines chez le chien. Cependant, des entérites exsudatives par prolifération bactérienne primitive sont aussi décrites chez de jeunes animaux.

CONFÉRENCIERS

Valérie Freiche, consultante en gastro-entérologie, membre du Gemi.

Patrick Lecoindre, Diplomate ECVIM CA, membre de la Société française d’endoscopie digestive, ancien président du Gemi.

Article réalisé d’après la conférence « Travaux dirigés interactifs : examens complémentaires en gastro-entérologie », présentée lors du Congrès Afvac à Bordeaux en 2006.

Formations e-Learning

Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »

En savoir plus

Boutique

L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire

Agenda des formations

Calendrier des formations pour les vétérinaires et auxiliaires vétérinaires

Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.

En savoir plus


Inscrivez-vous gratuitement à nos Newsletters

Recevez tous les jours nos actualités, comme plus de 170 000 acteurs du monde vétérinaire.

Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire

Retrouvez-nous sur