La situation des intervenants conditionne l’évaluation - La Semaine Vétérinaire n° 1349 du 27/02/2009
La Semaine Vétérinaire n° 1349 du 27/02/2009

Législation. Chiens catégorisés et mordeurs

Actualité

Auteur(s) : Christian Diaz

La visite comportementale des chiens, inscrite dans l’article L.211-14-1 du Code rural, suscite encore de nombreuses interrogations de la part des praticiens.

La clarification de la visite comportementale des chiens mordeurs et catégorisés nécessite de préciser la situation des différents intervenants. Parmi eux figurent le chien et son propriétaire ou détenteur, ainsi que le maire, aux côtés des intervenants vétérinaires(1).

Un chien, trois possibilités

Elément indispensable du dispositif, il est le sujet de l’évaluation. Trois cas de figure sont envisageables.

• Le chien présente un danger pour les personnes ou les animaux domestiques, selon le maire. Conformément aux dispositions de l’article L.211-14-1 du Code rural, le maire peut alors demander la réalisation d’une évaluation comportementale par un vétérinaire. Elle a pour but de lui permettre de prescrire des mesures de nature à prévenir le danger. Il peut notamment imposer au détenteur de l’animal de suivre la formation pour l’attestation d’aptitude à la détention des chiens dangereux.

Cette demande peut concerner tous les chiens, quel que soit leur type ou leur race. De plus, la procédure peut être engagée vis-à-vis des chiens susceptibles de présenter un danger pour les personnes, mais aussi de ceux qui font courir un risque potentiel aux animaux domestiques (article L.211-11), comme un chien “tueur de chats” qui agresse ses congénères ou exerce ses talents de prédation sur des volailles du voisinage.

En cas de non-exécution des mesures prescrites, le maire a le pouvoir d’ordonner le placement du chien dans un lieu de dépôt adapté. A l’issue de huit jours, si elles n’ont pas été mises en œuvre, il peut prescrire l’euthanasie de l’animal ou décider de le confier à un refuge, après l’avis d’un praticien désigné par le directeur des services vétérinaires.

• L’animal relève d’une des catégories de chiens dits dangereux au sens de l’article L.211-12 du Code rural. Ce dernier dispose qu’une évaluation comportementale est nécessaire, indépendamment de toute considération liée à un danger éventuel pour les personnes ou les animaux domestiques. Elle doit avoir lieu entre l’âge de huit et douze mois.

La loi du 20 juin 2008 précise que, pour les animaux en circulation à la date de sa publication, le délai de réalisation de l’évaluation est de six mois pour les chiens de première catégorie et de dix-huit mois pour ceux de deuxième catégorie. Pour ces animaux, les dates limites d’évaluation sont donc le 21 décembre 2008 pour la première catégorie et le 21 décembre 2009 la deuxième catégorie.

En raison de la carence d’information à destination du public et des élus de la part des services de l’administration – et même si nul n’est censé ignorer la loi – cette procédure n’a été mise en œuvre que sur une échelle limitée.

Si un certain nombre (faible) de possesseurs de chiens de première catégorie en circulation le 20 juin 2008 ont satisfait à l’obligation, l’évaluation systématique des chiens de huit à douze mois des deux catégories n’est pas encore entrée en application dans les faits.

La loi du 20 juin 2008 a supprimé (via la nouvelle rédaction de l’article L.211-14) l’obligation de déclarer en mairie les chiens des deux catégories, pour la remplacer par le permis de détention… que personne ne peut encore demander, étant donné l’absence de publication des décrets concernant l’attestation d’aptitude des détenteurs de chiens. Cela ne facilite pas l’information du public par les municipalités.

Une circulaire administrative précise que la déclaration en mairie reste en vigueur tant que le permis de détention ne peut être délivré, mais comme tout document de ce type, ses destinataires sont les membres de l’administration. En aucun cas elle n’est opposable aux détenteurs des chiens concernés.

Aujourd’hui, un grand nombre de chiens sont d’ores et déjà hors la loi.

• Le chien a mordu une personne. L’article L.211-14-2 du Code rural dispose que « tout fait de morsure d’un chien sur une personne » doit être déclaré à la mairie de résidence du propriétaire ou du détenteur. En outre, ce dernier doit soumettre son animal à l’évaluation comportementale pendant le délai de mise sous surveillance sanitaire prévu à l’article L.223-10 du Code rural, c’est-à-dire dans les quinze jours qui suivent la morsure.

Tout chien est concerné, indépendamment de sa race ou de son type, et quelle que soit sa taille. Ainsi, un bichon présidentiel est censé avoir récemment fait l’objet de ces mesures…

Le texte évoque un « fait de morsure d’un chien sur une personne ». Ainsi, il ne vise pas les chiens qui ont mordu, même à mort, un animal domestique (contrairement à l’article L.211-11).

Alors que la mise sous surveillance sanitaire concerne les carnivores qui ont mordu ou griffé une personne, l’évaluation ne s’adresse qu’aux chiens qui ont mordu, pas à ceux qui se sont uniquement rendus coupables de griffures.

Détenteur ne signifie pas propriétaire

Bien que ce cas ne soit pas le plus fréquent, le détenteur et le propriétaire peuvent être deux personnes distinctes. Cette distinction est d’autant plus délicate que, selon l’article 2 276 du Code civil, « en matière de meuble, possession vaut titre ». De plus, et il s’agit là d’une précision jurisprudentielle, la carte d’identification n’est pas un titre de propriété, mais une simple présomption de celle-ci.

Ce cas de figure se produit, par exemple, lorsque le détenteur ne peut détenir légalement un chien. Il s’agit notamment des mineurs, des majeurs sous tutelle (qui n’ont pas obtenu l’autorisation du juge des tutelles), des personnes condamnées à certaines peines inscrites au casier judiciaire (l’interdiction de détention vaut alors pour les chiens des deux catégories) ou des personnes auxquelles la garde d’un chien a été retirée selon les dispositions du Code rural. L’individu frappé d’incapacité pourra être le propriétaire du chien, mais le détenteur “officiel” sera alors une autre personne, généralement un proche.

La plupart des textes traitent du « détenteur ou du propriétaire », notamment celui qui impose un permis de détention. L’article L.211-14-1 précise cependant que les frais de l’évaluation sont à la charge du propriétaire (et non du détenteur) et l’arrêté du 10 septembre 2007 stipule que le vétérinaire chargé de réaliser l’évaluation comportementale est choisi par le détenteur (et non le propriétaire) du chien.

Le maire, pierre angulaire du dispositif

Officier de police judiciaire, le maire est l’agent de l’Etat au centre du dispositif de l’évaluation.

C’est lui qui la prescrit, conformément aux dispositions de l’article L.211-14-1 du Code rural. En raison des lectures divergentes, la jurisprudence devra vraisemblablement trancher sur la validité des évaluations effectuées sans demande préalable du maire. Selon l’administration, cette dernière n’est pas obligatoire pour celles des chiens de première et de deuxième catégories et celles des chiens mordeurs. D’autres estiment qu’il s’agit d’un préalable à toutes les évaluations qui font référence à l’article L.211-14-1, en raison des premiers mots de ce dernier(2). Cette position semble confirmée par l’arrêté du 10 septembre 2007 qui dispose que « lorsqu’un maire décide de faire procéder à l’évaluation comportementale d’un chien, le vétérinaire qui procède à cette évaluation est choisi par le détenteur de l’animal parmi les vétérinaires inscrits sur la liste du département où il est domicilié ».

En l’absence de demande, il est donc aussi légitime de s’interroger sur cette liste de référence, voire sur les modalités du choix du praticien.

Le maire est par ailleurs le destinataire des évaluations dont il fait la demande.

Dans le cadre de la visite comportementale des chiens de première et de deuxième catégories en dehors de tout contexte de danger, les textes n’imposent pas aux confrères évaluateurs de communiquer le rapport à une personne autre que le détenteur ou le propriétaire. Une telle communication pourrait même relever de la rupture du secret professionnel. En revanche, l’arti-cle L.211-14-2 prévoit explicitement la transmission au maire des rapports d’évaluation relatifs aux chiens mordeurs.

Au final, le maire a cinq options :

– si l’évaluation concerne une demande de permis de détention, il peut, selon le résultat, en refuser la délivrance. Cela sera probablement toujours le cas quand le chien sera classé dans le dernier, voire les deux derniers niveaux de risque (l’absence de permis entraîne une forte probabilité d’abattage du chien) ;

– si l’évaluation est un préalable à la prescription de mesures visant à prévenir le danger, il est chargé de mettre en œuvre les recommandations du vétérinaire évaluateur ;

– concernant les chiens mordeurs, il peut en outre imposer aux détenteurs de suivre la formation pour l’obtention de l’attestation d’aptitude prévue pour les possesseurs de chiens dangereux ;

– si le chien est classé à un niveau de « danger grave et immédiat », il peut demander le placement de l’animal dans un lieu de dépôt en vue de son euthanasie, après l’avis d’un praticien désigné par les services vétérinaires ;

– enfin, il a la charge de prescrire une nouvelle évaluation, de sa propre initiative ou en suivant les préconisations du rapport d’évaluation.

  • (1) Le rôle des vétérinaires et des services vétérinaires fera l’objet d’un article dans le prochain numéro.

  • (2) « Une évaluation comportementale peut être demandée par le maire pour tout chien qu’il désigne en application de l’article L.211-11. Cette évaluation est effectuée par un vétérinaire choisi sur une liste départementale (…). »

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