L’INTERNAT, DOUZE MOIS AVANT LE GRAND SAUT DE L’EXERCICE LIBÉRAL - La Semaine Vétérinaire n° 1453 du 03/06/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1453 du 03/06/2011

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Auteur(s) : Agnès Faessel

Depuis bientôt dix ans, les écoles vétérinaires accueillent et forment des internes. Une année de formation polyvalente et intensive pour acquérir une autonomie de travail, mais qui nécessite un fort investissement personnel et financier. Les internes diplômés sont des praticiens opérationnels, une qualité parfois méconnue de leurs futurs employeurs, ce qui nuit à la valorisation de leur formation.

Ancien interne de l’école vétérinaire de … » Que signifie ce titre et qui a le droit de s’en prévaloir ? L’internat vétérinaire est encadré par la législation depuis 2001 (voir encadré). C’est une formation de troisième cycle, d’une durée d’un an, qui vise à approfondir les connaissances générales en médecine et chirurgie vétérinaires. Il s’agit donc d’une formation complémentaire clinique généraliste, organisée aujourd’hui autour de trois groupes d’espèces : les animaux de compagnie, les équidés ou les ruminants. Cette formation, diplômante, est dispensée par les écoles vétérinaires.

L’internat, prolongement direct des études vétérinaires

En pratique, ce sont surtout des étudiants de dernière année qui postulent pour suivre un internat vétérinaire. Leur objectif est de compléter leur formation d’un point de vue essentiellement pratique, dans la discipline qu’ils ont choisi d’exercer. Quelques candidats sont parfois de jeunes diplômés qui possèdent une courte expérience de terrain, mais ils restent peu nombreux. D’autres entament l’internat dans l’objectif de se spécialiser : c’est en effet un prérequis pour le résidanat, qui prépare au board (spécialisation organisée par les collèges européens). Certains d’entre eux se destinent alors plutôt à une carrière universitaire. Les internats français sont également ouverts aux vétérinaires étrangers, sous réserve de l’obtention de l’équivalence de diplôme.

Les internes sont devenus incontournables dans les écoles vétérinaires, nécessaires au bon fonctionnement des cliniques et hôpitaux. Mais de leur côté, que viennent chercher ces jeunes confrères, durant une année supplémentaire à l’école, s’ils se destinent à la pratique de terrain ? Ce n’est pas pour achever leur thèse, puisque les candidats doivent l’avoir déjà soutenue (à défaut, avoir obtenu le permis d’imprimer). C’est parfois pour rester un an de plus dans l’établissement, le temps que leur ami(e), d’une autre promotion, achève ses études (véridique, mais anecdotique)… C’est surtout pour mieux se préparer à l’exercice libéral et obtenir d’emblée le poste qui les intéresse, dans une clinique bien équipée ou en clientèle équine pure, par exemple. Les praticiens qui les embauchent doivent savoir qu’ils recrutent une personne qualifiée et opérationnelle, capable de travailler de manière autonome. Les affections et les gestes pratiques les plus courants sont maîtrisés.

Une formation à l’encadrement et à l’esprit critique

L’internat se déroule dans la clinique ou le centre hospitalier de l’école, et éventuellement au seindesstructuresextérieurespartenaires. L’interne est intégré par rotation successive dans chaque service (médecine, chirurgie, reproduction, etc.). Il est associé à la gestion des cas durant toute la démarche diagnostique et thérapeutique. Mais il prend part également à l’encadrement et à la formation des étudiants vétérinaires en clinique. Une expérience de la pédagogie et du travail en équipe qu’il pourra mettre à profit en clientèle libérale, dans ses rapports avec les propriétaires notamment.

Les internes bénéficient d’une formation spécifique, théorique et pratique (séances de travaux dirigés et pratiques, participation à des congrès, etc.). Ils prennent aussi l’habitude d’exploiter les ressources bibliographiques, pour s’auto-former, pour documenter un cas, mais aussi pour aiguiser leur esprit critique face aux données d’une nouvelle publication, d’une étude sur un nouveau médicament, etc. Ils sont aussi sensibilisés à l’evidence-based medicine, ou médecine par les preuves.

Leur évaluation porte d’ailleurs aussi sur cet aspect : outre la vérification des compétences acquises (scientifiques, cliniques et pratiques), l’interne devra présenter plusieurs exposés dans l’année (cas ou synthèses cliniques, par exemple). La rédaction d’un article publiable dans une revue scientifique ou professionnelle est également encouragée, voire imposée.

Depuis la mise en place de l’internat vétérinaire, raressontceuxquin’ontpasobtenuleur diplôme. Les quelques échecs recensés ont plutôt découlé d’un défaut de savoir être (non-respect des consignes, retards récurrents, etc.) que de savoir-faire. Ils sont évités par un suivi régulier des internes, qui vise à redresser la barre si besoin.

Ce suivi veille d’autre part à leur apporter un soutien. Car cette année d’études est particulièrement éprouvante. Elle demande une présence assidue en clinique, puisque les internes sont associés aux services d’hospitalisation, de garde et d’urgences. Et les étudiants se réservent aussi une grande disponibilité pour leur formation et leurs recherches personnelles. Au final, cela représente plus qu’un plein temps.

L’occasion de changer d’école, selon ses attentes personnelles

Le recrutement des futurs internes porte d’ailleurs autant sur leur niveau de connaissances que sur leur motivation et leurs qualités humaines (la capacité à travailler en équipe, par exemple). Une présélection vise d’abord à vérifier que le candidat remplit les obligations administratives. Le dossier de candidature comprend en outre les résultats des études (les notes obtenues), mais aussi une lettre de motivation et des courriers de recommandation de personnes tierces (enseignants, praticiens ayant reçu le candidat en stage, etc.). L’admission est ensuite soumise à un entretien avec un jury. Un niveau d’anglais minimal peut être requis.

Pour l’internat en clinique des animaux de compagnie, un concours commun aux quatre écoles est en place depuis 2007. Il prévoit une épreuve théorique écrite, organisée dans chaque ENV. Le format informatisé de cet examen permet de le passer depuis l’étranger, dans les facultés de Liège (Belgique) ou de Saint-Hyacinthe (Québec, Canada) notamment. Les candidats passent ensuite l’épreuve orale d’entretien avec le jury.

La mise en place de ce concours commun bénéficie aux écoles (en raison de l’harmonisation des procédures de sélection, d’une meilleure gestion de la répartition des étudiants entre établissement, de l’amélioration de l’interaction entre les internats), mais aussi aux postulants, car elle simplifie leurs démarches et évite des candidatures multiples. Le dépôt du dossier de candidature engendre néanmoins des frais de dossier (144 € cette année). Les internats d’équine de Nantes et d’Alfort organisent aussi un recrutement ensemble, qui comporte une épreuve écrite. Un concours commun aux quatre écoles pour les internats en clinique des ruminants est en outre à l’étude.

Il n’existe aucune obligation d’effectuer son internatdansl’écoledontonestdiplômé.Au contraire, le brassage des étudiants est plutôt encouragé. Changer d’école peut se révéler enrichissant, car chaque internat présente des particularités propres. Ceux en équine d’Alfort et de Nantes prévoient, par exemple, des rotations dans certains services de chacune des deux écoles, ainsi qu’au Centre d’imagerie et de recherche sur les affections locomotrices équines (Cirale) pour perfectionner ses compétences dans ce domaine. VetAgro Sup (Lyon) bénéficie de son côté d’un pôle équin particulièrement développé. A Toulouse, la clinique équine a développé un partenariat avec une structure privée voisine, dont les internes profitent lors de leur formation à la chirurgie et au traitement des urgences.

La clinique bovine d’Oniris (Nantes) travaille par ailleurs avec un réseau de vétérinaires relais, ce qui permet d’élargir la palette des cas rencontrés à l’école, notamment en pathologie de groupe ou en gestion des problèmes d’élevage. Quant à l’internat en clinique des ruminants de Lyon, il offre un contexte de formation proche du contexte libéral depuis l’acquisition de la clientèle de L’Arbresle.

Ce ne sont là que des exemples. Après renseignements, le choix de l’école est à réfléchir selon ses attentes personnelles. Lors de concours commun, les candidats précisent l’école où ils souhaitent suivre l’internat, par ordre de préférence. Leur choix est satisfait selon la place obtenue au concours.

Une année non rémunérée, au contraire de la médecine humaine

L’internat en clinique des animaux de compagnie recueille chaque année quatre-vingts à quatre-vingt-dix candidatures, pour une soixantaine de places ouvertes (soixante-deux cette année, voir tableau). Le nombre de place est bien inférieur pour les deux autres. La sélection y est toutefois moins rude, car le nombre de candidats reste inférieur, parfois même insuffisant, notamment en clinique des ruminants. La qualité de la formation de ces internats est pourtant élevée et répond au manque de pratique dans la prise en charge des grands animaux des jeunes diplômés.

Certes, l’attirance pour exercer en équine ou en rurale est actuellement plus faible que pour la pratique citadine. Mais surtout, les internats (tous les trois) souffrent du problème de l’absence de rémunération des internes. Dans les écoles, les assistants hospitaliers sont rémunérés. Mais l’année d’internat est considérée comme une année d’études et aucune rémunération n’est octroyée aux internes. De plus, ceux-ci ne peuvent pas compenser en travaillant à côté : ils n’en ont pas le temps. Suivre un internat peut donc être un projet refoulé pour des raisons financières. Il subit aussi la “concurrence” du terrain. En pratique rurale notamment,denombreuxpraticiensacceptent d’embaucher des débutants dont ils complètent eux-mêmes la formation (voir article ci-dessous).

Pour atténuer ces difficultés, les écoles s’organisent afin d’exonérer les internes des frais de scolarité. Certaines ont développé d’autres solutions, comme la prise en charge des frais de logement à Alfort. Les internes en clinique des ruminants à Lyon sont rémunérés dans le cadre d’un contrat de chauffeur (pour le transport d’animaux).

Si les internes en médecine humaine des établissements publics de santé perçoivent un salaire, le même traitement n’est pas envisagé aujourd’hui pour leurs homologues vétérinaires.

Cadre réglementaire

L’arrêté du 27 mars 2001 (modifié par ceux du 26 juin 2002 puis du 18 août 2006) fixe le cadre réglementaire des « formations conduisant aux diplômes nationaux d’internat des écoles vétérinaires ».

• Places : le nombre est fixé par le ministère de tutelle pour chaque internat.

• Candidats : étudiants de dernière année dans les ENV, titulaires du diplôme de docteur vétérinaire (diplôme d’Etat ou diplôme étranger reconnu équivalent).

• Recrutement : par voie de concours (commun aux quatre écoles pour l’internat en clinique des animaux de compagnie).

• Modalités : admissibilité sur dossier, admission sur entretien avec un jury (épreuves pratiques et/ou écrites si besoin).

• Jury d’admission : quatre enseignants-chercheurs (dont au moins un d’une autre école) et une personnalité qualifiée.

• Formation : de troisième cycle dans un domaine clinique général.

• Objectif : acquérir une expérience approfondie dans l’étude de l’élevage et de la pathologie d’une espèce (ou un groupe d’espèces) ou dans certaines disciplines (les champs disciplinaires et le programme de formation sont approuvés par le ministère de tutelle).

• Déroulement : rotation entre les différentes disciplines cliniques.

• Durée : douze mois (à temps plein).

• Evaluation : périodique et/ou terminale (contrôle des aptitudes cliniques et pratiques et des connaissances scientifiques), associée à la présentation d’au moins deux exposés.

A. F.
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