L'explosion de la souche A au Moyen-Orient inquiète les spécialistes

Depuis la terrible épizootie de fièvre aphteuse qui a frappé le Royaume-Uni en 2001, cette maladie hautement contagieuse des artiodactyles a cessé de faire la “Une” des journaux en Europe. Pourtant, si la plupart des pays de l'Union – dont la France – sont déclarés indemnes de fièvre aphteuse sans vaccination par l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE), plus d'une centaine d'autres sont toujours touchés par ce fléau. Dans de nombreuses parties du globe (voir encadré), la maladie reste endémique, ont rappelé les spécialistes réunis à Asunción, au Paraguay, du 24 au 26 juin. Les experts ont réfléchi aux moyens de parvenir à un contrôle mondial du virus.

Les scientifiques redoutent la vitesse de mutation de la souche A du virus

Depuis le début de l'année, des foyers de fièvre aphteuse ont été répertoriés dans vingt-deux pays, d'Afrique, du Moyen-Orient ou d'Asie du Sud-Est, soit uniquement des régions endémiques. Mais le fait marquant des six derniers mois est sans aucun doute l'explosion des cas de fièvre aphteuse générés par des virus de sérotype A, particulièrement de la sous-souche A-Iran-05, a indiqué Jef Hammond, de l'Institut pour la santé animale de Pirbright (Royaume-Uni), l'un des six laboratoires de référence pour cette maladie. A titre de comparaison, parmi les échantillons analysés à Pirbright au premier trimestre 2009, 112 se sont révélés positifs vis-à-vis du sérotype A, au lieu d'un seul au premier trimestre 2008. Or le type A du virus de la fièvre aphteuse est particulièrement dangereux, car la souche mute vite, ce qui rend difficile la mise à disposition de stocks d'urgence de vaccins adaptés. Pour le sérotype O, une forte hausse est aussi constatée entre les mêmes périodes de 2008 et 2009, mais dans une moindre mesure (91 versus 49).

Faute de maîtrise mondiale, aucun pays n'est à l'abri

Selon Jef Hammond, c'est au Moyen-Orient que la recrudescence du virus A est la plus manifeste. Trop loin pour menacer les exploitations européennes ? Pas si sûr, comme en témoigne l'adoption par la Commission européenne, fin avril à Rome, d'une feuille de route régionale de lutte contre la fièvre aphteuse (EuFMD), en réaction à la grave épidémie moyen-orientale du début d'année. Ce plan vise précisément à empêcher la propagation du virus vers l'Europe et l'Afrique du Nord. En effet, nul ne doit se sentir à l'abri tant que le virus n'est pas maîtrisé partout, ont insisté les experts rassemblés à Asunción, raison pour laquelle la conférence s'intitulait « Vers le contrôle de la maladie à l'échelle mondiale ». Ce contrôle est rendu difficile par l'existence de sept souches du virus, dont chacune requiert une souche vaccinale spécifique pour assurer l'immunité d'un animal vacciné. Or, selon le constat de Jef Hammond, il existe une asymétrie dans les efforts pour identifier les vaccins adaptés dans chaque région touchée. Il a ainsi déploré un manque d'information sur les souches vaccinales efficaces en Afrique.

Il faut donc promouvoir la recherche à l'échelle mondiale, a renchéri David Paton, représentant de l'Alliance mondiale pour la recherche sur la fièvre aphteuse. Pour lui, l'un des objectifs est de mieux comprendre les systèmes de production animale des pays atteints et les dynamiques adoptées par le virus à l'intérieur de ces systèmes.

En termes de diagnostic, des tests efficaces sont désormais disponibles, mais l'accent est à mettre sur l'amélioration qualitative des vaccins. Elle pourrait passer par une meilleure thermostabilité, une plus longue efficacité et une protection plus rapide au démarrage.