L’état de choc chez le chat présente des particularités - La Semaine Vétérinaire n° 1432 du 07/01/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1432 du 07/01/2011

Réanimation

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Sophie Bureau

L’oxygénation, le remplissage vasculaire, le réchauffement actif et la régulation de la glycémie sont les éléments clés d’une réanimation efficace chez le chat.

L’état de choc se caractérise par un état d’hypoxie tissulaire généralisé, consécutif à une défaillance circulatoire aiguë. La finalité de la réanimation est de rétablir l’apport d’oxygène aux cellules grâce à une oxygénothérapie et à une prise en charge adaptée de la défaillance circulatoire. Quatre composantes physiopathologiques distinctes peuvent être à l’origine de celle-ci, selon que le processus est hypovolémique, vasogénique, cardiogénique ou obstructif (voir tableau 1). Il n’est pas rare que plusieurs d’entre elles coexistent lors de la survenue ou de l’évolution d’un état de choc, compliquant alors la réanimation. Leur identification conditionne la stratégie à mettre en œuvre.

Ainsi, lors de choc hypovolémique ou vasogénique, la pression veineuse centrale apparaît basse et s’objective cliniquement par une veine jugulaire vide, même sous compression. La réanimation doit alors assurer un remplissage vasculaire massif. A contrario, les chocs cardiogénique et obstructif s’accompagnent d’une pression veineuse centrale élevée, qui se traduit cliniquement par l’observation d’une veine jugulaire turgescente. Le volume perfusé doit alors être modéré. Dans ce cas, la mise sous perfusion est conduite avec une extrême prudence, et peut même être contre-indiquée.

L’hypoxie et l’acidémie lactique sont responsables de deux graves syndromes

L’hypoxie contraint les tissus à fonctionner en anaérobiose. Il s’ensuit une perte des fonctions cellulaires, puis une nécrose tissulaire responsable d’une défaillance multiviscérale (reins, foie, poumons, cœur, intestin, sang, systèmes nerveux autonome et central), également connue sous le nom de “syndrome de défaillance multi-organique” (ou multi organic dysfunction syndrome, MODS). Parallèlement, la mise en place d’une acidémie lactique induit l’activation d’une cascade inflammatoire responsable, à son tour, d’un phénomène appelé “syndrome de réponse inflammatoire systémique” (ou systemic inflammatory response syndrome, SIRS). Les syndromes de défaillance multi-organique et de réponse inflammatoire systémique peuvent conduire à la mort de l’animal.

Le temps de remplissage vasculaire ne peut généralement pas être évalué

Dans l’espèce féline, un état de choc se manifeste cliniquement par une hypotension, souvent associée à une bradycardie (fréquence cardiaque inférieure à 120 battements par minute) et à une hypothermie, parfois sévère, mais sans valeur pronostique péjorative comme chez le chien. L’hypotension ne présente pas non plus de caractère pronostique bien établi dans l’espèce féline. Toutefois, en raison de la vasoconstriction périphérique, le temps de remplissage vasculaire n’est généralement pas évaluable. Une bradypnée et une douleur abdominale diffuse liée à une hypoperfusion du foie peuvent également être constatées.

Les analyses sanguines mettent souvent en évidence une hypoglycémie d’emblée intense, une hypotension, une hypoalbuminémie, une hyperbilirubinémie modérée et une légère augmentation des phosphatases alcalines. Cependant, l’hypoglycémie ne doit pas faire renoncer à initier une réanimation active.

La recherche de dysfonctionnements organiques (rénal, hépatique, sanguin, pulmonaire, cardiaque) participe à l’établissement du pronostic. Les critères permettant d’envisager un syndrome de réponse inflammatoire systémique sont également différents dans cette espèce. Les paramètres à évaluer sont la température, les fréquences cardiaque et respiratoire, et la formule leucocytaire. Il convient d’en objectiver au moins trois sur quatre pour confirmer la présence de ce syndrome (voir tableau 2).

Lors de choc hypovolémique, l’injection par bolus est préférée à la perfusion

La réanimation doit permettre une bonne oxygénation, et rétablir la volémie et l’équilibre hydroélectrique. Des injections par bolus répétés (remplissage vasculaire par titration) sont à privilégier lors de la correction. Leur nombre, leur volume et leur rythme sont adaptés en fonction de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle. En revanche, une perfusion continue est instaurée dès lors que l’on intervient dans le cadre d’une prévention ou d’un entretien (voir encadré). Notons que la petite taille des chats non cardiaques ne les prédispose pas plus que les chiens aux œdèmes pulmonaires.

Ne réchauffer l’animal qu’une fois le remplissage vasculaire réalisé

Certains médicaments, comme les morphiniques, sont administrés si nécessaire. L’animal n’est réchauffé qu’une fois le remplissage vasculaire effectué afin d’éviter une vasodilatation périphérique délétère. L’augmentation de la température corporelle recherchée est de 1 °C par heure. La correction de l’hypoglycémie doit être progressive, car cette dernière, comme l’hyperglycémie, représente un facteur de mortalité. Elle vise à éviter les à-coups, et une perfusion continue lente est ainsi préférée à des bolus de glucose hypertonique. La kaliémie est vérifiée parallèlement. Les effets recherchés et indésirables sont constamment évalués.

L’oxygénation, le remplissage vasculaire, le réchauffement actif, ainsi que la régulation de la glycémie constituent les éléments clés d’une réanimation efficace chez le chat en état de choc. Ceux-ci sont malheureusement trop souvent négligés.

Stratégie de remplissage vasculaire chez le chat en état de choc

Stratégie de prévention

• Début : NaCl 0,9 % ou Ringer lactate à raison de 2 à 5 ml/kg/h.

• Après stabilisation clinique : entretien avec un mélange équivolumique de glucose 2,5 % et de NaCl 0,45 % à la dose de 2 à 2,5 ml/kg/h.

Stratégie de correction

En cas d’hémorragie non contrôlée ou de lésion pulmonaire chez un chat atteint d’une affection cardiaque

• Début :

– NaCl 0,9 % (bolus de 2 à 4 ml/kg) ;

– puis réchauffer activement jusqu’à obtenir une température supérieure à 37,5 °C.

• Mesure de la pression artérielle systolique

Si elle est supérieure à 70 mmHg :

– NaCl 0,9 % : perfusion continue à la dose de 2 à 2,5 ml/kg/h en maintien ;

– après quelques heures : mélange équivolumique de glucose 2,5 % et de NaCl 0,45 % à raison de 2 à 2,5 ml/kg/h.

Si elle est inférieure à 70 mmHg :

– réaliser une titration avec un vasopresseur et un inotrope jusqu’à obtenir une pression artérielle systolique supérieure à 70 mmHg.

En cas d’hémorragie non contrôlée ou de lésion pulmonaire chez un chat sans affection cardiaque

• Début : isotonique salé (bolus de 10 à 15 ml/kg) et colloïde (bolus de 2 à 5 ml/kg).

• Mesure de la pression artérielle systolique

Si elle est supérieure à 40 à 60 mmHg :

– réchauffer activement pour une température supérieure à 37,5 °C ;

– NaCl 0,9 % : perfusion continue à la dose de 2 à 2,5 ml/kg/h en maintien ;

– après quelques heures : entretien avec un mélange équivolumique de glucose 2,5 % et de NaCl 0,45 % à raison de 2 à 2,5 ml/kg/h.

Si elle est inférieure à 40 à 60 mmHg :

– refaire une titration avec un bolus de colloïde de 1 à 2 ml/kg jusqu’à obtenir une pression artérielle systolique supérieure à 40-60 mmHg.

S. B.

CONFÉRENCIER

Patrick Verwaerde, maître de conférences à l’ENV de Toulouse.

Article rédigé d’après la conférence « Etats de choc : les particularités du chat », présentée lors du congrès du chat d’Arcachon, organisé par la section Aquitaine de l’Afvac, en mai 2010.

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