Dentisterie du cochon d’Inde
Formation continue
FAUNE SAUVAGE ET NAC
Auteur(s) : Pascaline Pey
En l’absence d’usure par des aliments abrasifs, les dents ne s’usent plus normalement, ce qui perturbe leur affrontement.
La maladie dentaire est un problème courant chez les cobayes. Elle affecte les incisives aussi bien que les prémolaires et les molaires, communément appelées “dents de joue”. Sa principale cause est une alimentation inappropriée. Le régime alimentaire idéal pour un cochon d’Inde se compose d’herbes et de foin grossier principalement, de légumes frais, de croquettes sèches (maximum 10 % de la ration) et d’un supplément de vitamine C (non synthétisée chez cette espèce). Cette dernière est recommandée à la dose de 10 mg/kg/j (30 mg/kg/j si l’animal est malade). Sa conservation est importante, car cette vitamine est instable.
Les dents des « aradiculaires hypsodontes » doivent s’user en permanence puisqu’elles poussent perpétuellement. L’herbe et le foin grossier sont des aliments abrasifs et faibles en calories, alors que les grains ou les croquettes du commerce sont peu abrasifs et, en outre, particulièrement caloriques. Tout cochon d’Inde anorexique va donc développer des problèmes de dents. Etant donné qu’elles ne s’usent plus normalement, leur affrontement sera perturbé. Les carences en vitamine C entraînent une diminution de production de collagène qui conduit à un espacement et à une désorientation des dents, donc à une malocclusion.
En conséquence, les incisives mandibulaires s’allongent, les mandibules sont déplacées vers l’avant et une malocclusion incisive secondaire s’installe. S’ensuit une augmentation de la pression sur les couronnes des dents de joue. Leur éruption peut être ralentie, s’arrêter ou s’inverser. Les racines s’allongent et peuvent perforer l’os alvéolaire. Un gonflement des tissus mous adjacents, des décharges oculaires et nasales et, dans des cas sévères, une exophtalmie sont constatés. Tous ces phénomènes sont irréversibles. La table dentaire devient pointue, aiguisée. Les dents de joue mandibulaires, qui ont une croissance linguale, vont s’affronter de part et d’autre de la langue et former un pont par-dessus celle-ci. Il en résulte un inconfort oral qui peut aller jusqu’à la douleur aiguë. L’animal n’est plus capable de s’alimenter. Dans les cas avancés, une hypersalivation est notée, ainsi que la présence de poils mouillés dans la région ventrale du cou et des mandibules.
Les symptômes sont peu spécifiques : baisse de l’état général, pelage terne et, à la palpation abdominale, un météorisme et la présence de liquide dans le cæcum. Un bruxisme n’est constaté que dans 6 % des cas et l’hypersalivation dans 10 % des cas. La collecte de l’anamnèse est précieuse (voir encadré). Lorsque le problème dentaire est identifié, il convient de déterminer s’il correspond au problème primaire et de discerner ses conséquences.
Mieux vaut également se méfier de deux pièges communs : le bruxisme signe le plus souvent une douleur abdominale et n’importe quelle douleur entraîne une anorexie chez cette espèce (par exemple une lithiase urinaire).
En outre, le problème dentaire peut être une cause comme une conséquence. Il n’en demeure pas moins que s’il existe, il est obligatoire de le traiter. La recherche poussée d’une affection dentaire doit être effectuée chez tout cochon d’Inde anorexique.
A l’examen clinique, il faudra observer attentivement : l’occlusion au repos, la longueur des incisives et leur plan d’affrontement (voir photo 2), la salivation, la présence de poils mouillés ventralement, des pattes avant souillées, des décharges nasales ou oculaires, une exophtalmie.
Un examen intra-oral est impératif. Chez l’animal vigile, il permettra d’observer un pontage des dents de joue mandibulaires par-dessus la langue. Sous anesthésie générale, il sera possible de visualiser les dents les plus caudales, leur orientation, l’angulation du plan d’occlusion des dents de joue. Des lacérations de la face interne des joues sont parfois rencontrées.
L’étape suivante est l’examen radiographique. Il est préférable d’utiliser des films radiographiques conventionnels. Une unité radiographique standard est suffisante (15 mAs, 75 kV, 50 cm FFD). Outre les vues latérale, ventro-dorsale et oblique, la vue rostro-caudale est de loin la plus intéressante. Elle nécessite cependant une tranquillisation profonde ou une anesthésie générale.
S’il est possible d’accéder à une unité radiographique spécifique pour les dents, des paramètres similaires à ceux employés pour les chiens de taille moyenne à grande peuvent être utilisés. La vue latérale permet d’évaluer la couronne dentaire, ainsi que l’élongation des racines des incisives et l’éventuelle perforation de l’os palatin. La vue rostro-caudale permet de visualiser l’angle du plan d’occlusion, l’éventuel pontage des dents de joue mandibulaires et les racines dentaires pénétrant l’os alvéolaire (voir photo 3). En outre, la vue dorso-ventrale permet d’observer la protrusion des racines dentaires au sein de l’arcade zygomatique. Les projections intra-orales sont difficilement réalisables chez le cochon d’Inde.
Leen Verhaert, diplomate de l’European Veterinary Dental College, praticienne à Hove et consultante à l’université de Gand (Belgique).
Article rédigé d’après la conférence « Anorexia and occlusion disease in guinea pigs : cause or consequence ? », présentée au congrès Fecava 2009, à Lille.
Chez le cochon d’Inde sain, les dents sont portées vers le bas pendant la mastication. Les incisives inférieures sont plus longues que les incisives supérieures. Cet animal est strictement herbivore. Comme tous les rongeurs et lagomorphes, il est aradiculaire hypsodonte, c’est-à-dire que ses dents n’ont pas de racines anatomiques. En conséquence, les vingt dents du cobaye croissent en continu tout au long de sa vie. Sa formule dentaire est 2x { I 1/1 : C 0/0 : P 1/1 : M 3/3 }. Pendant la prise alimentaire, il effectue de larges mouvements rostro-caudaux, dans la limite des articulations temporo-mandibulaires. Au repos, les mandibules se placent naturellement en position caudale par rapport aux mâchoires supérieures. Les incisives ne sont jamais en occlusion. Leur surface d’affrontement est en forme de ciseaux bien aiguisés. Le plan d’occlusion est horizontal.
Les mandibules sont plus larges que les mâchoires supérieures. Les dents de joue maxillaires ont une orientation buccale, alors que les dents de joue mandibulaires ont une orientation linguale. Leur plan d’occlusion doit être angulé à 30°. Les lignes qui forment le diastème buccal doivent converger rostralement aux incisives (voir photo 1).
P. P.• Quel est le motif primaire de la consultation ?
• Quels sont les antécédents pathologiques (troubles respiratoires, gastro-intestinaux, etc.) ?
• Une perte de poids récente a-t-elle eu lieu ?
• Où vit l’animal (cage, dans quelle pièce, etc.)?
• Quel est son régime alimentaire, en a-t-il changé récemment ?
• L’animal sélectionne-t-il ses aliments, a-t-il des préférences ?
• De la nourriture tombe-t-elle spontanément de sa bouche et salive-t-il ?
• Est-il anorexique ?
• Présente-t-il des décharges nasales ou oculaires ?
• Grince-t-il parfois des dents ?
P. P.• Ration alimentaire : pas plus de 10 % de grains du commerce !
• Supplémentation en vitamine C.
• Peser le cochon d’Inde une fois par semaine.
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