Zoonoses. Maladie émergente sous haute surveillance
Actualité
Auteur(s) : Michel Bertrou
Michèle Bouloy, de l’Institut Pasteur, a présenté quelques données récentes sur les mécanismes de la pathogenèse de la fièvre de la vallée du Rift (FVR), le 3 décembre à l’Académie vétérinaire. Les travaux de son laboratoire de génétique moléculaire des Bunyaviridae (en collaboration avec d’autres équipes de recherche) offrent de nouvelles perspectives vaccinales pour le contrôle de cette maladie émergente sous haute surveillance, classée parmi les agents potentiels de bioterrorisme (aux côtés de la peste et du charbon). Le virus de la FVR est un arbovirus de la famille des Bunyaviridae, du genre phlébovirus. Son génome viral est constitué de trois segments d’ARN monocaténaire : les segments L, M et S. Ce dernier code pour une protéine non structurale, appelée NSs, à laquelle les chercheurs se sont intéressés. Bien que le cycle viral des Bunyavirus se déroule dans le cytoplasme, cette protéine a la particularité d’entrer dans le noyau, où elle forme des structures filamenteuses caractéristiques de l’infection.
En travaillant sur la souris, bon modèle pour cet agent pathogène, Michèle Bouloy et ses collaborateurs ont montré que la protéine NSs est en fait un facteur déterminant de la virulence. Ils ont eu pour cela la chance de travailler avec une souche (dénommée “clone 13”) dont le gène codant pour la protéine NSs est délété à 70 %. Après avoir montré que cette souche défective pour NSs est avirulente pour la souris, ils ont, pas à pas, identifié les divers mécanismes(1) impliquant cette protéine dans l’extraordinaire pathogénicité du virus de la FVR.
Dès lors, “clone 13”, naturellement atténué, se révèle un meilleur candidat pour un vaccin que les deux souches(2) déjà utilisées, qui induisent des effets secondaires (effets tératogènes et avortements). Le laboratoire sud-africain Onderstepoort Biological Products s’est intéressé à ce nouveau candidat et a procédé à des essais en atmosphère confinée sur des ovins. L’immunogénicité et l’innocuité de “clone 13” ont été vérifiées. Des inoculations à trente et à cent jours de gestation n’ont entraîné aucun avortement. Lors d’épreuve avec une souche virulente (à trente et à quatre-vingt-dix jours après la vaccination), aucune virémie ni avortement n’a été constaté et les agneaux des mères vaccinées étaient protégés par les anticorps maternels.
Ces essais ayant permis de déterminer la dose protectrice, la procédure d’enregistrement se poursuit en Afrique du Sud. Des essais de terrain dans des régions où la fièvre de la vallée du Rift est endémique devraient ainsi être envisageables prochainement.
Transmis majoritairement par plusieurs espèces de moustiques, la fièvre de la vallée du Rift sévit surtout en Afrique subsaharienne, où elle est responsable de vastes épidémies chez l’animal (épizooties), mais aussi chez l’homme, surtout depuis 1977. Au Kenya et en Somalie, elle a fait quelque cinq cents victimes humaines et a décimé des dizaines de milliers de têtes de bétail durant la période 1997 et 1998. Présente aussi en Egypte et en Afrique de l’Ouest, la maladie est considérée comme émergente, car elle s’est propagée hors d’Afrique en 2000, touchant huit cent soixante-trois personnes en Arabie Saoudite (cent vingt décès) et plus d’un millier d’individus au Yémen (cent vingt et un décès). En 2008, le virus a gagné Madagascar puis les Comores, dont l’île de Mayotte.
Il peut persister plusieurs années à l’état endémique, transmis par les œufs infectés des insectes. Mais, à la faveur de pluies torrentielles qui facilitent la pullulation des moustiques, il peut débuter un nouveau cycle épizootique et se transmettre alors directement.
Chez les ruminants, la maladie est responsable d’une forte mortalité (par hépatite, particulièrement chez les jeunes). Elle provoque également des avortements et des effets tératogènes. Chez l’homme, il peut s’agir de fièvre bénigne, et dans certains cas de fièvre hémorragique, souvent mortelle.
(1) La protéine NSs bloque d’une part la production d’interféron ß et inhibe d’autre part la transcription cellulaire, permettant au virus d’échapper à la réponse de l’hôte. Récemment, d’autres équipes ont identifié que NSs dégradait également la protéine kinase PKR induite par les interférons. Enfin, l’action de NSs sur la ségrégation chromosomique expliquerait les effets tératogènes.
(2) Il s’agit de la souche neurotopique Smithburn (vaccin vétérinaire sous licence) et du vaccin candidat MP12 (issu de la souche égyptienne ZH548).
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