L’école vétérinaire de Nantes va devenir l’Oniris

Elle s’appellera donc Oniris, Ecole vétérinaire, agroalimentaire et de l’alimentation Nantes Atlantique. Devant un parterre de quelque trois cents invités (étudiants, enseignants, chercheurs, partenaires, etc.), des représentants de l’Etat, du ministère de tutelle, des collectivités locales et une brochette d’ex-directeurs conviés à la célébration des trente ans de l’école vétérinaire nantaise, Pierre Saï, son actuel directeur, a dévoilé le nom du nouvel établissement qui, le 1^er janvier, naîtra de sa fusion avec l’Ecole nationale d’ingénieurs des techniques des industries agricoles et alimentaires (Enitiaa). Un rapprochement voulu par le ministère de l’Agriculture et de la Pêche dès 2003. La lettre de mission est parvenue à Pierre Saï cinq ans plus tard, en juillet 2008. Le projet “n’attend plus” que la publication des décrets. « Car il ne s’agit pas d’un simple collage, rappelle-t-il, mais de la création d’une grande école – ou d’un institut, la question n’est pas tranchée – au centre de l’alimentation, de la politique alimentaire commune, de la formation des cadres à l’échelon local et européen, et qui doit avoir un rayonnement et une attractivité au niveau international. » L’ambition est là, clairement affirmée. Plus prosaïquement, Jacques Auxiette, président du Conseil régional des Pays-de-la-Loire et président du conseil d’administration de l’ENVN, estime que ce nouvel établissement se révèle déterminant pour le rayonnement de la métropole Nantes-Saint-Nazaire, au même titre que le Technocampus, récemment créé pour les matériaux composites autour d’Airbus, du Cyclotron Arronax, de l’Ecole des mines, de l’Ecole Centrale, de Polytechnique, de l’Icam, etc.

L’Oniris entend multiplier les relations avec le secteur privé

Tout en restant géographiquement implantée sur les deux sites de la Chanterie et de la Géraudière, distants de 3 km, Oniris entend avoir une vision globale de la santé et de l’alimentation. Ces problématiques aborderont inévitablement les questions liées à l’environnement et à la biodiversité. « Nous n’inventerons pas de nouvelles formations, mais les formes actuelles vont évoluer », précise Pierre Saï. Si cette évolution reste à construire, le premier niveau de changement concernera l’apport croisé de modules pour enrichir les processus de formation. Les vétérinaires devraient ainsi bénéficier d’un enseignement “entrepreunarial et managérial” pour acquérir des compétences en matière commerciale, en gestion d’entreprises, en management, etc. Cela répond à une demande forte des confrères, trop souvent démunis face aux considérations économiques du marché. « En France, les diplômés sont d’un bon niveau. Avec Internet, les étudiants cherchent des diplômes où les débouchés existent. Ces nouvelles formations permettront d’aller vers de nouveaux métiers », observe Maryse Hurtrel, adjointe au directeur général de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. A l’inverse, les étudiants de l’Enitiaa compléteront leur formation avec une vision plus médicale de la sécurité alimentaire qui semble également faire défaut.

Le deuxième étage de la fusée concerne le développement du 3^e cycle, des mastères, et la question des formations doctorales, alors que l’ENVN vient d’obtenir une accréditation européenne et qu’elle bénéficie d’une coaccréditation avec l’université de Nantes pour la délivrance de doctorats.

Il s’agit par ailleurs de définir, avec les enseignants et les chercheurs, les caractéristiques et les contours d’un “institut” de l’alimentation au niveau européen. A l’instar des partenariats déjà engagés avec les universités de Nantes, d’Angers, du Mans, l’Inra, l’Inserm, l’Afssa, etc., l’Oniris entend multiplier les relations avec le secteur privé : les industriels de l’agroalimentaire, bien entendu, mais aussi le milieu pharmaceutique et, plus surprenant, le secteur bancaire. Un partenariat serait d’ailleurs en cours de discussion avec le Crédit Agricole.

Pour Yannick Guin, vice-président de Nantes Métropole, ce projet devrait contribuer « à pallier le défaut de notoriété internationale dont souffre Nantes, malgré des atouts dans les cultures marines, les biotechnologies, etc. La métropole, réfléchit d’ailleurs à la création d’un rendez-vous international de l’alimentation ». Rien que cela !

Le rapprochement ne devrait entraîner aucune suppression d’emploi

Humainement, si ce rapprochement créera inévitablement des doublons, aucune réduction d’effectif n’est envisagée. « La question est plutôt d’obtenir des moyens supplémentaires. La tutelle s’est d’ailleurs engagée verbalement à conserver l’ensemble des personnels », indique le futur patron d’Oniris, Pierre Saï. Les quatre projets de fusion déjà lancés sur ce modèle par la Direction générale de l’enseignement supérieur et de la recherche pour lutter contre l’éparpillement des établissements d’enseignement n’auraient engendré aucun licenciement.

« Faites le tour de la planète et vous ne constaterez nulle part l’existence d’une fusion entre une école vétérinaire et une école d’alimentation⁽¹⁾. Vous avez fait ce pari. Alors, allez-y ! Personnellement, je ne l’aurais jamais fait. Je ne suis pas certain que le projet aille au bout, mais vous avez eu raison de le faire », a lancé Guy Riba, directeur général adjoint de l’Inra, lors de la table ronde sur l’évolution de l’enseignement supérieur et de la recherche organisée pour ce 30^e anniversaire. Le lendemain, une conférence dédiée à l’alimentation était ouverte au public.

• (1) Un projet de fusion est également à l’étude entre l’école de Lyon et l’Ecole nationale d’ingénieurs des techniques agricoles de Clermont-Ferrand (ENITACF).