LE PRATICIEN PEUT SOUTENIR LES ACTIVITÉS ASSOCIANT L’ANIMAL - La Semaine Vétérinaire n° 1394 du 26/02/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1394 du 26/02/2010

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Auteur(s) : Agnès Faessel

Discipline récente, la zoothérapie, ou thérapie facilitée par l’animal, se développe. Le bien-être, de l’animal comme du patient, doit être préservé. Mais l’acceptation d’une présence animale dans un établissement se heurte à bien d’autres freins. Une session était consacrée à ce sujet lors du congrès de la Fecava à Lille, fin novembre dernier.

Le chien guide d’aveugle est sans doute l’exemple le plus populaire de l’utilisation d’un animal pour pallier le déficit d’une personne. Mais d’autres initiatives se multiplient pour impliquer l’animal dans le travail effectué auprès des personnes âgées, handicapées, malades, etc. Le psychologue américain Boris Levinson a été le premier à décrire le rôle social de catalyseur et d’initiateur de communication du chien, qu’il employait comme outil thérapeutique avec ses patients, les enfants notamment. C’était au milieu du siècle dernier, a rappelé notre consœur Anne-Catherine Vermaut, lors d’une conférence au congrès 2009 de la Federation of European Companion Animal Veterinary Associations (Fecava). Les publications sur cette nouvelle discipline, la “zoothérapie”, se sont multipliées à partir des années 70. Des écrits relatent toutefois la présence d’animaux dans les centres d’aliénés dès le XIXe siècle.

En France, le neurologue Didier Vernay a créé en 2001 le Groupe de recherche et d’étude sur la thérapie facilitée par l’animal (Gretfa), qui associe psychologues, éthologues, biologistes et… vétérinaires.

Thérapie facilitée par l’animal, activités associant l’animal et médiation

Car la zoothérapie, multidisciplinaire, intéresse autant des professionnels du milieu médical que social ou éducatif, en gériatrie comme en pédiatrie. L’animal s’intègre alors dans un travail individuel ou de groupe. Il ne remplace toutefois pas le geste, la technique ou le traitement médical nécessaire au patient. Il représente un outil thérapeutique complémentaire et contribue au travail du professionnel comme cointervenant.

La zoothérapie au sens strict est la thérapie facilitée par l’animal (TFA). L’animal est alors utilisé dans le cadre d’une thérapie menée par des professionnels de santé. Une étude comparative réalisée chez des enfants atteints de déficience visuelle a ainsi montré les progrès effectués au contact d’une chienne golden retriever de cinq ans (amélioration de la communication, du langage, baisse des inhibitions, relance de l’activité, etc.).

L’animal peut aussi être utile par sa seule présence, dans un rôle de médiation. Il est en effet une source d’attention et de communication, créant des liens affectifs et sociaux. Il peut aider un individu à sortir d’un isolement, à retrouver confiance en lui. « Les personnes engagent leur responsabilité dans les soins aux animaux ou retrouvent l’estime d’elles-mêmes en se faisant obéir », illustre Anne-Catherine Vermaut. Par ailleurs, elles construisent une relation avec l’animal sans le risque de ressentir une quelconque évaluation ou un jugement (et sur la base d’une confiance parfois perdue, car l’animal « ne ment pas »). Comme en zoothérapie, la présence de l’animal élargit le rapport interhumain, l’ouvrant sur une triangulation qui favorise le travail de l’intervenant. Des travaux mettent aussi en évidence les effets bénéfiques du contact avec l’animal sur la tension artérielle, le rythme cardiaque, l’anxiété et l’agressivité.

Chien, chat, âne ou poisson, de multiples espèces peuvent être utilisées, par des structures diverses (maisons de retraite, hôpitaux, instituts pour handicapés ou délinquants, etc.). Il peut s’agir d’initiatives internes à l’établissement (adopter une “mascotte”, aménager une basse-cour) ou externalisées (activités en centre équestre, en ferme pédagogique). Un centre carcéral en Suisse offre aux détenus la possibilité de posséder un chat de compagnie (pouvant aller et venir, mais nourri et entretenu par le détenu). Cela permet le développement de la responsabilisation et l’expression de marques d’affection. Certains détenus refusent toutefois la compagnie de l’animal, par manque d’intérêt ou pour ne pas lui faire subir le milieu carcéral, puisqu’il n’a commis aucun délit ! Les détenus en fin de peine peuvent adopter le chat ou le transmettre à un autre détenu.

Pour leur part, les activités associant l’animal (AAA) font appel à des animaux éduqués. Elles visent à stimuler les personnes d’un point de vue physique (pour augmenter leur mobilité), sensoriel ou cognitif (en travaillant la mémoire, par exemple). Dans ce cadre, l’espèce canine est privilégiée. Plusieurs associations proposent ainsi aux institutions d’organiser la venue régulière d’un “chien visiteur”.

Le suivi comportemental de l’animal est nécessaire

Dans tous les cas, le bien-être de la personne et la bien-traitance de l’animal doivent être préservés. Ainsi, les activités avec l’animal s’adressent à des personnes volontaires. Quant à l’animal, il ne doit pas souffrir de sa mise à contribution. « Les séances en collectivité sont particulièrement fatigantes pour le chien », prévient Anne-Catherine Vermaut. L’attention à prêter à l’animal, valable pour toutes les espèces, doit être continue (voir encadré « Le chat comme aide thérapeutique »).

Le vétérinaire, professionnel de la santé et du comportement, intervient dans la sélection puis le suivi. Il peut ainsi être sollicité pour des évaluations comportementales, indispensables d’abord pour le choix d’un animal répondant aux attentes (voir encadré « Qualités requises d’un chien visiteur »), puis dans le cadre de son suivi. Il conseillera un animal calme en gériatrie, plus vif en neurologie. L’évaluation comportementale vise aussi à réduire le risque d’accidents (morsures, griffures, chutes, etc.). Bien entendu, la surveillance de l’état de santé des animaux est impérative, particulièrement pour éviter tout risque de transmission d’une zoonose.

Les dangers en termes de santé et de sécurité font en effet partie des freins au développement des activités associant l’animal, comme à l’hébergement d’animaux de compagnie dans les structures collectives. « Il n’existe pas de texte réglementaire spécifique pour autoriser, interdire ou organiser la présence temporaire ou permanente d’un animal dans des établissements pédagogiques, médico-sociaux, de soins, d’hébergement… auxquels s’applique pourtant une réglementation dense, a expliqué Guy Hannotte, praticien dans le Pas-de-Calais, à l’occasion du dernier congrès de la Fecava. Le règlement intérieur fait office de loi et transcrit la volonté du conseil d’administration de chaque établissement. Celui-ci est rarement réceptif à l’introduction d’un animal, se réfugiant derrière le principe de précaution. » De nombreux arguments peuvent être invoqués, outre les risques sanitaires : la responsabilité juridique de la détention de l’animal, la crainte de dégâts ou d’une désorganisation causés par un être vivant dans un contexte particulièrement “normé”, le coût, la réticence du personnel, le surcroît de travail, etc.

De bonnes pratiques pour codifier la présence animale

L’externalisation des activités est la solution que privilégient souvent les institutions. Ainsi, d’après une enquête du Centre d’étude et de recherche sur la philanthropie (CerPhi), « les établissements qui accueillent des enfants et des adolescents handicapés ou en difficulté organisent essentiellement des activités associant l’animal hors de l’établissement (activités équestres) », rapporte Guy Hannotte. Notre confrère constate néanmoins la multiplication des associations de chiens visiteurs, dont les membres, bénévoles, proposent leurs services aux maisons de retraite, aux hôpitaux, etc. La présence de chiens et de chats est aussi observée dans près d’un quart des maisons de retraite en France (1 806 sur 7 443, d’après une enquête de la Fondation Sommer en 2005).

Pour convaincre les établissements d’accepter les animaux dans leurs murs, à demeure ou ponctuellement, le meilleur argument est le bénéfice induit pour les patients ou les résidents. Les effets positifs observés par les structures qui l’ont expérimenté et les résultats d’études sur le sujet peuvent être avancés. Et dans le cas des maisons de retraite, il est même envisageable de « faire valoir le droit des propriétaires de conserver leur animal de compagnie avec eux ». Mais la réalisation pratique du projet nécessite aussi de codifier la présence de l’animal, via l’adoption d’un guide de bonnes pratiques, ajusté à la situation de chacun (fonctionnement, locaux, personnel, etc.). Il doit être rédigé sans idéologie et apporter des solutions concrètes aux difficultés avancées par les détracteurs du projet.

Les vétérinaires peuvent jouer un rôle proactif pour favoriser la présence animale

Outre son implication dans les soins et le suivi des animaux, le vétérinaire peut devenir proactif dans l’acceptation de la présence animale par les établissements médico-pédagogiques ou pour personnes âgées. Ainsi, il peut prendre part à la conception des guides de bonnes pratiques, en apportant son expertise et son conseil sur le volet relatif au contrôle des risques sanitaires au moins. Il peut aussi accompagner la mise en œuvre des activités associant les animaux.

L’association Vétérinaires pour tous (VPT) a choisi de s’impliquer pour faire connaître, valoriser et développer ces activités, au travers de ses opérations “Animal pour un sourire”. Elle entend fédérer les initiatives et les compétences professionnelles acquises dans ce domaine, et proposer des outils et des références aux vétérinaires qui souhaitent participer à des actions ou à des programmes. VPT sensibilise également les pouvoirs publics et les autres acteurs concernés à l’intérêt de la participation des vétérinaires aux activités associant l’animal.

Par exemple, dans le département du Nord, le concours de l’association a permis de concrétiser l’accueil de chiens visiteurs dans les hôpitaux. Pour Guy Hannotte, président de VPT-France, il est logique et souhaitable que la profession s’implique dans ces actions qui favorisent la présence d’animaux auprès de personnes fragiles.

  • (1) A la suite d’une conférence en RPC qui s’est déroulée en janvier 2006. Publication coéditée par Les Editions du Point Vétérinaire et Vétoquinol.

Le chat comme aide thérapeutique

L’une des recommandations pratiques cliniques (RPC) en médecine féline établies en 2006(1) s’intéresse au chat comme aide thérapeutique. Elle indique : « En situation intrafamiliale, pour l’ensemble du foyer, le chat, au-delà de l’objet d’attachement, peut être considéré comme :

– un médiateur des relations interindividuelles ;

– un support du développement émotionnel et intellectuel de l’enfant ;

– un facteur favorisant positivement la qualité de la vie et la bonne santé physique et mentale.

Dans une approche institutionnelle des populations en difficulté, le chat peut intervenir comme :

– “cothérapeute”;

– “associé” à un professionnel médical (médecin) ou social comme interface vers la personne aidée.

Il est nécessaire de toujours prendre en compte le respect de l’intégrité physique et émotionnelle de l’animal, d’être particulièrement vigilant au maintien de son équilibre comportemental et de vérifier les conditions de son entretien. »

A. F.

Qualités requises d’un chien visiteur

La sélection d’un chien visiteur porte sur des critères comportementaux et d’éducation :

– être équilibré ;

– être sociable avec l’homme et ses congénères ;

– apprécier le contact et le rechercher ;

– connaître quelques ordres ;

– savoir marcher en laisse ;

– ne pas sauter.

Le chien doit en outre être en bon état en termes d’hygiène (propreté, dentition, etc.) et de santé (vaccinations et vermifugations régulières, suivi vétérinaire).

A. F.
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L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

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