La question du lien entre hypothyroïdie et troubles du comportement reste ouverte - La Semaine Vétérinaire n° 1421 du 15/10/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1421 du 15/10/2010

Endocrinologie canine

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Maylis Roizard*, Thibault Segonzac**

La supplémentation en lévothyroxine permettrait de traiter certains de ces troubles.

Notre consœur Valérie Dramard, comportementaliste, cherche depuis quinze ans un lien entre les troubles du comportement et l’hypothyroïdie. A l’occasion de la sortie de son ouvrage sur le sujet (voir encadré), une table ronde a été organisée par les éditions du Point Vétérinaire autour de nos confrères Juan Hernandez (praticien au CHV Frégis à Arcueil, diplomate de l’Acvim), Dan Rosenberg (maître de conférences, unité de médecine, ENV d’Alfort) et François Garnier (professeur de biochimie à VetAgro Sup).

Le débat est lancé avec la définition de l’hypothyroïdie. Pour Dan Rosenberg, elle se définit comme « un ensemble de symptômes associés à une incapacité des glandes thyroïdiennes à sécréter les hormones, souvent en raison d’une destruction de ces glandes ». François Garnier insiste sur la difficulté du diagnostic, face à des signes variés et des examens complémentaires pas toujours conclusifs. Si l’hypothyroïdie classique est définie par un certain nombre de symptômes reconnus par l’ensemble de la profession, il précise qu’il n’est « pas fermé à d’autres signes cliniques, notamment des troubles du comportement autres que l’apathie, qui pourraient être acceptés comme des signes d’hypothyroïdie ». C’est cette hypothèse que soulève Valérie Dramard : « Mon expérience m’a permis de constater que, chez des chiens qui souffrent de problèmes du comportement et ne répondent pas aux psychotropes classiques, la lévothyroxine agit(1). » « Les premières améliorations, tant sur le plan physique que comportemental, sont apparues au bout d’une à deux semaines de traitement seulement », souligne-t-elle.

Un constat qui reste à vérifier scientifiquement

Si Juan Hernandez convient qu’un certain nombre de troubles du comportement semblent s’améliorer avec la lévothyroxine, il émet une réserve : « Ces chiens peuvent souffrir de troubles comportementaux sans être hypothyroïdiens. » Dan Rosenberg nuance toutefois le constat, dont il considère qu’il n’est pas aujourd’hui scientifiquement validé. François Garnier concède cette absence de consensus universitaire, mais valide l’hypothèse émise par Valérie Dramard. Son étude(1) a en effet été réalisée sur de jeunes chiens (deux à trois ans), alors que les signes cliniques associés à l’hypothyroïdie sont classiquement décrits plus tard (cinq à six ans). Ces signes comportementaux pourraient être des manifestations primaires d’insuffisance thyroïdienne, et la supplémentation en lévothyroxine permettrait ainsi de mettre en évidence une hypothyroïdie en cours de développement.

Peu d’effets secondaires à court terme lors de supplémentation

Valérie Dramard pose alors à ses confrères la question des risques éventuels que pourrait engendrer la prise de lévothyroxine. « La présence de maladies intercurrentes comme l’insuffisance cardiaque, qui pourrait être décompensée par le traitement, est un facteur de risque. Une hypertension artérielle systémique, provoquée par une maladie rénale par exemple, induit aussi un risque non négligeable », répond Juan Hernandez. Mis à part ces situations, les intervenants s’accordent sur le fait qu’il y a peu d’effets secondaires à court terme, et surtout peu d’effets non réversibles. L’utilisation d’une dose “conservatrice” de 10 µg/kg, matin et soir, permet de limiter les effets secondaires, même chez des animaux qui ne présentent pas d’hypothyroïdie, ajoute Juan Hernandez. Cependant, Dan Rosenberg, rejoint sur ce point par François Garnier, souligne que « même si les hormones thyroïdiennes ont une fenêtre thérapeutique assez large, il reste primordial de traiter la bonne maladie avec le bon médicament ».

Quant à la question de savoir s’il existe des risques associés à un traitement sur le long terme, les réponses sont peu nombreuses pour le moment, constate Dan Rosenberg.

Le traitement mis en œuvre par Valérie Dramard est de 20 à 25 µg/kg, une fois par jour, de préférence le matin. « J’effectue un suivi à une semaine, puis à quinze jours. Si le traitement fonctionne, je l’arrête pendant un temps. » Pour François Garnier, il faudrait une échelle de temps beaucoup plus longue pour permettre d’objectiver cette réponse au traitement, mais aussi des essais sur un nombre de chiens plus élevé, divisés en plusieurs lots : certains seraient traités avec de la lévothyroxine, d’autres avec un traitement différent (à visée comportementale), et d’autres encore recevraient un placebo. De nombreuses questions restent donc en suspens.

  • (1) Voir La Semaine Vétérinaire n° 1373 du 25/9/2009, pp. 38-39 : « La lévothyroxine traite certains troubles du comportement ».

  • Ed. Point Vétérinaire, 140 p., 39 €.

A VOIR

La table ronde est visible via le lien suivant : http://www.wk-vet.fr/librairie/html/thyroide/thyroide.html

A LIRE

Troubles du comportement chez le chien. Et si c’était la thyroïde ?

Selon Valérie Dramard, de nombreux cas de troubles du comportement chez le chien pourraient être associés à une hypothyroïdie. Avec ce livre, elle souhaite partager son expérience à travers la description de cas cliniques. Cet ouvrage propose des pistes de réflexion et de traitement. Y sont aussi posées les questions qui émergent sur les facteurs à l’origine de l’hypothyroïdie canine.

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