Santé publique. Nouveau virus influenza
Actualité
Auteur(s) : Nathalie Devos
Selon l'épidémiologiste Antoine Flahault, elle pourrait évoluer vers une pandémie semblable à celle de 1968.
Même si la médiatique grippe A/H1N1 humaine ne fait plus systématiquement la une des journaux, elle continue d'alimenter les débats. Chaque jour, les compteurs de cas humains confirmés et de pays touchés augmentent. A l'heure où nous mettons sous presse, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) comptabilise plus de 5 250 cas confirmés à travers le monde (dans une trentaine de pays) et 61 décès, dont 56 au Mexique et 3 aux Etats-Unis(1). En dehors du continent américain, où la circulation communautaire du nouveau virus influenza H1N1 est qualifiée d'active, aucune victime n'est signalée et la quasi-totalité des infections sont des cas importés. Seuls l'Espagne et le Royaume-Uni, qui enregistrent le plus grand nombre de cas en Europe (dont certains secondaires à un cas importé), font l'objet d'une attention particulière de l'OMS. Si elle en venait à les considérer comme des foyers secondaires d'infection (après la zone nord-américaine), cela entraînerait le déclenchement de la phase 6 de son plan pandémique.
Face à la nouvelle grippe, l'OMS maintient la pression pour que la vigilance ne baisse pas. Alarmisme exagéré ou réel danger ? La communauté scientifique est divisée. Le taux de mortalité des personnes grippées au Mexique peut en effet interpeller. Au tout début de l'épidémie, il s'élevait à près de 10 % d'après les chiffres annoncés par les autorités mexicaines. Il a été revu à la baisse, mais reste toutefois estimé à 3 % dans ce pays, selon les données officielles de l'OMS (soit autant que lors de la pandémie de grippe espagnole de 1918 qui a causé de 20 à 100 millions de morts dans le monde, suivant les évaluations). Pourquoi ce taux est-il si élevé au Mexique, alors qu'il n'est que de 0,1 % environ aux Etats-Unis (une valeur similaire à celle engendrée par une grippe saisonnière) ? Le nombre de personnes contaminées est certainement sous-estimé (ce qui ferait baisser le taux de mortalité). Par ailleurs, aucun décès n'est à déplorer dans les autres pays. Certains scientifiques soulignent en outre que, contrairement à la situation outre-Atlantique, les cas de transmission secondaire signalés ailleurs dans le monde restent limités.
Le professeur Antoine Flahault, spécialiste de l'épidémiologie des maladies transmissibles et directeur de l'Ecole des hautes études en santé publique (EHESP) de Rennes, estime que « nous sommes déjà en pandémie, car l'épidémie n'est pas restée confinée dans le pays où elle a émergé ». Dans un entretien au quotidien Le Monde, il explique les évolutions de l'actuelle épidémie telles qu'il les envisage. Le premier scénario rappelle le cas du syndrome respiratoire aigu sévère (Sras), en 2003 : une épidémie qui s'évanouit sans revenir.« Il n'est pas à exclure, mais l'épidémie de Sras a été “bruyante” sur le plan clinique. Aucune forme asymptomatique n'était notée, contrairement à ce qui est observé aujourd'hui avec le nouveau virus H1N1, d'où certainement une sous-estimation du nombre de cas. Cela rend par ailleurs illusoire un contrôle étanche aux frontières », estime-t-il. Le spécialiste ne croit pas au scénario de type “grippe espagnole de 1918”, en raison du taux de mortalité par rapport au nombre de cas de contamination. En outre, il rappelle que cette pandémie date d'une époque “prémoderne” en termes médicaux : absence d'antiviraux, infrastructures sanitaires sans commune mesure avec celles qui existent aujourd'hui.
Pour Antoine Flahault, le scénario le plus plausible se rapprocherait de celui de la pandémie de 1968 (la “grippe de Hong Kong”), c'est-à-dire l'équivalent d'une grosse grippe saisonnière. Elle toucherait ainsi 35 % de la population, soit environ 20 millions de cas en France et entre 20 000 et 30 000 décès. Une telle situation dans les pays développés pourrait coexister avec un scénario plus proche de la pandémie de 1918 dans les pays pauvres. Selon cette hypothèse, le pic serait observé « après l'été ».
En effet, si les virus grippaux se font rares dans l'hémisphère Nord durant cette saison, ils prolifèrent en zone tropicale, avant de revenir en novembre et en décembre dans nos contrées, explique l'épidémiologiste.
L'OMS devra bientôt choisir entre deux options : faire entrer le virus H1N1 de souche nord-américaine dans le vaccin “habituel” de la grippe saisonnière (qui inclut deux souches de type A et une souche de type B) ou faire produire un vaccin dirigé uniquement contre le nouveau virus H1N1. Pour Antoine Flahault, elle optera probablement pour un vaccin pandémique. « Le nouveau virus est ultracompétitif et chassera tous les autres. » Quoi qu'il en soit, le choix risque d'être difficile, car nul ne peut prédire l'avenir avec certitude. Si le virus de la grippe A/H1N1 reste peu virulent et que le nombre de nouveaux cas diminue, l'absence de vaccin contre les souches saisonnières pourra alors faire plus de mal que prévu. Et la fabrication des deux types de vaccins n'est pas envisageable, en raison de la limitation des capacités de production des industriels.
(1) Le nombre de cas et de décès est quotidiennement actualisé sur le site de l'OMS (www.who.int).
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