Le prérinçage des couteaux à 40 °C pendant une seconde améliore leur décontamination

Dans beaucoup de pays à travers le monde, il est recommandé d’immerger brièvement les couteaux de découpe dans de l’eau chaude à une température d’au moins 82 °C pour les décontaminer. Cette consigne semble résulter de pratiques usuelles plutôt que de critères scientifiques dûment établis. Cependant, la plupart des législations autorisent des procédures alternatives si elles sont au moins aussi efficaces, bien qu’il n’existe pas de consensus sur le niveau de réduction bactérienne atteint. En France, la Direction générale de l’alimentation (DGAL) précise le protocole de validation d’une technique de nettoyage et de désinfection des outils. Il prévoit de réaliser vingt prélèvements sur ces derniers et d’exprimer les résultats de comptage bactériologique en UFC/cm² de surface contrôlée. Après le nettoyage et la désinfection, 90 % des échantillons prélevés doivent montrer moins de 10 UFC/cm².

Pour E. coli, sans prérinçage, le temps d’immersion est déterminant

Une étude australienne⁽²⁾ a cherché à évaluer l’effet de plusieurs combinaisons de température (de 60 à 82 °C) et de temps d’immersion (d’une à soixante secondes) sur la désinfection de couteaux artificiellement contaminés avec une souche d’Escherichia coli et de Listeria monocytogenes. Cinq niveaux de température (60, 65, 70, 75, 80 et 82 °C) et six temps d’immersion (une, cinq, dix, vingt, trente, quarante-cinq et soixante secondes) sont utilisés. Pour chaque couple température/temps, des comptages bactériologiques sont effectués à trois reprises avec ou sans prérinçage préalable à 40 °C pendant une seconde.

Sans prérinçage, le temps d’immersion semble un facteur déterminant de l’efficacité de la décontamination vis-à-vis d’E. coli. Une immersion d’une seconde à 82 °C réduit la population bactérienne de 2 log. Pour toutes les températures, accroître le temps d’immersion d’une à cinq secondes diminue significativement le comptage de bactéries. De 70 à 80 °C, les comptages sont similaires à ceux d’une brève immersion (une seconde) à 82 °C, à condition toutefois d’atteindre un temps d’immersion d’au moins dix secondes. Pour une efficacité comparable à 65 °C, le temps d’immersion doit être d’au moins vingt secondes. Quant à l’efficacité à 60 °C, elle reste toujours inférieure à ceux d’une brève immersion à 82 °C quel que soit le temps d’immersion.

Avec un prérinçage (à 40 °C pendant une seconde), les comptages sont significativement moins élevés que sans prérinçage. Cette opération tend à gommer les différences d’efficacité. Par exemple, aucune distinction significative n’est notée lorsque la température excède 70 °C et que le temps d’immersion est supérieur à cinq secondes.

Les Listeria sont plus résistants à la chaleur qu’E. coli

Vis-à-vis de L. monocytogenes, sans prérinçage et quelle que soit la température, l’immersion pendant une seconde ne réduit pas la population bactérienne. Au-delà de 70 °C, accroître le temps d’immersion d’une à cinq secondes diminue significativement le comptage de bactéries. De 70 à 80 °C, les comptages obtenus sont similaires à ceux d’une immersion à 82 °C pendant cinq secondes, à condition toutefois d’atteindre un temps d’immersion d’au moins dix secondes. Pour une efficacité comparable à 65 °C, ce temps doit être de quarante-cinq secondes au minimum. Une nouvelle fois, l’efficacité à 60 °C, quel que soit le temps d’immersion, reste toujours inférieure à celle obtenue avec la plus brève immersion efficace (cinq secondes) à 82 °C.

Avec un prérinçage, les comptages sont également significativement moins élevés que sans prérinçage. Lorsque le temps d’immersion dépasse dix secondes, une réduction plus importante de la population bactérienne est obtenue lorsque la température excède 70 °C.

Les résultats de cette étude montrent que des combinaisons autres que la brève immersion à 82 °C peuvent décontaminer les outils de découpe. Cependant, il est important de tenir compte de ce qu’il est possible de faire en pratique. Ainsi, des temps d’immersion de quarante-cinq ou soixante secondes ne sont pas envisageables à l’abattoir. Ces résultats démontrent par ailleurs l’efficacité du prérinçage à 40 °C pendant une seconde. Les différences observées entre les deux bactéries s’expliquent par la plus grande résistance des Listeria à la chaleur par rapport à E. coli.

• (1) Note de service DGAL/SDSSA/N2003-8066 du 14/4/2003.

• (2) R.M. Goulter, G.A. Dykes et A. Small : « Decontamination of knives used in the meat industry : effect of different water temperature and treatment time combinations on the reduction of bacterial numbers on knife surfaces », Journal of Food Protection, 2008, n° 7, vol. 71, pp. 1338-1342.