MALGRÉ LA CRISE, LES VÉTOS DU NORD CONSERVENT LA FRITE - La Semaine Vétérinaire n° 1404 du 07/05/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1404 du 07/05/2010

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Auteur(s) : Jean-Luc Decaestecker

Bienvenue dans le Nord ! Loin des clichés, nous sommes partis à la rencontre de nos confrères du Nord qui exercent dans le département le plus peuplé de France. Un territoire confronté à l’amenuisement du secteur rural, à l’exercice transfrontalier et à la crise, évidemment. Mais les praticiens restent confiants dans l’avenir et tiennent fièrement la baraque vétérinaire debout. Ils reviennent sur leurs difficultés, sur les enjeux de la profession, à l’heure de la spécialisation, de la concurrence, des nouvelles technologies, etc. Paroles de cht’is vétérinaires.

Le Nord est un pays à forte population où les petits villages sont gros, résume joliment Vincent Bertrand, installé à Quesnoy-sur-Deûle et président du Groupement technique vétérinaire (GTV du Nord). Il n’y a quasiment plus de vétérinaires ruraux, mais beaucoup de structures pour répondre aux demandes localisées en canine. Dans le secteur nord-ouest de Lille, par exemple, on compte quatorze cliniques canines pour une rurale. ». Henri Cathelain, président du conseil régional de l’Ordre, confirme le diagnostic : « Même dans l’Avesnois où dominent les petites structures d’élevage, il y a peu de vétérinaires ruraux purs. En revanche, les mixtes sont omniprésents et on ne compte plus les canins ! » Le secteur rural s’est réduit comme peau de chagrin du fait du transfert continudes terres vers l’habitat et les loisirs. « Tout le monde aprisactede cette réalité, explique EmmanuelThébaud, directeur de Vet’El à Lens, il y a de moins en moins d’éleveurs, mais de plus en plus de pâtures à chevaux, au risque de ne plus trouver suffisamment de ruraux. »

La rurale se concentre dans les deux secteurs de la Flandre et de la Sambre-Avesnois, avec pour chacun sa spécificité. Une activité prégnante en élevages de porcs et de volailles en Flandre, quand le sud du département, l’Avesnois, est majoritairement orienté vers les bovins. Si la Flandre se caractérise par une évidente recherche de la performance, l’Avesnois a une organisation différente qui tient compte des particularités de ce terroir herbagé, plutôt marqué par l’exercice individuel et la multiplicité de “vétérinaires pompiers à l’ancienne”. Un phénomène en cours d’évolution néanmoins, en raison de la paupérisation des élevages, donc de leur raréfaction.

UNE COURSE À L’ARMEMENT

Si la rurale perd de sa consistance, « l’offre de services se multiplie aujourd’hui en canine sur Lille essentiellement », souligne le Lensois Guy Hannotte, président du syndicat des vétérinaires libéraux du nord de la France, qui semble craindre un excès de l’offre. Lille est en effet forte de plusieurs grosses structures, avec un centre hospitalier, deux cliniques équipées d’une IRM, deux d’un scanner, et d’autres qui réfléchissent à l’achat de tels équipements. Beaucoup s’interrogent sur la réalité de la demande. S’agit-il d’une “course à l’armement” ? « Le marché existe », estime Henri Cathelain. Toujours est-il que de nombreuses villes du bassin métropolitain ont des structures bien équipées et performantes qui ont investi dans des outils techniques comme les échographes.

Et la Belgique toute proche ? Au-delà des parasitoses comme le varron (voir ci-contre), le double débat des diplômés belges, qu’ils soient d’origine française ou belge, et celui des vétérinaires belges qui traversent la frontière pour compléter leur activité, revient souvent dans les conversations.

« Au goût de ceux qui sont déjà installés, remarque Henri Cathelain, il y en a toujours trop qui arrivent. Mais il faut aussi reconnaître que la région est l’une de celles où les revenus par vétérinaire restent importants. » Pour autant, selon lui, « cela va se calmer : les promotions diminuent en Belgique et le critère de sélection par tirage au sort limite désormais les non-résidents belges à 30 % des effectifs totaux ». La cinquième école française, Liège, ne serait plus ce qu’elle était !

LES BELGES FACTURENT HORS TVA

Plus que ces problèmes de formation, c’est la question transfrontalière, essentiellement en rurale, qui génère des soucis. Ce que le vétérinaire nordiste reproche à son voisin belge, ce n’est pas tant la concurrence que l’absence de loyauté, de la facturation hors TVA aux médicaments équivalents vendus à prix différents. « Cette concurrence est vraiment pénalisante », assure Emmanuel Thébaud, qui y voit, avec l’urbanisation, l’une des causes de la perte de cabinets en Flandre.

Aujourd’hui, l’exercice transfrontalier est globalement régulé, mais sans doute pas toujours parfaitement respecté. Aucun problème pour les vétérinaires qui disposent de deux cabinets, l’un en France, l’autre en Belgique, puisqu’ils sont inscrits aux tableaux des deux côtés. Même si parfois, la structure française n’est en réalité qu’un établissement de gestion administrative ou une réserve de médicaments.

Quant aux autres qui, de Belgique, interviennent en France, il leur est demandé de se déclarer à l’Ordre comme transfrontaliers. Cela leur permet d’exercer sans inscription, avec l’interdiction de délivrer des médicaments belges en France, mais avec la possibilité d’utiliser des médicaments non immunologiques dès lors qu’il existe en France un médicament à composition identique, tant quantitativement que qualitativement. Une démarche simple qui autorise une prestation épisodique et donne accès à la pharmacie française. Des contrôles ont été menés, ils ont abouti à des poursuites et à des sanctions disciplinaires sur le respect de la loi sur la pharmacie qui impose la commercialisation en France de médicaments avec une AMM française. La situation est plus difficile en médecine vétérinaire industrielle. « 90 % des élevages aviaires sont médicalisés par des Belges, constate Henri Cathelain. On prend le problème à bras-le-corps. »

A cette “menace” belge s’ajoute aussi celle des “affairistes”, dont les pratiques d’approvisionnement en grande quantité sont mal vécues sur le terrain, même si elles semblent limitées.

INVESTISSEMENTS COLOSSAUX

Et la crise ? « Difficile de gagner de l’argent avec des gens qui n’en gagnent pas », assure Henri Cathelain, soucieux des faillites qui se multiplient chez les éleveurs, alors qu’en canine, les crédits de paiements sont légion et que le nombre d’interventions de convenance diminue (-50 % de castrations de chats dans son cabinet en janvier et février derniers).

L’accroissement de l’offre vétérinaire a aussi son revers, notamment dans la métropole lilloise où les “anciens installés” doivent adapter leur activité à la nouvelle donne d’une concurrence accrue. « Certains vivent mal, d’autres sont prêts à tout, mal à l’aise en matière de tarifs, ou en sous-tarif quand la clientèle, pas tout à fait idiote, demande davantage », explique Marc Vilain, installé à Villeneuve-d’Ascq, qui estime qu’« à force de se spécialiser, la profession s’est donné des contraintes qui nécessitent des investissements colossaux ». « Si je compare trente ans en arrière, on gagne dix fois moins, on travaille jour et nuit, aujourd’hui certains se posent la question de la cessation d’activité, mais le métier reste globalement privilégié », constate Vincent Bertrand. Malgré la crise, les Ch’tis gardent le moral.

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