Avec Fort Dodge, Pfizer veut faire de ses clients les partenaires de sa nouvelle company

New company », « partenership ». Le 23 octobre dernier, le nouveau Pfizer a réuni la presse vétérinaire européenne autour de ces mots clés pour un moment « historique » : la naissance d’un laboratoire vétérinaire. En effet, quelques jours auparavant, il faisait officiellement l’acquisition du groupe pharmaceutique Wyeth et de sa filiale vétérinaire Fort Dodge. Ce rachat, annoncé le 26 janvier, a été minutieusement préparé durant ces neuf mois de gestation. La stratégie de Pfizer en santé animale, où il pesait déjà un milliard de dollars sur le marché européen, a été revue de fond en comble à la lumière des apports de Fort Dodge en produits (300 millions de dollars) comme en valeur. Et le nouveau Pfizer, pour la première fois numéro un européen (1,2 milliard de dollars après un désinvestissement évalué à 120 millions), ne sera évidemment pas en 2010 celui des années 80 et de la TLA®, ni celui des années 90 issu du rachat de SmithKline Beecham en 1995, ni même celui des années 2000, qui a absorbé Pharmacia-Upjohn en 2002.

Un nouveau Pfizer est en train de naître. Il englobe non seulement la quasi-totalité du chiffre d’affaires de Fort Dodge, mais aussi certaines de ses valeurs et de ses équipes. Ainsi, si le patron de Pfizer pour l’Europe reste Albert Bourla pour la santé animale, son bras droit, Ugo Cosentino, chargé de la stratégie opérationnelle, est l’ancien directeur de Fort Dodge pour l’Europe. En outre, un tiers des postes de direction, notamment de directeurs de filiales, reviennent à des “anciens” Fort Dodge, le choix étant fondé sur les « compétences », et non sur l’appartenance à l’un ou l’autre laboratoire.

Des complémentarités face à un seul désinvestissement majeur : Stellamune®

Comme à l’accoutumée dans ce type de fusion, les dirigeants s’efforcent de souligner les complémentarités des gammes, plutôt que les doublons. Par exemple, dans la filière avicole, Fort Dodge dispose de l’importante gamme de vaccins Poulvac®, et Pfizer a racheté en 2007 le fabricant Embrex de machines à injection de vaccins in ovo…

De même, pour la filière équine. Pfizer vient de mettre sur le marché les vaccins Equip® qu’il a racheté l’an passé à Schering-Plough, et Fort Dodge, avec sa gamme Duvaxyn®, y ajoute des vaccins contre la rhinopneumonie et celui contre la maladie de West-Nile, en cours de lancement. Il apporte aussi ses gammes de vermifuges Equest® (moxidectine), ainsi que d’analgésiques et de sédatifs Torbugesic® (butorphanol) et Detogesic® (détomidine), l’un des génériques de Domosedan® qui ne fait plus partie de la liste des marques clés du nouveau laboratoire. Dans la même classe des α2agonistes, mais chez les animaux de compagnie, c’est aussi un générique de médétomidine, Dorbene®, qui est préféré à la gamme princeps Domitor®/Dexdomitor®. Le nouveau Pfizer ne s’interdit donc plus de commercialiser des génériques, comme c’était le cas par le passé.

Dans le choix des gammes, les dirigeants disent s’être efforcés de retenir les produits clés davantage sur leur potentiel que sur leur notoriété passée. Ainsi, dans les endectocides, la gamme Cydectine® (moxidectine), sur laquelle Fort Dodge a toujours beaucoup investi en développement de nouvelles formes galéniques, a été préférée à Dectomax® (doramectine), qui n’a pas évolué depuis près de dix ans. Toutefois, pour la France, Dectomax® ne fait pas partie de la liste des produits désinvestis et restera commercialisé par Pfizer. De même, dans la filière porcine, la gamme Suvaxyn®, plus large et avec des vaccins multivalents, est retenue, alors que l’historique Stellamune® monovalent sera désinvesti au profit d’un autre laboratoire. Les désinvestissements, liés à des problèmes de concurrence, ne sont d’ailleurs pas si nombreux pour la France. Les laboratoires repreneurs ne sont pas encore connus. L’innovation reste l’une des valeurs phares, avec le lancement de trois médicaments majeurs cette année : Trocoxil®, un AINS coxib en prise mensuelle ; Improvac®, un vaccin permettant une castration immunologique des porcs ; Naxcel® Bovins, une solution injectable de ceftiofur en une seule injection et avec un délai d’attente nul dans le lait.

Pfizer pense et agit en Europe « au-delà des frontières »

Au-delà des gammes qui couvrent la quasi-totalité des besoins des vétérinaires dans les indications majeures, le nouveau Pfizer souhaite faire de ses clients des partenaires, d’abord en les écoutant, ensuite en « pensant et agissant au-delà des frontières dans une organisation véritablement paneuropéenne », enfin en étant persuadé que la qualité de l’exécution des actions peut faire la différence. Les offres de services complémentaires aux gammes devraient donc se multiplier. L’objectif est, à terme, de faire du nouveau Pfizer le partenaire choisi en premier par les vétérinaires, « the number one choice of veterinary professionals »… alors que se profile dès 2010 la naissance d’un nouveau leader mondial, avec la fusion annoncée d’Intervet et de Merial.

• Un tableau avec des exemples des marques phares du nouveau Pfizer en Europe, ainsi que la liste des produits désinvestis en France est disponible sur WK-Vet.fr (rubriques “Semaine Vétérinaire”, puis “Compléments d’articles”).