Le sélénium dans l’alimentation des brebis a des effets bénéfiques sur les agneaux

Le sélénium, souvent associé à la vitamine E, est connu pour son rôle antioxydant et son action cytosolique (alors qu’elle est membranaire pour la vitamine E). Chez les bovins, un apport correct en sélénium diminuerait les risques d’endométrite et de rétention placentaire, ainsi que les difficultés liées aux chaleurs silencieuses. Cependant, ce bénéfice est parfois difficile à quantifier, car la plupart des études établissent une comparaison entre des animaux qui reçoivent des compléments et d’autres qui présentent une carence avérée. La pauvreté de certains sols est confirmée dans de nombreuses régions. Généralement, les carences observées sont subcliniques et se manifestent par des pertes de production et une plus grande sensibilité aux maladies. Désormais, le sélénium entre systématiquement dans la composition des aliments industriels des ruminants. Il est néanmoins parfois conseillé d’augmenter les apports.

Une carence en sélénium peut simuler une carence en iode

Dans le domaine de la reproduction, l’intérêt du sélénium s’explique par sa présence dans certaines enzymes, notamment celles du métabolisme thyroïdien comme la glutathion peroxydase et la déiodase. L’enzyme qui permet la transformation de l’hormone T4 en T3 est sélénodépendante. Une carence a donc pour effet de réduire cette mutation. Les conséquences cliniques sont alors comparables à celles d’une carence en iode.

Le sélénium est transféré de la mère au fœtus par voie transplacentaire puis, après la mise bas, par le lait. Une étude⁽¹⁾ irlandaise réalisée chez quatre-vingt-deux brebis multipares de plus de trois ans s’intéresse aux domaines qui peuvent être améliorés par l’ajout d’un complément sélénique organique dans l’alimentation des brebis, autour de la lutte et durant les deux premiers tiers de la gestation, qui sont des moments clés pour la fertilité et la prolificité des brebis et les performances des produits.

Le comportement des agneaux varie aussi lors de carence

La comparaison entre un groupe témoin avec une alimentation normale, sans autre apport de sélénium, et un groupe complémenté avec 0,5 mg de sélénium organique par brebis et par jour jusqu’au deuxième jour après l’agnelage est réalisée à partir de mesures quantitatives de l’activité enzymatique de la glutathion peroxydase, du taux de sélénium sanguin prélevé à intervalle régulier tout au long de la gestation jusqu’à la mise bas. A l’agnelage sont notés la taille et le poids de la portée, la difficulté d’agnelage, la présentation normale ou anormale de l’agneau. Le statut immunitaire, ainsi que les taux de sélénium, de triiodothyrinone et de thyroxine des agneaux sont relevés à l’âge de vingt-quatre heures, de six semaines et au sevrage. La pesée de chaque agneau est réalisée à un jour, à trois et à six semaines, puis à intervalle régulier jusqu’au sevrage. Des données comportementales concernant les agneaux et les brebis dans les premières heures après l’agnelage sont aussi prises en compte. Du côté des femelles sont notés les attitudes maternelles (contacts, léchage), l’aide apportée aux agneaux pour qu’ils tètent et le nombre de fois où elles mangent ou boivent. Pour leur part, les agneaux sont observés dès la naissance. Leur façon de lever la tête et de la bouger, les efforts fournis pour se lever jusqu’au moment où ils tiennent debout, les tentatives pour se nourrir jusqu’à la première tétée effective, leur capacité à s’agenouiller, ainsi que la fréquence et la durée des vocalises sont relevés.

Les résultats montrent que le sélénium n’a pas d’effet à long terme sur la brebis. Il n’existe pas de système de fixation et de relargage, et les concentrations diminuent en quelques jours en cas d’arrêt de la supplémentation. L’administration plus importante de sélénium durant les deux premiers tiers de la gestation n’a pas d’effet sur les performances des brebis : la fertilité, la prolificité et le nombre d’agneaux vivants au sevrage sont comparables. En revanche, G.H. Scales montre que lorsque des brebis mérinos disposent quotidiennement de 5 mg de sélénium par voie orale durant vingt jours avant la lutte, le taux de brebis vides est réduit de 17 % au cinquante-cinquième jour de la gestation. Dans ce cas toutefois, les agneaux nés vivants sont moins nombreux, en raison de la hausse des difficultés lors de l’agnelage.

Le statut immunitaire des agneaux nés de mères alimentées avec plus de sélénium, caractérisé par la quantité d’IgG, est bien meilleur. Ils sont plus actifs dès la naissance et plus vigoureux. Le taux de mortalité, plus faible à la naissance, est cependant comparable au moment du sevrage. Pourtant, les agneaux dont les mères ont le meilleur statut en sélénium sont statistiquement plus lourds au sevrage (2 kg supplémentaires en moyenne), avec une croissance meilleure, ce qui présente donc un réel intérêt pour les éleveurs.

• (1) C. Munoz, A.F. Carson, M.A. McCoy, L.E.R. Dawson, N.E. O’Connell et A.W. Gordon : « Nutritional status of adult ewes during early and midpregnancy. Effects of supplementation with selenised yeast on ewe reproduction and offspring performance to weaning », Animal, 2008, vol. 2, n° 1, pp. 64-72.