Pour près de deux vétérinaires sur trois, la grippe A/H1N1 a inquiété trop rapidement

La grippe “normale” emporte chaque année deux mille personnes en France. Pour la grippe A/H1N1, les données font état de quatre-vingts morts pour plusieurs centaines de millions de personnes potentiellement concernées… » Ce commentaire d’un vétonaute reflète parfaitement l’opinion des praticiens : on s’est alarmé trop vite. Notre sondage a été réalisé la semaine du 1^er au 8 mai, quelques jours après le début de l’alerte et alors que les analyses concernant le premier cas français étaient lancées. Aujourd’hui, quinze cas sont officiellement déclarés en France, et sept mille cinq cents dans le monde.

Force est de constater que nous sommes bien loin des inquiétudes soulevées par ce nouveau virus lors de sa découverte. Les autorités sanitaires – et les médias qui les relaient – promettaient le pire. Début mai, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) annonçait un risque de contamination pour la moitié de la population mondiale et prévoyait l’imminence du passage de son plan pandémique à la phase 6 (pandémie déclarée). La France lançait une grande campagne de prévention, les Samu étaient mis en alerte et des mesures de contrôle étaient prises, consistant notamment à faire atterrir dans une zone particulière de Roissy tous les avions en provenance du Mexique. Mais pschitt ! En quelques semaines, la peur est retombée. Le virus s’est révélé moins agressif que prévu et ne s’est étendu que marginalement. En a-t-on trop fait ? Interrogée, la ministre de la Santé ne veut pas entrer dans le débat, répétant que « la cellule interministérielle a fait son travail » et que son rôle « est de mettre tout en œuvre pour que l’épidémie ne s’étende pas ». De son côté, la directrice de l’OMS, Margaret Chan, préfère « qu’il y ait un excès de préparation plutôt que l’inverse ». Sans doute.

Le principe de précaution, poussé à l’extrême, avait de quoi inquiéter. Mais comme les vétonautes, 60,9 % des Français, interrogés mi-mai par l’institut Louis Harris, sont “peu ou pas” inquiets de l’évolution de l’épidémie. Si la menace semble s’éloigner avec l’arrivée de l’été dans l’hémisphère Nord, les experts redoutent la diffusion du virus dans les pays moins développés et son retour chez nous à l’automne, dans une version plus virulente. Ils craignent une résistance du virus aux antiviraux, d’après les signes de résistance au Tamiflu® de la grippe saisonnière constatés l’an dernier. L’épidémiologiste Antoine Flahaut évoquait récemment un pic d’épidémie « après l’été ». « Il pourrait y avoir trente mille décès en France », annonce-t-il. Oracle ou oiseau de mauvais augure ? Cette forte alerte permet en tout cas d’habituer les esprits à l’idée qu’une pandémie est désormais plus que probable dans un délai très court.