Relations avec la clientèle
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Auteur(s) : Philippe Zeltman
Le dialogue et la transparence peuvent épargner au vétérinaire fautif les désagréments d'une poursuite judiciaire intentée par un client mécontent.
Oublier une compresse dans une plaie chirurgicale, entraîner un fibrosarcome à la suite d'une injection vaccinale, prescrire le mauvais médicament ou un dosage excessif, etc. L'erreur médicale, qu'elle soit due au praticien ou à son personnel, entraîne un sentiment de honte, de désespoir et de vulnérabilité. Au pire, l'erreur peut entraîner la mort de l'animal. Le propriétaire peut alors répondre par une plainte ou un procès. Mettre en place un protocole afin de gérer une erreur médicale peut permettre d'éviter une action légale, de regagner la confiance du client ou, au moins, de “limiter les dégâts”.
De nombreuses plaintes surviennent en raison d'espoirs déraisonnables de la part du client, plutôt que d'une réelle faute professionnelle. De là provient l'importance d'expliquer clairement et honnêtement les risques d'une intervention, les effets secondaires des médicaments ou la gravité du diagnostic. Alors seulement le client pourra donner son consentement éclairé. Certaines complications sont parfaitement décrites : les extrasystoles ventriculaires consécutives à une splénectomie, une embolie pulmonaire après une intervention chirurgicale chez un animal atteint d'hyperadrénocorticisme, des lésions rénales à la suite de l'utilisation d'un antibiotique néphrotoxique. D'autres sont « la faute à pas de chance ». C'est le cas du rottweiler qui attaque les barreaux de sa cage et se fracture la mâchoire. Ou encore celui du dogue allemand hospitalisé qui développe une dilatation-torsion de l'estomac.
Selon une étude britannique, près de 80 % des jeunes praticiens fraîchement émoulus de l'école estiment avoir commis une erreur médicale. Il s'agit le plus souvent de l'omission d'un test diagnostique, d'un faux pas chirurgical ou de l'administration du mauvais médicament. Au final, l'erreur n'est pas abordée avec le client dans 40 % des cas.
En médecine humaine, les patients et leur famille s'attendent à ce que le médecin réponde à plusieurs questions lors d'une erreur médicale. Comment est-ce arrivé ? Quelles sont les conséquences médicales à court, moyen et long termes ? Quelles sont les solutions ? Comment une erreur va-t-elle être évitée à l'avenir ? Autrement dit, comment quelque chose de positif peut découler de cette erreur En outre, ils s'attendent à recevoir des excuses en règle. Partant de ces constatations, les auteurs proposent un protocole en dix points afin d'« expliquer l'inexplicable » aux propriétaires d'animaux(1).
Lors d'erreur médicale, la première responsabilité du vétérinaire est de s'occuper de l'animal ou de référer le cas si besoin. Le coût de ces soins est généralement absorbé par le praticien.
Si le praticien succombe à la crainte d'un procès, il risque de déformer les faits présentés au client. A l'opposé, il risque de céder à l'autocritique alors que tout a été fait dans les règles de l'art. Il faut donc garder la tête froide, prendre du recul, voire discuter du cas avec un confrère.
Il convient, dans la mesure du possible, d'essayer de comprendre ce qui s'est passé. Le vétérinaire peut demander au client de lui accorder un peu de temps afin de réunir les informations nécessaires.
Il s'agit de répondre aux questions suivantes : quelle est la meilleure explication possible de ce qui s'est produit ? Quelle solution me satisferait si j'étais à la place du client ? Il peut être utile d'avoir cette conversation en présence d'une tierce personne particulièrement douée en communication et en médiation.
Que ce soit en personne ou au téléphone, l'environnement devrait être calme, sans distractions et sans interruptions. La conversation pourrait commencer par : « J'ai une nouvelle difficile à partager avec vous. Je suis désolé de vous informer que… »
Les circonstances de l'erreur sont ensuite décrites aussi objectivement que possible. Selon la réaction du client, le praticien peut interrompre la discussion en demandant : « Souhaitez-vous que je continue ou préférez-vous faire une petite pause ? »
Au cours de la discussion, il est bon de susciter les réactions du client. La difficulté consiste à ne pas se mettre sur la défensive même si son interlocuteur exprime de la colère ou profère des accusations.
Il existe deux types d'excuse. Celle de compréhension : « Je suis navré que cela soit arrivé à votre animal. » Et celle de responsabilité : « Je suis désolé que notre erreur ait entraîné de telles complications pour votre animal. »
La plupart du temps, des solutions ont déjà été mises en place pour prendre soin de l'animal, mais il se peut que le client ne le sache pas encore. Il convient donc d'expliquer les solutions mises en œuvre dans l'immédiat, ainsi qu'à l'avenir, si des conséquences ultérieures sont envisagées.
Le praticien doit accepter ses responsabilités en aidant l'animal et le client autant que possible. Il est utile de prendre contact avec son assureur en responsabilité civile afin de discuter de la prise en charge financière des soins actuels et à venir.
Une erreur médicale est grave en elle-même. Mais elle serait encore pire si des moyens n'étaient pas mis en œuvre pour éviter une situation équivalente à l'avenir. Il convient donc d'assurer aux clients que le praticien a appris une leçon qui profitera à d'autres animaux. Le vétérinaire pourrait donc dire : « Nous allons avoir une réunion [du personnel, avec les autres praticiens, avec les auxiliaires] afin de discuter de ce qui s'est passé. Nous voulons nous assurer que plus jamais une telle erreur ne se reproduira. »
Selon la situation, plusieurs discussions pourront être nécessaires afin de parvenir à une solution satisfaisante pour l'ensemble des parties concernées. Reconnaître et détailler une erreur médicale est un exercice difficile. L'expérience montre, selon l'adage, que « faute avouée est à moitié pardonnée ». Ainsi, même si une action judiciaire et une plainte ordinale s'ensuivent, les exigences, les émotions et les demandes de réparation tendront à être moins extravagantes.
La stratégie exposée peut être discutée avec l'assureur en responsabilité civile, puis au cours d'une réunion du personnel, afin de se préparer à une telle éventualité. Il est clair que les erreurs médicales n'arrivent pas qu'aux autres…
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