Diagnostic à distance
Formation continue
FAUNE SAUVAGE
Auteur(s) : Norin Chai
Fonctions : responsable du service vétérinaire à la ménagerie du Jardin des plantes à Paris
Cette technique permet d’apprécier les gradients thermiques des surfaces corporelles sans contact avec l’animal et sans entraînement.
La thermographie infrarouge est une technique d’imagerie non invasive qui n’exige aucune manipulation ou immobilisation de l’animal. Elle permet une évaluation qualitative des symétries et des asymétries des gradients de température des surfaces corporelles, et d’observer ainsi leurs fluctuations selon les processus métaboliques, physiologiques ou pathologiques. Cette technique diagnostique moderne fournit des images en temps réel. Ces dernières sont d’autant plus intéressantes que les dérèglements vasculaires apparaissent souvent avant les perturbations anatomiques.
Dès les années 60, des applications sont décrites dans la recherche médicale. Depuis, ce procédé a prouvé sa pertinence dans le diagnostic, entre autres, des douleurs lombosacrées et du cou, des lésions traumatiques diverses et de la colonne vertébrale, des effets latéraux des brûlures, des maladies cardiovasculaires (notamment dues à des défauts d’irrigation).
En médecine vétérinaire, la thermographie a surtout trouvé des applications en pratique équine (dès les années 60 également) et en pathologie du bétail : diagnostic des boiteries chez les bovins et les chevaux, évaluation de la fertilité des taureaux et des béliers, diagnostic de gestation chez les juments, suivi des chaleurs chez les vaches laitières, évaluation des effets du marquage des bovins au fer ou par cryomarquage. Plus récemment, une étude a montré l’intérêt de la thermographie dans le monitoring de la vascularisation de la rate à la suite de splénectomies partielles chez le porc. En élevage aviaire, la thermographie permet d’évaluer le confort thermique dans un poulailler et d’effectuer des screening afin de rechercher des pododermatites subcliniques. K. Eulenberger et P. Kämpfer(1) ont été les premiers à recourir à ce procédé chez les animaux sauvages.
La thermographie offre un premier examen instantané et non invasif, sans contact avec l’animal et sans entraînement. Mieux, l’analyse du sujet en mouvement est possible. Celle-ci peut être effectuée sur la totalité du corps et, surtout, être comparée avec celle d’autres spécimens dans le même enclos qui présentent un stade physiologique a priori semblable. En plus du screening, la thermographie permet un monitoring simple de quelques paramètres (suivi de gestation, évolution d’une inflammation localisée, etc.. Les thermographes sont des appareils légers et compacts qui offrent une mobilité aux cliniciens.
Pour une bonne pratique, il est nécessaire de connaître préalablement les modèles normaux des spécimens à analyser. Excepté lorsque les plages thermiques observées sont évidentes, le praticien doit d’abord s’habituer à comprendre les images thermiques normales, aussi bien dans des conditions stables que dans des situations dynamiques (dues aux fluctuations environnementales). Une banque de données doit, par conséquent, être disponible ou connue afin de prétendre obtenir des éléments objectifs susceptibles de constituer une valeur de diagnostic. Le vétérinaire de zoo doit ainsi être au fait des spécificités d’un grand nombre d’espèces avant de faire de la thermographie un usage routinier. L’absence d’une salle d’examen, où tous les paramètres environnementaux seraient maîtrisés, est un inconvénient indéniable de la méthode. Aussi, du moins dans les premiers temps, les analyses thermographiques s’effectuent en enclos, où les paramètres sont stables. En général, il convient de laisser l’animal s’habituer à son environnement au moins deux heures avant l’analyse. De plus, il doit être sec et propre (absence de boue, par exemple) afin d’éviter tout artefact. Le recours à la thermographie se limite aux bêtes à poils court ou à certaines parties du corps (articulations, membres, tête, abdomen).
La première application est le diagnostic des processus inflammatoires, à un stade relativement précoce. La chaleur générée via les réactions biochimiques des médiateurs est irradiée à la surface corporelle. La lésion et/ou les tissus impliqués sont d’autant plus faciles à localiser qu’ils sont superficiels ou de grande taille : cela s’avère intéressant chez un animal qui présente une fatigabilité générale sans autre symptôme. La thermographie a permis de diagnostiquer une inflammation de l’épaule à la suite d’un traumatisme chez un éléphant présentant un tel tableau clinique. Chez un autre pachyderme, une inflammation de l’articulation de la hanche et du genou droits, sans signes de boiterie, a expliqué une léthargie chronique. Ces lésions étaient dues à des conditions environnementales inadéquates : l’animal ne pouvait se coucher que d’un seul côté. La thermographie a en outre permis le suivi de gestation chez plusieurs espèces : éléphants, rhinocéros, girafes, zèbres et, récemment, pandas géants.
Il existe peu d’informations relatives à la thermorégulation et à son contrôle chez les animaux de parc zoologique. Quelques auteurs l’ont exploré chez un nombre limité d’espèces de mammifères et d’oiseaux. La thermorégulation est importante chez les animaux sauvages. Un inconfort (stress) thermique (environnement trop chaud ou trop froid) peut se révéler, à long terme, néfaste pour l’animal. Dans certains cas, il est objectivable grâce à la thermographie : chez l’éléphant, par exemple, les échanges thermiques sont visibles au niveau des oreilles. Un inconfort thermique est mis en évidence si celles-ci sont plus chaudes que le corps (normalement, c’est l’inverse).
En outre, le champ d’application en recherche est vaste. Récemment, une étude chez le cerf mulet a démontré l’intérêt de la thermographie dans la détection des spécimens suspects de fièvre aphteuse dans un contexte épizootique de cette maladie virale.
(1) La biblographie de cet article est disponible sur le site WK-Vet.fr, rubrique “Semaine Vétérinaire”, puis “Compléments d’article”.
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