Le cheval d’endurance présente des particularités en pathologie locomotrice - La Semaine Vétérinaire n° 1322 du 04/07/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1322 du 04/07/2008

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Auteur(s) : Gwenola Touzot-Jourde

Fonctions : Ross University, School of Veterinary Medicine, Basseterre (Etats-Unis). Article réalisé d’après la conférence de Christophe Pelissier : « Les troubles locomoteurs du cheval d’endurance » présentée lors des journées annuelles de l’Avef organisées à Deauville (Calvados), du 18 au 20 octobre 2007.

De l’effort spécifique demandé par cette discipline équestre découle plusieurs dominantes pathologiques (affections ostéo-articulaires, tendineuses, musculaires, traumatiques).

L’endurance de haut niveau est un sport qui présente des particularités uniques : la longue durée de l’effort ; le terrain sur lequel le cheval court, différent d’une course à l’autre et varié au cours d’une même épreuve ; la vitesse élevée des courses, surtout lors de l’étape finale, alors que la fatigue musculaire s’est installée ; l’équitation de base classique, mais qui vise avant tout à obtenir une attitude décontractée du cheval. De cet effort spécifique découle des troubles ostéo-articulaires et tendineux liés à la grande répétition des mouvements et des ondes de choc, des affections musculaires dues à une fatigue excessive ou à un entraînement et à une alimentation inappropriés, et des affections traumatiques du pied.

L’articulation métacarpo-phalangienne est la plus sollicitée chez le cheval d’endurance

La sollicitation particulière de cette articulation dans l’effort d’endurance et la dégénérescence qui s’ensuit s’expliquent par la combinaison de plusieurs facteurs : la durée de l’effort, la répétition du geste, le fort débattement de l’articulation, l’hyperextension de l’articulation due au relâchement et à la décontraction musculaires recherchés, l’importance des sections de course sur terrain goudronné ou de mauvaise qualité et une ferrure lourde (fer, plaque et silicone) comprenant des cônes pour l’adhérence, mais avec le désavantage de bloquer le pied au sol. Ainsi, la pathologie de l’articulation métacarpo-phalangienne comprend des synovites post-effort, fréquentes, souvent bilatérales (les articulations métatarso-phalangiennes sont aussi touchées), qui apparaissent le soir ou le lendemain de l’épreuve et rétrocèdent sans traitement en quelques jours, mais qui témoignent d’une souffrance (inflammation) articulaire ; la dégénérescence articulaire, véritable “maladie professionnelle” du cheval d’endurance, qui se manifeste par des synovites, des remaniements périarticulaires et des ostéophytes, presque toujours présents sur les clichés radiographiques des chevaux de plus de dix ans et qui ont plusieurs saisons de course à leur actif ; les sésamoïdites, observées classiquement chez les chevaux de haut niveau et de gravité variable. Si seule une modification de la densité osseuse est présente, le pronostic est bon, sous réserve d’appliquer les modifications nécessaires. Le remaniement des sésamoïdes, associé à un défaut majeur d’aplomb et à une desmite d’une branche du suspenseur, ne bénéficie pas d’un bon pronostic. Il convient donc de vérifier les insertions distales du suspenseur. La charge de travail et la ferrure sont en général à revoir.

L’arthrose se rencontre aussi dans les articulations métatarso-phalangiennes et intertarsiennes et est diversement tolérée. Elle n’entraîne pas forcément de boiterie, mais peut être à l’origine de myosite à répétition par compensation.

Le cheval d’endurance est prédisposé aux affections tendineuses

L’augmentation de la vitesse de course, la recherche du relâchement musculaire, la fatigue qui entraîne un déficit proprioceptif, des appuis asymétriques sur des terrains irréguliers, des dérapages sur terrains glissants, des coups directs sur les tendons et le port prolongé des protections sont autant de facteurs qui augmentent les contraintes sur les tendons.

La tendinite du fléchisseur superficiel est la plus fréquente. La conformation du pur-sang arabe (tendon court avec du talon) est un facteur prédisposant. Elle est parfois traumatique (coup, blessure due aux protections). Le pronostic sportif est plutôt bon comparé à d’autres disciplines, avec en général le retour à un niveau de performance équivalent.

La ténosynovite de la gaine digitale est assez fréquente et bénéficie d’un bon pronostic si l’échographie ne montre pas d’autre anomalie ni d’épaississement de la gaine. Les tendinites du fléchisseur profond sont rares.

La desmite du muscle interosseux III est de plus en plus souvent observée, plus particulièrement chez les chevaux de haut niveau et dans la phase finale de l’entraînement. L’usage des plaques lors du galop semble y prédisposer, en raison du compactage de sable en partie postérieure du pied lors de la phase propulsive qui provoque une élévation artificielle des talons. L’enthésopathie proximale est la plus généralement rencontrée et révèle parfois un état de surentraînement. Le cavalier rapporte souvent avoir eu un doute sur les allures du cheval depuis quelques semaines.

La desmite du tiers moyen du muscle interosseux III est liée à la présence de suros, rétrocède avec le repos et disparaît une fois le suros enlevé. La desmite des branches est souvent liée à un défaut d’aplomb et se présente sous une forme chronique, avec épaississement de la branche et sésamoïdite. Les récidives sont fréquentes si le cheval est maintenu au même niveau, mais pas forcément à un niveau inférieur.

Les appuis irréguliers et le terrain dur augmentent les contraintes infligées aux articulations interphalangiennes qui peuvent être à l’origine de boiteries éliminatoires disparaissant rapidement. Il convient de vérifier le parage avec un cliché radiographique de face à l’appui sur cale (appui bipodal). La présence de lésions de dégénérescence articulaire installées assombrit le pronostic.

La rhabdomyolyse d’effort est en général associée à une erreur alimentaire

Les troubles d’origine musculaire rencontrés chez le cheval d’endurance peuvent se limiter à une dorsalgie localisée, liée à un harnachement inadéquat, au lest sous la selle ou à un tapis sale et mouillé, ou être plus graves comme les crampes musculaires ou myosites des fessiers, le psoas, semi-membraneux et semi-tendineux, ou encore la rhabdomyolyse d’effort.

La myosite localisée à un membre postérieur constitue la première cause d’élimination pour boiterie postérieure et est souvent le reflet d’un défaut d’entraînement ou d’un problème d’équitation, tel que le galop sur le même pied ou le trot sur une seule diagonale. Les chevaux ne montrent pas toujours de signes cliniques à l’arrivée au contrôle, mais plutôt lors du réexamen après un temps de repos. Parfois subclinique, cette affection se présente sous la forme d’une déformation de la fesse et d’une myoglobinurie, sans défaut d’allure éliminatoire selon les termes du règlement.

La myosite généralisée d’effort survient en début de travail, lors de la première étape, et est généralement associée à des erreurs alimentaires grossières telles qu’un changement de régime au cours des semaines qui précèdent la course ou une augmentation de la ration avant l’épreuve.

La fourbure menace les chevaux éliminés sur des critères métaboliques

La fourbure se met en place dans les vingt-quatre à trente-six heures qui suivent l’arrêt de l’effort, mais peut mettre jusqu’à une semaine avant de se déclarer cliniquement. La prise en charge doit être précoce. Toute détection tardive assombrit le pronostic. Il est utile de conseiller au cavalier de faire systématiquement trotter son cheval sur un terrain dur durant la semaine qui suit l’épreuve pour détecter un éventuel inconfort. Les temps de transport longs sont indéniablement un facteur prédisposant aux fourbures retardées.

Le diagnostic différentiel de la fourbure chez le cheval d’endurance inclut les polysynovites qui sont d’apparition brutale, associées à une vive douleur, parfois suivies de fourbure dans les douze heures, et la dermatite du paturon liée à l’humidité, au sable et au port de protections. Le cheval piétine, change d’appui comme lors de fourbure. Une pression dans le creux du paturon suscite une douleur exquise.

Les autres affections du pied sont souvent traumatiques. Les contusions, comme les bleimes et les hématomes solaires, sont moins présentes en endurance que pressenties, en raison du port fréquent de plaques et de silicone, ainsi que d’une faible incidence de chevaux aux pieds plats. Les hématomes de la paroi surviennent en fin de course, voire durant le sprint final. L’affection est d’autant plus fréquente que la course est rapide et disputée. Elle est douloureuse avec une symptomatologie qui peut mimer une fracture de phalange et nécessite l’avulsion de la paroi pour soulager la douleur. Le diagnostic n’est pas toujours aisé et requiert souvent de multiples incidences radiographiques. L’hyperostose palmaire est courante chez les chevaux d’endurance élevés en terrain dur et rocailleux, mais ne provoque que rarement une boiterie. Si une douleur au niveau du talon est présente, une ferrure mixte Combi-pad ou un fer demi-lune soulage le cheval.

La professionnalisation de l’endurance est à l’origine d’une augmentation de l’effort du cheval et des contraintes subies. Elle est responsable de l’apparition d’affections prépondérantes. La prédominance des lésions tendineuses est l’expression de l’augmentation des vitesses de course et de la modification des techniques d’entraînement.

VOIR AUSSI

• C. Langlois : « Epidémiologie des troubles métaboliques chez les chevaux d’endurance », Pratique vétérinaire équine, 2008, n° 157.

• G. Touzot-Jourde : « Le bilan sanguin des chevaux d’endurance s’inscrit dans le suivi médico-sportif », La Semaine Vétérinaire n° 1300 du 1/2/2008.

• G. Touzot-Jourde : « Le travail du cheval d’endurance passe par le contrôle de l’hyperactivité émotionnelle », La Semaine Vétérinaire n° 1301 du 8/2/2008.

• G. Touzot-Jourde : « La ferrure du cheval d’endurance nécessite des spécificités parfois difficiles à combiner », La Semaine Vétérinaire n° 1312 du 25/4/2008.

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