« Nous sommes tous des entrepreneurs »

Qualité de service, tableau de bord, indicateurs économiques, opportunités de développement, création de valeur, gestion des ressources humaines, management… Dans l’amphithéâtre d’honneur de l’ENVA, praticiens et professionnels de la gestion d’entreprise ont abordé des concepts plutôt rares dans le Landerneau vétérinaire, tant l’idée de considérer les cabinets ou les cliniques comme de véritables entreprises est encore embryonnaire dans la profession. C’est justement tout l’esprit de l’association Ergone que de promouvoir l’entreprise vétérinaire et de donner l’envie d’entreprendre. « Notre objectif est d’aider le praticien à se développer et faire face à l’avenir, particulièrement aux changements liés à la directive “services” (voir article ci-contre), a expliqué Arnaud Duet, président d’Ergone. Nous ne nous adressons pas à des praticiens en particulier, mais à tout le monde. Que nous soyons à la tête d’une petite ou d’une grosse structure, nous sommes tous des entrepreneurs. »

La profession manque d’indicateurs fiables permettant de se situer sur le marché

Au programme de ces deux journées : diverses interventions fondées sur le principe d’un témoignage de praticien (la pratique), complété par un consultant d’entreprise (la théorie). On retiendra notamment deux présentations qui démontrent l’intérêt, pour piloter et développer son entreprise, de bien connaître son marché et de recourir à des tableaux de bord de gestion. Annie-Claude Bouvier, praticienne à Bouchemaine (Maine-et-Loire), a ainsi montré comment elle avait modifié son offre de services en canine (consultations de gériatrie pour chats, modification des tarifs de consultation, aide au choix de la race lors d’un renouvellement, etc.) à partir de données nationales sur les marchés canin et félin, corrélées avec celles de son propre fichier, celles d’une clinique voisine, et grâce à une enquête auprès de ses clients.

L’idée de se comparer aux autres pour mieux apprécier sa position sur son marché est l’une des clés de la gestion d’entreprise. Or aujourd’hui la profession manque cruellement d’indicateurs fiables (activités, chiffres d’affaires, enquêtes de satisfaction de la clientèle, etc.). Développer ces outils, notamment par la mise en place des panels, est aussi l’un des objectifs de l’association, qui a noué pour cela des partenariats avec Merial et KPMG, l’un des plus importants cabinets d’expertise comptable qui travaille déjà beaucoup dans d’autres secteurs de la santé.

Jacques Guérin, praticien mixte à Malestroit (Morbihan), a expliqué comment optimiser et anticiper l’activité de sa clinique en établissant des tableaux de bord par métier (canine, bovine, porcine, aviaire, etc.) à partir de croisements de données récupérables au sein de sa propre structure : chiffre d’affaires, nombre de visites d’élevages, ratio des analyses de laboratoire par élevage, évolution du prix des actes et des produits, etc. « La profitabilité de nos entreprises permet encore de ne pas anticiper et de piloter à vue  », remarque-t-il. Mais pour combien de temps ?

Déléguer, l’un des principes majeurs du manager

Autre moment fort, les témoignages de praticiens à la tête de grandes entreprises. Pascal Anjot a ainsi décortiqué l’organisation managériale de sa clinique qui comprend treize associés. Il en est le manager leader. Un conseil de gérance composé de cinq membres associés est élu tous les quatre ans par l’ensemble des associés. Il désigne, en son sein, le dirigeant de la structure. Toutes les tâches qui ne relèvent pas de l’exercice vétérinaire (ressources humaines, juridique, comptabilité, informatique) sont confiées à des non-vétérinaires. Un directeur général, non vétérinaire, travaille à ses côtés. « Il pilote l’entreprise au quotidien, mais ce sont les associés vétérinaires qui prennent les décisions stratégiques », explique Pascal Anjot.

Une consultante est par la suite intervenue pour évoquer les grands principes du management. Le premier d’entre eux : résister à son envie de tout faire et de tout maîtriser pour passer du faire au faire faire. Tout un programme…