Un professionnel libéral peut-il céder sa clientèle ? - La Semaine Vétérinaire n° 1336 du 21/11/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1336 du 21/11/2008

Contrat de cession d’un fonds libéral

Gestion

QUESTIONS/RÉPONSES

Auteur(s) : Sophie Czuwak

La cession de la clientèle civile a longtemps été illicite. Cette illicéité sera contournée par la possibilité de conclure une convention portant sur la présentation de clientèle.

1 QU'EST-CE QUE LA CLIENTÈLE CIVILE ?

Elle se définit comme l’ensemble des personnes qui utilisent, de manière habituelle, les prestations offertes par un professionnel exerçant à titre libéral. La clientèle civile se distingue donc de la clientèle commerciale par la nature de l’offre recherchée. Concrètement, elle s’évalue en considération du nombre de personnes qui s’adressent, de façon récurrente, au même professionnel, pendant une durée significative.

Au XIXe siècle, les tribunaux considèrent qu’un professionnel qui exerce en libéral (vétérinaire, médecin, expert-comptable) ne peut valablement céder sa clientèle, pour plusieurs raisons. La première a trait au lien souvent étroit entre le client et le professionnel, qui repose essentiellement sur une relation de confiance. Déterminer par contrat que ce lien perdurera avec le nouveau professionnel revient, en réalité, à rendre impossible l’exécution de son obligation par le vendeur : il ne peut transmettre une relation de confiance, celle-ci ne peut que se créer et non pas se céder. Une seconde raison, postérieure à la première, considère que la clientèle ne fait pas partie du commerce, car elle est exclusivement composée de personnes. Or une personne humaine ne peut pas être l’objet d’un contrat. En conséquence, la clientèle ne peut être l’objet d’un contrat.

Pour contourner la prohibition de la cession directe de clientèle posée par les tribunaux, il a toutefois été admis que des professionnels pouvaient conclure une convention ayant pour objet la présentation de la clientèle. L’idée est qu’un libéral peut s’engager à présenter son successeur à ses “anciens” clients. Il n’est donc plus question de transférer une relation de confiance, mais d’agir pour qu’une nouvelle relation de confiance se crée, cette fois avec le successeur du cédant.

2 QUELLES SONT LES CONDITIONS DE VALIDITÉ D'UNE CESSION DE CLIENTÈLE CIVILE ?

Dans la mesure où la différence de nature entre une présentation et une cession de clientèle est minime, la jurisprudence a fini par admettre la validité des contrats de cession de clientèle civile. Elle a opéré ce revirement par un arrêt en date du 7 novembre 2000, rendu par l’une des chambres civiles de la Cour de cassation : « Si la cession de clientèle médicale, à l’occasion de la constitution ou de la cession d’un fonds libéral d’exercice de la profession, n’est pas illicite, c’est à la condition que soit sauvegardée la liberté de choix des patients. »

Cette solution jurisprudentielle s’applique donc aussi aux cessions de clientèles civiles entre vétérinaires.

Pour qu’elle soit valide, il faut que la cession de clientèle intervienne dans le cadre d’une création ou pour assurer la continuité d’un fonds libéral. En outre, la liberté de choix du client doit être sauvegardée. La question du respect de cette deuxième condition se pose le plus souvent dans les cas de cession partielle de clientèle : le professionnel vendeur qui cède une partie de sa clientèle continue d’exercer dans les mêmes locaux. La liberté du client ne peut être préservée que lorsqu’il n’y a pas d’entrave au libre choix du praticien, l’ancien ou le nouveau.

3 QUELLES SONT LES OBLIGATIONS DU VENDEUR ET DE L'ACHETEUR ?

Dans le contrat de cession de clientèle, le cédant s’engage, en premier lieu, à présenter son successeur à sa clientèle : en pratique, il remet ses fichiers et documents concernant ses clients. En second lieu, il transmet le droit au bail du cabinet. Cette transmission implique également celle du mobilier et du matériel nécessaire à l’exercice de l’activité. Le cas échéant, le cédant peut s’engager par une clause de non-concurrence, moyennant une indemnité versée par l’acheteur.

De son côté, l’acheteur doit, en contrepartie des obligations du vendeur, payer le prix convenu. Il indemnise le cédant si celui-ci s’est engagé par une clause de non-concurrence. C’est à lui que revient de procéder à l’enregistrement de l’acte de cession auprès des services des impôts, dans un délai maximal d’un mois à compter de la signature de l’acte.

4 QUEL EST LE MONTANT DES DROITS D'ENREGISTREMENT ?

La cession d’une clientèle civile est soumise au paiement de droits (taxes fiscale, départementale et communale). Le taux global varie selon le montant du prix stipulé dans l’acte de cession. Il s’élève à 0 % pour la fraction du prix inférieure à 23 000 €, à 3 % pour la fraction du prix comprise entre 23 000 et 200 000 € et à 5 % pour la fraction du prix supérieure à 200 000 €.

Depuis le 6 août dernier, lorsque la clientèle civile est reprise par un salarié du vendeur (titulaire d’un contrat de travail à durée indéterminée depuis au moins deux ans) ou par un membre de sa famille (conjoint, partenaire, ascendant, descendant en ligne directe, frère et sœur), celui-ci bénéficie d’un abattement de 300 000 € pour le calcul des droits de mutation. Il convient toutefois que l’acheteur poursuive l’activité cédée pendant au moins cinq ans à compter du jour de la vente.

CONSEIL PRATIQUE

• Conclure un contrat. Il est indispensable que la cession de clientèle soit organisée dans un contrat. Il doit prévoir précisément la transmission des éléments composant et constituant le cabinet : mobilier, matériel informatique et technique, documents dont liste des clients, droit au bail, etc. La transmission de ces éléments a lieu le jour de la signature. Le cessionnaire reprend donc les obligations du cédant (paiement du bail, des taxes ou charges) à partir de ce jour.

Questions fréquentes

• La clause de non-concurrence est-elle encore applicable après une nouvelle cession de la clientèle ? Lorsqu’un professionnel libéral a cédé son fonds, il a pu s’engager par une clause de non-concurrence en contrepartie d’une indemnité versée par le cessionnaire. Cette clause s’applique pour une durée déterminée. Si le cessionnaire cède lui aussi sa clientèle alors que la clause de non-concurrence joue encore, celle-ci sera transmise avec les éléments qui composent le fonds : le vendeur initial restera engagé vis-à-vis du second acheteur.

• Mon époux doit-il également participer à l’acte de cession (ou d’acquisition) d’une clientèle civile ? La clientèle civile constitue un bien commun lorsque les époux sont mariés sous le régime de la communauté légale. Le conjoint doit donc donner son consentement à la cession, lequel se concrétisera, dans le contrat, par la mention du conjoint. Si le cédant est lié par un pacte civil de solidarité à un partenaire, celui-ci doit aussi consentir à la cession, sauf si les parts ne sont pas indivises. De même, le cessionnaire doit informer son conjoint lors de l’acquisition de la clientèle s’ils sont placés sous le régime légal. Le conjoint peut revendiquer la qualité d’associé ou y renoncer.

S. C.
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