La paramphistomose larvaire est considérée comme émergente en France - La Semaine Vétérinaire n° 1385 du 18/12/2009
La Semaine Vétérinaire n° 1385 du 18/12/2009

Parasitologie bovine

Formation continue

RURALE

Auteur(s) : Lorenza Richard

Sous-estimée, elle devrait être systématiquement incluse dans le diagnostic différentiel des entérites aiguës sans fièvre chez les ruminants au pâturage en zone humide.

Aujourd’hui, la paramphistomose (ou plutôt l’amphistomose(1)) larvaire apparaît comme une maladie émergente en France. Plus de cinquante départements sont touchés et sa prévalence est souvent sous-estimée. Notre confrère Jacques Devos, praticien à Panissières (Loire), a présenté un cas de cette infestation à Lyon(2). Deux génisses montbéliardes de huit et dix mois, au pré depuis six semaines, perdent l’appétit, maigrissent beaucoup et présentent une diarrhée aqueuse. Elles sont dans un état de cachexie si avancé que l’une d’elles est référée à l’école de Lyon. Elle meurt pendant le transport. La seconde survit un jour de plus avec un traitement symptomatique. L’autopsie de la première génisse révèle une paramphistomose larvaire massive de l’intestin grêle, avec une congestion de tout l’intestin, quelques paramphistomes immatures dans la caillette et des trichures dans le cæcum.

L’éleveur, dont les bâtiments sont quasiment en ruine, laisse ses animaux au pré toute l’année, sauf la nuit en hiver. Il est confronté à des problèmes de baisse de production chez ses vaches laitières en automne et en hiver depuis plusieurs années, mais aussi de cachexie et de mortalités de génisses. Les plus jeunes maigrissent, alors que leur rumen est plein, et certaines ont de la diarrhée. Les coproscopies réalisées sur ces dernières montrent quelques œufs de trichures. Celles effectuées sur des génisses plus âgées et des vaches se révèlent positives aux paramphistomes, et à Fasciola pour certaines. Quelques jours après le traitement de tous les bovins à l’oxyclosanide, les vaches remontent en lactation pour la première fois depuis des années.

Les coproscopies sont souvent négatives lors de diarrhée brutale des jeunes

La paramphistomose est due à un trématode du genre Paramphistomum(1). Son œuf ressemble à celui de la grande douve, mais il est verdâtre et non jaunâtre. L’hôte intermédiaire étant un mollusque aquatique, les facteurs de risque sont similaires à ceux de la grande douve. L’infestation apparaît donc sur les pâturages dans des zones humides, au printemps et à l’automne, et elle peut se produire dès que la température est positive.

La paramphistomose se manifeste sous trois formes cliniques : classique (baisse de l’état général), aiguë (diarrhée liquide, brutale, brun vert, évoluant vers la mort par déshydratation), et chronique (baisse de l’état général et des performances). D’après Lionel Zenner, enseignant à l’école de Lyon, « des variations de réceptivité ont été remarquées selon l’espèce (bovins plus réceptifs que moutons), la race (charolaise plus réceptive que holstein) et l’âge (les jeunes sont les plus réceptifs), mais aussi au plan individuel ». De plus, « la période prépatente, c’est-à-dire la possibilité de mettre en évidence des œufs dans les fèces après l’infestation, est de trois mois. Il ne faut donc pas éliminer une hypothèse parasitaire en cas de diarrhée brutale après la mise à l’herbe chez les jeunes ». Cela explique pourquoi, dans le cas présenté, les coproscopies sont négatives chez les plus jeunes animaux.

Le nombre d’œufs sur le pré augmente avec le temps et les fasciolicides sont inefficaces

Les animaux infestés rejettent des œufs dans la prairie déjà contaminée. Cela augmente le nombre d’œufs dans le temps : c’est l’effet cumulatif. En outre, l’hôte intermédiaire joue un rôle multiplicateur des parasites. Ainsi, « si le biotope d’élevage est propice aux mollusques, s’il y a quelques animaux porteurs, il faut traiter rapidement, car tous les prés seront contaminés et tous les animaux atteints dans les années suivantes », a prévenu Lionel Zenner.

Comme la seule molécule efficace sur le parasite est l’oxyclosanide, un adulticide, et qu’elle n’a pas d’autorisation de mise sur le marché pour cette indication chez les bovins et les ovins, notre confrère propose l’hypothèse suivante pour expliquer l’émergence de la paramphistomose : « Les nouvelles générations de fasciolicides n’agissent pas sur le paramphistome, alors qu’auparavant on le traitait sans s’en rendre compte. L’absence de traitement, associé à la forte pluviométrie de ces dernières années, est sans doute à l’origine de l’explosion de la maladie. » Dans le cas présenté, l’importante pluviométrie des deux années précédentes a certainement favorisé l’infestation massive du troupeau sur le pré contaminé.

Lionel Zenner recommande de traiter les bêtes avec 15,3 mg/kg de poids vif d’oxyclosanide, deux fois à trois jours d’intervalle. Le délai d’attente est nul jusqu’à ce dosage, mais n’est pas connu ensuite. Une dose plus faible ne limite pas l’excrétion fécale, ce qui entretient l’infestation du milieu, et une dose plus forte peut provoquer des diarrhées. Pour lui, « il est aussi possible de cibler un lot précis, au pré dans une zone à risque, plutôt que de traiter le troupeau entier. Il faut attendre douze semaines après la rentrée à l’étable pour réaliser le dernier traitement, afin de tuer le maximum de vers adultes ».

Et Jacques Devos de conclure : « Devant le nombre de cas de plus en plus nombreux de paramphistomose larvaire aiguë, il convient d’introduire systématiquement cette maladie dans le diagnostic différentiel des entérites aiguës sans fièvre qui surviennent chez des ruminants dans un pâturage avec des zones humides. »

  • (1) Comme les espèces et les genres des parasites classiquement connus sous le terme de Paramphistomum ont été pour certains renommés, il serait plus juste de parler d’amphistomose plutôt que de paramphistomose.

  • (2) Journée “cas cliniques” organisée par l’ENVL et le GTV Rhône-Alpes, le 28/5/2009.

CONFÉRENCIERS

Jacques Devos, praticien à Panissières (Loire).

Lionel Zenner, enseignant à l’unité pédagogique “santé publique vétérinaire” de l’ENV de Lyon.

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