« La plupart des troubles comportementaux canins reposent sur un milieu inadapté » - La Semaine Vétérinaire n° 1328 du 26/09/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1328 du 26/09/2008

Entretien avec Thierry Bedossa, praticien à Neuilly (Hauts-de-Seine)

Actualité

Auteur(s) : Marine Neveux

La Semaine Vétérinaire : Deux écoles sur le comportement canin s’affrontent au sein de la profession vétérinaire. Quelles sont les différences d’approche entre elles et pourquoi chacune ne peut admettre les fondements de l’autre ?

Thierry Bedossa : En préambule, je dois avoir l’honnêteté de vous indiquer que je suis un partisan déclaré de la deuxième école, à mes yeux beaucoup plus respectueuse de la condition animale et soucieuse de la bien-traitance de nos animaux de compagnie.

Ce que l’on appelle « l’école française du comportement ou zoopsychiatrie » repose sur un postulat, qui est celui de la psychopathologie. Les zoopsychiatres considèrent qu’ils ont affaire à des affections comportementales qu’ils classent en syndromes, à l’identique de la psychiatrie humaine moderne, modèle de la zoopsychiatrie, avec son Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders ou DSM).

Pour les zoopsychiatres, la pathologie comportementale est systématiquement associée à un trouble biologique et organique, d’où la prescription fréquente de molécules psychotropes, voire la tendance récente à privilégier le recours à des molécules plus “douces”, dénuées d’effets secondaires indésirables (sédation, altération des capacités cognitives). Je ne suis peut-être pas le plus qualifié pour parler des fondements de cette école, car ceux-ci me sont complètement hermétiques !

S. V.: Cette approche est-elle la même dans les autres pays ?

T. B. : Dans le reste du monde, ce qui n’est pas rien, la majeure partie des affections comportementales des chiens de compagnie sont considérées comme des « troubles », des « comportements gênants » ou « inappropriés ». Les vétérinaires qui s’y intéressent particulièrement parlent éventuellement de « médecine vétérinaire du comportement » et considèrent que l’immense majorité des troubles comportementaux ne reposent pas sur des mécanismes psycho-pathologiques, mais simplement adaptatifs, dans un environnement qui, lui, est inadapté. En France, nos textbooks parlent tous de « pathologie comportementale » (aucun n’a jamais été traduit en anglais, qui est la langue internationale des scientifiques). Ailleurs, ils s’appellent plus humblement Canine behaviour : a guide for veterinarians ou encore Small animal behavourial medicine. Cette approche, beaucoup plus globale, accorde une place importante à la connaissance de la biologie du comportement du chien : son évolution, sa domestication, sa sélection raciale artificielle, sa cognition. Cette connaissance fine permet dès lors de comprendre que ce qui pose problème et aboutit aux « comportements gênants » des chiens de compagnie est quasi systématiquement un milieu inadapté, une relation défaillante avec l’homme et/ou les congénères, des apprentissages et des expériences précoces de mauvaise qualité.

S. V.: Quels sont les acteurs de cette école ?

T. B. : Dans cette approche, les vétérinaires cliniciens sont loin d’être les seuls à posséder une expertise. Il faut une collaboration pluridisciplinaire entre tous les acteurs du comportement, qu’il s’agisse de scientifiques (comme les vétérinaires, les éthologues, les éco-anthropologues, les biologistes, les spécialistes de la cognition animale, des neurosciences) ou d’acteurs de terrain (tels que les éleveurs, les éducateurs, les utilisateurs, les dresseurs ou les comportementalistes). Il convient d’accorder une attention particulière aux “comportementalistes” non vétérinaires, car ceux-ci prêtent une attention spécifique à celui ou à celle qui est de l’autre côté de la laisse, c’est-à-dire l’homme. Il est d’ailleurs surprenant qu’aujourd’hui, les plus grands spécialistes de la cognition du chien se tournent aussi vers cette spécificité du chien de compagnie dans leurs protocoles de recherche : des capacités sociales – ou de familiarisation, diront certains éthologues intransigeants et rigoureux sur la terminologie – et adaptatives extraordinaires et uniques dans le règne animal envers l’homme !

Comme vous l’aurez donc compris, selon cette école, la solution aux troubles du comportement provient de modifications du milieu et du mode de vie du chien, d’un travail sur la relation avec le ou les propriétaires, de nombreux nouveaux apprentissages, et d’un travail sur l’état émotionnel de l’animal (ce qui fait qu’il est aussi possible d’avoir recours à certaines molécules, mais d’une façon beaucoup moins systématique et fréquente).

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