Etude rétrospective sur les hémorragies péripartum chez la jument
Formation continue
ÉQUIDÉS
Auteur(s) : Isabelle Desjardins
Le diagnostic est difficile, en raison notamment de l’absence de symptômes spécifiques.
Les facteurs de risque des hémorragies péripartum (HPP) sont mal connus. Les juments multipares et qui ont connu une dystocie seraient davantage concernées. Pour vérifier cette hypothèse et déterminer quels éléments favorisent leur survenue, Carolyn Arnold et ses collaborateurs(1) ont étudié rétrospectivement 73 cas chez des poulinières admises en soins intensifs dans une clinique de Lexington (Etats-Unis) entre 1998 et 2005. Les juments retenues ont présenté un saignement dans les soixante jours précédant ou suivant le part, et un le diagnostic d’hémorragie péripartum a été confirmé par échographie, paracentèse abdominale ou autopsie. Les pur-sang sont surreprésentés, avec soixante-huit juments sur soixante-treize. L’âge moyen est de quatorze ans (cinq à vingt-quatre). La plupart des poulinières sont multipares (91 %). 86 % des juments ont saigné en phase post-partum, au lieu de 14 % en prépartum. Seulement 19 % des poulinières (n = 14) avec une hémorragie post-partum avaient eu une mise bas dystocique. La prévalence de l’hémorragie péripartum ne semble pas plus importante lors de maladie intercurrente pendant la gestation, car cinq juments sur soixante-treize (6,8 %) ont souffert précédemment de fourbure, de placentite, de prolapsus utérin, ou de colite. Le taux de récurrence des hémorragies péripartum est faible, puisque 5 % seulement des juments ont déjà présenté ce trouble.
Le principal motif de consultation chez les juments qui ont développé une hémorragie péripartum est une douleur abdominale (63 %), une hémorragie vaginale (11 %), des signes de choc cardio-vasculaire (7 %), de l’ataxie (5 %). Lors de l’admission, 10,9 % des juments sont présentées en décubitus. Des muqueuses pâles sont observées pour l’ensemble des cas, avec un temps de recoloration capillaire moyen de 3 s. La fréquence cardiaque moyenne au moment de l’admission s’élève à 60 bpm.
L’examen hématologique de l’admission, réalisé chez cinquante juments, ne révèle aucune anomalie de la lignée blanche dans la plupart des cas. L’hématocrite moyen à l’admission est normal (38,4 %). Pendant l’hospitalisation, une anémie est détectable chez la plupart des juments, avec un hématocrite moyen de 21,2 %. 38 % des cas présentent une leucopénie.
Chez 97,3 % des juments, le site lésionnel est identifié par échographie transrectale ou transabdominale. Un hématome à l’intérieur du ligament large est visible, de dimension variable. Chez les chevaux à hémopéritoine, l’épaisseur moyenne de liquide abdominal est de 5 cm. Le liquide est toujours anéchogène et d’apparence homogène. Chez 87 % des juments, de légères turbulences du liquide péritonéal sont présentes, résultat du mouvement respiratoire et/ou de l’hémorragie active.
Une paracentèse abdominale est réalisée chez 26 % des juments touchées par une hémorragie péripartum. L’hémoabdomen peut être confirmé macroscopiquement chez dix poulinières sur dix-neuf. Parmi les neuf juments qui restent, un examen cytologique met globalement en évidence la présence abondante d’érythrocytes, de leucocytes et de protéines totales. Sur les dix liquides péritonéaux soumis en culture, deux (20 %) sont positifs (Escherichia coli ou bactéries multiples).
Le traitement entrepris chez les soixante-treize juments vise à restaurer le volume circulant, à réguler l’hémostase, à réduire les effets de l’endotoxémie potentielle. Des antibiotiques et des analgésiques sont aussi administrés(2).
Le temps moyen d’hospitalisation s’élève à cinq jours. 84 % des juments survivent, 16 % meurent naturellement ou sont euthanasiées.
79 % des poulinières qui survivent présentent des complications pendant l’hospitalisation. La présence d’une tachycardie persistante et une hémorragie vaginale sont significativement corrélées au taux de mortalité.
Parmi les cinquante-trois juments qui bénéficient d’un suivi par la suite, vingt-six (49 %) engendrent au moins un autre poulain après l’épisode. Sur les onze autopsiées, des signes de rupture de l’artère utérine sont décelés dans 73 % des cas, des artères surrénale, iliaque externe ou vaginale chez les autres.
Cette étude indique que l’hémorragie péripartum peut se développer chez les poulinières, quels que soient leur âge et leur rang de gestation. L’établissement du diagnostic est difficile, car les signes cliniques ne sont pas spécifiques, l’apparition des anomalies sanguines est retardée et l’examen échographique abdominal n’est pas toujours concluant. Or une détection tardive de l’affection assombrit le pronostic vital. Les procédures diagnostiques potentiellement invasives comme la palpation transrectale et la paracentèse abdominale ne se sont pas soldées par une aggravation des saignements. Il est possible que cette étude ne reflète pas exactement la pratique sur le terrain, dans la mesure où les cas très peu sévères et très sévères n’ont pu être référés et transportés.
(1) C.E. Arnold, M. Payne, J.A. Thompson, N.M. Slovis, F.T. Bain : « Periparturient hemorrhage in mares : 73 cases », Javma, 2008, vol. 232, n° 9, pp. 1345-1351.
(2) Le détail des traitements administrés peut être consulté sur Wk-Vet.fr, rubriques “Semaine Vétérinaire”, puis “Compléments d’articles”.
Les hémorragies péripartum (HPP) constituent une cause non négligeable de morbidité et de mortalité chez la jument reproductrice, puisqu’elles représentent 40 % des causes de mortalité maternelle autour du part. 2 à 3 % des poulinières seraient concernées.
En général, les saignements surviennent dans les quarante-huit heures qui suivent le part, mais des cas prépartum sont rapportés. Les saignements proviennent de l’artère utérine le plus souvent, parfois de l’artère ovarienne, iliaque externe ou vaginale. Soit l’hémorragie est contenue dans le ligament large, entraînant la formation d’un hématome, soit un hémoabdomen se constitue.
Les signes cliniques sont relativement frustes (léthargie, douleur abdominale, muqueuses pâles, tachycardie). L’établissement du diagnostic est délicat, car certaines procédures comme la palpation transrectale peuvent aggraver les saignements.
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