A Darjeeling, la rage ne passera plus par les chiens des rues - La Semaine Vétérinaire n° 1423 du 29/10/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1423 du 29/10/2010

Inde

Éclairage

INTERNATIONAL

Des associations stérilisent et vaccinent les animaux errants dans le pays le plus touché au monde par cette zoonose

Darjeeling, paradis des amateurs de thé et de beaux paysages : dans cette “station climatique”, à plus de 2 000 m d’altitude, les touristes, indiens et étrangers, fuient la torpeur de la plaine pour profiter d’un panorama à couper le souffle sur l’Himalaya et le Khangchengdzonga (troisième plus haut sommet du monde) qui culmine à quelques dizaines de kilomètres de là.

Dans ces montagnes œuvrent en parallèle deux refuges séparés l’un de l’autre par deux heures et demie de route : le Darjeeling Goodwill Animal Shelter (DGAS) et le Kalimpong Animal Shelter (KAS). Leur rôle est simple : attraper, stériliser, vacciner contre la rage… puis relâcher trois jours plus tard les chiens errants, principalement les femelles. Pourquoi elles en priorité ? Car un seul mâle peut saillir un grand nombre de femelles. Or, attraper tous ces chiens errants, donc souvent sauvages, se révèle impossible : prendre le risque de laisser errer un ou deux mâles non stérilisés rendrait l’action inutile. A l’inverse, opérer une majorité de femelles permet de limiter le nombre de naissances et ainsi de stabiliser la population d’une zone donnée.

La technique opératoire permet de stériliser un animal en 6 min

Ainsi, plusieurs fois par semaine, les employés des refuges partent à 6 h du matin attraper les animaux errants, entre trois et quinze selon le succès de l’opération. Ils les appâtent avec des biscuits puis les capturent, soit à main nue pour les individus apprivoisés, soit au lasso pour les plus craintifs, avant de les mettre dans le coffre de la voiture, transformé en cage. Ils reviennent au refuge vers 9 h, puis préparent les instruments et les locaux, et vers 10 h, les stérilisations commencent. Six ou sept chiennes sont ovario-hystérectomisées par heure ! La cadence est rapide, la technique précise et bien rodée. Pendant que le vétérinaire opère avec l’aide d’un assistant (permettant ainsi de stériliser une chienne en moins de six minutes, suture comprise, par le flanc droit), le reste de l’équipe prépare le chien suivant : anesthésie, perfusion, vaccination antirabique, injection de méloxicam et d’antibiotique. Une “encoche” est réalisée à l’oreille pour identifier les individus opérés.

En deux ou trois heures, toutes les chiennes sont stérilisées et placées dans des cages individuelles dès leur réveil. Elles y resteront trois jours, le temps du suivi postopératoire immédiat, puis seront relâchées sur leur lieu de capture.

Ces campagnes, et plus globalement l’activité des refuges, sont entièrement financées par des structures caritatives : One Voice (association française basée à Nantes) assiste entièrement le DGAS, tandis que le KAS est soutenu par sept associations différentes, dont Animaux Secours, en Haute-Savoie.

Les refuges ont un rôle de centres de référés pour la région

Mais l’activité des refuges ne se borne pas aux campagnes de stérilisation et de vaccination antirabique. Ce sont également des centres de soins gratuits pour tous les animaux, amenés par leurs propriétaires ou des soigneurs (dans le cas d’un chien errant, par exemple).

Le vétérinaire et son équipe soignent alors des chiots atteints de parvovirose, des adultes qui vomissent, des chats à l’œil crevé… mais également des vaches (mammites, faiblesse générale), des chèvres et même les rares chevaux de la région. Cette médecine est assez basique et fortement limitée, tant dans les moyens diagnostiques (aucun examen complémentaire disponible) qu’en termes de traitements, qui sont pour certains trop coûteux pour le refuge, comme les lotions auriculaires ou les antiparasitaires.

Le problème est identique, voire pire dans les cabinets vétérinaires classiques, où au manque de moyens s’ajoute une flagrante carence de connaissances, et parfois même de morale. Ainsi, nombre de vétérinaires n’hésitent pas à vendre (souvent à prix d’or) des vaccins périmés ou dont la chaîne du froid a été longuement interrompue, ou à refuser de soigner un animal parce qu’ils ne savent pas poser une perfusion sur un berger allemand !

La situation est différente pour les refuges, car l’émulation provoquée par les interventions fréquentes de vétérinaires occidentaux et le statut de salarié des employés, y compris du vétérinaire en charge, incitent ces derniers à donner le meilleur d’eux-mêmes pour soigner au mieux les animaux. C’est pourquoi, malgré le manque de moyens, les refuges sont considérés comme des centres de “référés” dans la région, et que leurs campagnes de stérilisation portent leurs fruits : la situation est stabilisée depuis plusieurs années à Kalimpong, et la majeure partie des chiens apprivoisés ont été opérés à Darjeeling. Dans ces deux villes, la rage est donc sous contrôle, le nombre de chiens enragés est de moins de deux par an. A Kalimpong, il n’y a eu aucun décès humain dû à la rage dans les zones “assainies” par le KAS.

Les deux refuges montrent qu’avec de la volonté et des moyens modestes, il est possible d’endiguer la rage en Inde, pays le plus touché au monde par ce fléau. Malheureusement, cet exemple peine à être suivi, pour des raisons financières en premier lieu, mais également politiques, car la question de la rage est loin d’être une priorité pour le gouvernement.

POUR EN SAVOIR PLUS

Pour plus de détails, rendez-vous sur le blog consacré à cette mission : http://indiavet.canalblog.com

Pour voir une vidéo d’une stérilisation de chienne au refuge : http://www.youtube.com/watch?v=XsP1DL4CS1g

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