Chirurgie maxillo-faciale
Formation continue
ANIMAUX DE COMPAGNIE
Auteur(s) : Gwenaël Outters
Les dents situées dans le trait de fracture doivent être traitées en même temps que la fracture.
La plupart des fractures des mâchoires chez le chien sont localisées en région dentée, mandibulaire ou maxillaire, ce qui peut compliquer l’utilisation de matériel d’ostéosynthèse. En revanche, les dents peuvent être un moyen de fixation pour certains types de traitements dits non sanglants. Lors de fractures des mâchoires, quand le chien ferme la gueule, les forces qui s’exercent en région rostrale, au niveau des canines, ont tendance à ouvrir le trait de fracture en partie dentée (face de tension). C’est là qu’il faut essayer de neutraliser ces forces par une stabilisation fiable de la fracture.
En médecine humaine, du matériel implantaire à fixer dans la partie dorsale de la mandibule (face de tension) a été développé (miniplaques de titane). Chez le chien, ce principe biomécanique de la face de tension peut être respecté par la mise en place d’un dispositif de contention au niveau de la région dentée, assurant ainsi, avec un système plus simple, une bonne efficacité et stabilité.
La réduction et le traitement de la fracture doivent rétablir une occlusion dentaire normale, en particulier au niveau des canines. Les lésions préexistantes (parodontite, par exemple) ou secondaires à la fracture (contusion ou fracture dentaire) doivent également être prises en charge. Dans 60 % des cas, la racine d’une dent est située dans le trait de fracture. Des études montrent que les dents non traitées au moment de la réduction de la fracture gênent la cicatrisation osseuse (par des retards de cicatrisation ou par une mort pulpaire et des contaminations bactériennes). Il est donc préférable de traiter d’emblée ces dents, soit par l’extraction soit par un traitement endocanalaire pour juguler l’infection et empêcher la recolonisation de l’intérieur de la dent.
Une intubation par pharyngostomie permet de manipuler la bouche, d’obtenir une occlusion dentaire la plus parfaite possible et de réaligner au mieux les abouts fracturaires. En cas de traitement ostéosynthétique, la réduction est ensuite stabilisée par une suture temporaire des mâchoires ou par une fixation des canines avec une résine dentaire afin de maintenir la réduction pendant la pose des implants métalliques.
L’évaluation de la fracture et des dommages annexes nécessite l’utilisation de radiographies intra-orales. Deux moyens sont ensuite envisageables : des traitements orthopédiques non sanglants et des traitements ostéosynthétiques par implants métalliques. Les méthodes non sanglantes, qui donnent en général de bons résultats, sont à privilégier en première intention.
Deux techniques orthopédiques non sanglantes sont décrites : le blocage intermaxillaire (maxillo-mandibulaire) et les attelles interdentaires. Dans le premier cas, la mâchoire est bloquée en occlusion ou en légère sous-occlusion par la fixation (collage) des canines maxillaires et mandibulaires entre elles. Le haut et le bas des mâchoires sont alors solidarisés (voir photo 1). Dans le second cas, les canines et les molaires servent d’appui à des pontages interdentaires au-dessus du trait de fracture. L’avant est alors solidarisé à l’arrière des mâchoires.
Le blocage intermaxillaire est un moyen fréquemment utilisé pour les fractures caudales. Les canines sont fixées avec de la résine composite dentaire en bouche semi-fermée (laisser 1 cm d’ouverture). Un mordançage de la dent par une attaque acide rend l’émail plus rugueux. Un agent de liaison (résine fluide) est ensuite appliqué, avant d’employer une résine composite organo-minérale. Les deux mâchoires sont solidarisées en entourant les canines, sur une bouche semi-fermée, dans un manchon de résine. Pour une fracture caudale, il est possible de déposer le matériel trois semaines plus tard : la fibrose est suffisante pour maintenir la réduction et permettre la poursuite de la cicatrisation osseuse.
Les attelles interdentaires servent à solidariser l’avant à l’arrière du trait de fracture. La présence d’une canine et d’une carnassière saines de part et d’autre de ce trait est indispensable. Le pontage est réalisé à l’aide de résines bis-acryliques non exothermiques, purement organiques, avec peu ou pas de charge minérale. Les résines utilisables en bouche ne sont pas ou peu exothermiques (contrairement aux résines acryliques de laboratoire fortement exothermiques, qui peuvent monter à 80 °C, employées dans certains cas à mauvais escient en médecine vétérinaire). Chez le chien, la pose de ligatures métalliques interdentaires renforce le montage en résine.
Dans certains cas, l’importance de la perte de substance osseuse au niveau du trait de fracture (fracture comminutive, ancienne, infection du trait de fracture, etc.) ou encore l’absence ou le mauvais état dentaire ne permettent pas le recours à une technique non sanglante. Une intervention chirurgicale maxillo-faciale, qui fait appel à la pose d’une plaque (miniplaque en titane), est nécessaire (voir photo 2). Les traitements ostéosynthétiques par implants métalliques présentent tous un risque majeur de traumatisme dentaire. Des ligatures, des plaques vissées ou des fixateurs externes peuvent être posés. Dans certains cas, l’utilisation d’une technique de régénération osseuse guidée est envisageable en complément. Le site est enrobé avec une membrane résorbable employée en chirurgie de réparation parodontale. Le site fracturaire est alors protégé et le caillot préservé grâce à l’exclusion du tissu conjonctif hors de cette membrane. La colonisation osseuse est alors guidée par le tunnel ainsi formé.
Philippe Hennet diplomate de l’European Veterinary Dental College (EVDC) et de l’American Veterinary Dental College (AVDC), praticien à la clinique Advetia (Paris).
Article rédigé d’après la conférence : « Nouveaux traitements des fractures de mâchoires », présentée au congrès de l’Afvac 2008.
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