Microbiologie
Formation continue
ÉQUIDÉS
Auteur(s) : Anne Couroucé-Malblanc*, Guillaume Fortier**
Fonctions :
*Professeur à Oniris
**Directeur du département “santé animale” du laboratoire Frank Duncombe à Caen (Calvados)
Article tiré des conférences présentées lors du congrès Avef-Weva-Reva à Saint-Petersbourg (Russie), les 1er et 2 mai 2010.
Ces examens complémentaires permettent l’obtention de résultats, non d’un diagnostic. Ils sont néanmoins d’une grande aide.
Les principaux prélèvements respiratoires chez le cheval sont l’écouvillon naso-pharyngé, le lavage trachéal et le lavage broncho-alvéolaire.
En vue d’une analyse bactériologique, le prélèvement trachéal est celui qui convient le mieux. L’analyse bactériologique doit s’accompagner d’une analyse cytologique de ce même liquide pour une interprétation optimale des résultats obtenus (voir tableau 1).
Il est possible d’effectuer des prélèvements de liquides respiratoires en vue d’une analyse microbiologique dans différents cas de figure : signes cliniques témoins d’un syndrome fébrile tels qu’une hyperthermie associée à la présence de jetage, signes cliniques non spécifiques tels que la toux, pas de signes cliniques (cheval non performant, par exemple).
Deux techniques sont possibles pour effectuer un prélèvement trachéal : par voie transtrachéale ou via l’endoscope. Ces deux méthodes sont comparables, à condition d’utiliser un cathéter protégé qui permet la réalisation d’un prélèvement stérile, comme le cathéter Emac 800® de Mila (R.M. Christley et coll., 1999). L’envoi au laboratoire doit se faire en plaçant le liquide de prélèvement dans un tube sec pour l’analyse bactériologique et/ou virologique (sous couvert du froid) et dans un tube EDTA pour l’analyse cytologique. Les prélèvements sont à envoyer dans les meilleurs délais au laboratoire (voir photos 1).
La recherche de virus par polymerase chain reaction (PCR) peut se faire à partir de prélèvements respiratoires, notamment d’écouvillons naso-pharyngés, de liquide de lavage trachéal et, dans une moindre mesure, de liquide de lavage broncho-alvéolaire (voir tableau 1).
Il a été mis en évidence que les herpèsvirus (EHV-1, 2, 4, 5) et le virus de la grippe peuvent être détectés pendant vingt et un jours postinfection par PCR sur les lavages trachéaux (G.A. Sutton et coll., 1997).
La cytologie doit compléter, si possible, l’analyse virologique. Dans un lavage broncho-alvéolaire normal, sont présents 60 à 80 % de macrophages, peu ou pas d’hémosidérophages, 20 à 40 % de lymphocytes, peu de neutrophiles (moins de 5 à 10 % selon la technique utilisée), peu de mastocytes (moins de 2 %) et pas d’éosinophiles. Les cellules épithéliales peuvent être incluses ou non dans le nombre de cellules. Il convient alors de parler de nombre total de cellules nucléées lorsque les cellules épithéliales sont incluses, ou de nombre total de leucocytes lorsqu’elles ne sont pas incluses dans ce compte.
Ainsi, selon G. Fortier et coll. (2009), la présence d’anomalies des cellules épithéliales (ciliocytophtorie et/ou d’anomalies des cellules épithéliales exfoliées) dans le liquide de lavage broncho-alvéolaire est significativement associée à la détection d’herpèsvirus (EHV-2 et 5). Dans le lavage trachéal, la présence d’EHV-2 est, quant à elle, associée à une augmentation du nombre de neutrophiles.
Plusieurs paramètres peuvent influer sur l’interprétation de la cytologie du lavage broncho-alvéolaire. Tout d’abord, la technique utilisée, notamment le volume total de solution de NaCl infusée (plus la quantité est importante et plus le taux “normal” de neutrophiles diminue). Puis le stade d’entraînement du cheval : les chevaux à l’entraînement “intensif” ont plus de neutrophiles que ceux qui effectuent des exercices d’endurance. Enfin, le moment de prélèvement par rapport à l’exercice : les neutrophiles sont en quantité plus importante lorsque le prélèvement est effectué après l’effort.
L’interprétation repose sur trois critères.
• Critère qualitatif : quelles bactéries ?
De nombreuses bactéries sont présentes physiologiquement dans la trachée et font partie de la flore respiratoire normale du cheval. Elles peuvent donc être considérées comme des agents pathogènes communs ou comme des contaminants potentiels (voir tableau 2, E. Richard et coll., 2009a).
• Critère quantitatif : combien de bactéries et de colonies bactériennes différentes ?
Tant que le nombre de bactéries est inférieur à 103 ou 105 cfu/ml, le résultat n’est pas considéré comme significatif, quelle que soit la bactérie. Lorsqu’il y a plus de trois colonies bactériennes présentes en nombre important, la possibilité qu’il s’agisse d’une contamination est à envisager. Il faut alors interpréter avec précaution les résultats.
• Résultat bactériologique : quand le considérer comme significatif ou non ?
L’analyse cytologique du lavage trachéal permet d’interpréter au mieux la bactériologie. Le nombre de neutrophiles permet, par exemple, de mettre en évidence l’existence d’une inflammation associée à la présence de bactéries. La présence de macrophages activés, de bactéries libres (voir photo 2), de cellules squameuses ou ciliées anormales (cyliocytophtorie) est également un critère qui permet d’interpréter la bactériologie d’un liquide respiratoire. Un lavage trachéal doit normalement contenir moins de 20 % de neutrophiles. Au-delà de cette valeur, une inflammation est présente et il est alors possible de parler de syndrome d’inflammation trachéale (voir photo 2).
Une étude menée par E. Richard et coll. (2009b) a permis de comparer les liquides trachéaux chez cinquante-cinq chevaux, témoins sains versus atteints d’une maladie inflammatoire des voies respiratoires profondes (MIVRP). Parmi les chevaux du groupe “contrôle”, 36 % présentaient un liquide de lavage trachéal stérile et 12 % des bactéries telles que Streptococcus equi zooepidemicus, Actinobacillus equuli, Pasteurella spp (1 000 à 4 000 cfu/ml). Pour ces chevaux, il n’y avait aucune répercussion clinique. Parmi ceux du groupe MIVRP, 36 % présentaient un liquide de lavage stérile et 14 % des bactéries telles que Streptococcus equi zooepidemicus, Actinobacillus equuli et Pasteurella spp (50 000 à 10 millions cfu/ml). Au vu du nombre de bactéries et de l’inflammation associée, ces résultats sont significatifs. L’infection associée à l’inflammation avait une répercussion clinique chez ces chevaux.
Il existe une relation entre inflammation et infection bactérienne qui évolue avec l’âge des chevaux. Une étude menée chez des galopeurs, sur cent trente-cinq lavages trachéaux, a permis de mettre en évidence que chez ceux atteints d’une inflammation trachéale importante, mise en évidence par l’analyse cytologique du lavage trachéal, la proportion de lavages stériles était plus faible chez les chevaux de deux ans (22 %) par rapport à ceux de trois et quatre ans (respectivement 56 et 52 % de liquides stériles, P.Chapman et coll., 2000).
Une autre étude a permis de mettre en évidence l’association entre une affection respiratoire et des infections virales et bactériennes chez des chevaux. Cette étude longitudinale, menée chez cent quarante-huit chevaux pendant trente-huit mois, a permis de mettre en évidence qu’il existait une association entre l’inflammation des voies respiratoires et la présence de bactéries telles que S. pneumoniae, S. zooepidemicus, Actinobacillus spp, indépendamment d’une infection virale préalable. Elle a également montré que l’incidence de l’inflammation et de l’infection bactérienne diminuait avec l’âge (J.L.N. Wood et coll., 2005).
Une étude australienne a mis en évidence que la toux chez le cheval pouvait être associée à la présence de bactéries telles que S. zooepidemicus, Pasteurella, B. bronchiseptica en nombre supérieur à 104 cfu/ml. Toutefois, dans cette étude, une forte majorité (58 %) des chevaux tousseurs chroniques présentaient également des bactéries en quantité non significative, c’est-à-dire inférieure à 103 cfu/ml (R.M. Christley et coll., 2001).
Les mycoplasmes sont impliqués dans 1 à 2 % des pneumonies infectieuses (J.L.N. Wood et coll., 1997). Ils sont donc rares, mais toujours significatifs quand ils sont présents. Par ailleurs, les moisissures peuvent également être impliquées dans la pathologie respiratoire du cheval. Ce sont néanmoins rarement les agents pathogènes rencontrés en première intention.
En résumé, la première étape pour réaliser un prélèvement de qualité est d’effectuer un bon examen clinique. Il permet d’orienter le diagnostic, de savoir ce qui est suspecté, donc d’orienter vers le prélèvement à effectuer et l’analyse à demander au laboratoire. Ces examens complémentaires permettent l’obtention de résultats et non d’un diagnostic. Ils sont toutefois d’une grande aide pour le vétérinaire praticien afin de préciser le diagnostic clinique et d’instaurer un traitement. Ces examens sont accessibles à tous et sont réalisables facilement sur le terrain. Ne les négligeons pas…
Retrouvez la bibliographie complète de cet article sur le site WK-Vet.fr, rubrique “Semaine Vétérinaire”, puis “Compléments d’articles”.
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