Urologie canine
Formation continue
ANIMAUX DE COMPAGNIE
Auteur(s) : Valérie Delteil
Ils reposent sur l’identification précise de l’origine du trouble, qui peut être dû à un défaut de stockage ou de vidange. 35 % des boxers femelles stérilisées sont touchées.
Lors d’une consultation pour incontinence urinaire, il convient d’écarter les pollakiuries, les stranguries, les dysuries et les polyuries en approfondissant les commémoratifs (le lieu d’élimination, le volume de prise de boisson, etc.) pour s’assurer d’une véritable élimination involontaire, avec ou sans persistance de mictions normales par ailleurs. Par définition, l’animal incontinent ne se met pas en position pour éliminer de l’urine, souvent retrouvée sur le lieu de couchage. Il existe des incontinences liées à un défaut de stockage et celles dues à un défaut de vidange (voir schéma). Les premières proviennent d’une incompétence sphinctérienne, d’un défaut de compliance vésicale ou d’un shunt de l’appareil vésico-sphinctérien, les secondes d’une atonie du détrusor, d’une hypertonie sphinctérienne ou d’un obstacle dans l’urètre ou le col vésical.
Lors d’incompétence sphinctérienne, le chien présente des mictions normales, mais aussi des pertes inappropriées d’urine en gouttes. Cette incontinence est majorée lorsque l’animal est couché (augmentation de la pression intra-abdominale). Cette affection peut être congénitale (associée ou non à une ectopie urétérale) ou acquise. Elle est dans ce cas consécutive à une stérilisation. Elle concerne 10 % des femelles, toutes races confondues (essentiellement celles de plus de 20 kg), mais est plus fréquemment observée chez les dobermanns, les bobtails, les rottweilers et chez 35 % des boxers. 75 % des incontinences postovariectomie surviennent durant les trois ans qui suivent l’acte chirurgical. Les stérilisations avant les premières chaleurs n’en induisent pas davantage, mais les symptômes sont alors souvent plus prononcés et plus réfractaires aux traitements.
La prise en charge varie selon qu’il s’agit d’un mâle ou d’une femelle. Chez les femelles, l’amaigrissement est indispensable lors de surpoids. Différentes solutions sont disponibles. L’œstriol (à base d’œstrogènes, Incurin®) est prescrit d’abord à raison de 2 comprimés par jour pendant 10 jours, puis 1 comprimé par jour durant 10 jours, puis 1 comprimé un jour sur deux. Les symptômes disparaissent dans 65 % des cas et une amélioration sans guérison totale est notée pour 22 %. Cette prescription est contre-indiquée chez les femelles impubères. Elle peut au départ provoquer des symptômes d’œstrus chez celles stérilisées.
La phénylpropanolamine (a-mimétique, Propalin®) est prescrite à la dose de 3 mg/kg/j en 2 prises quotidiennes (il n’est pas nécessaire de l’administrer en 3 prises, contrairement à ce qui est indiqué sur la notice, a précisé la conférencière). Cette molécule est contre-indiquée lors d’insuffisance rénale, de glaucome, d’hypertension ou d’insuffisance cardiaque. Elle entraîne dans certains cas des changements de comportement pendant 10 à 15 jours et des diarrhées qui ne cessent qu’à l’arrêt des médicaments. Elle est efficace 9 fois sur 10, mais il est inutile de continuer sans amélioration après 15 jours. Lors de rechute, il convient de chercher une infection bactérienne ou une maladie sous-jacente induisant une polyuro-polydipsie. Face aux accoutumances et en cas de récidive, il est conseillé de suspendre le traitement 15 jours puis de le reprendre.
Un autre α-agoniste est disponible, il s’agit de l’éphédrine (Enurace®), à raison de 2 à 5 mg/kg/j en 2 prises quotidiennes. Cette molécule renforce la contraction du sphincter et relâche le détrusor. Des rapports sur l’utilisation d’un implant hormonal à base de desloréline (Suprélorin®) montrent un intérêt dans cette indication, mais d’autres recherches doivent être menées pour confirmer cet emploi. En outre, un acte chirurgical peut être envisagé.
Chez le mâle, l’incontinence postcastration apparaît plus rapidement que chez la femelle et touche les petits comme les grands chiens. Les pertes interviennent lorsqu’ils sont couchés et il n’est pas rare de constater, associés à ces pertes, des signes d’instabilité vésicale (“mictions de joie”). Le propionate de testostérone (Androtardyl®(1)) est administré à la dose de 0,5 à 1 mg/kg, par voie sous-cutanée ou intramusculaire, 1 fois par semaine, avec comme objectif d’espacer au maximum les prises. La phénylpropanolamine est efficace dans seulement la moitié des cas.
Lors de défaut de compliance vésicale, la vessie ne se remplit pas suffisamment parce qu’elle est mal positionnée (vessie pelvienne), instable (hyperréactivité vésicale, infection et/ou inflammation chronique) ou que son volume est anormalement réduit (microvessie congénitale, tumeur ou volumineux calculs intraluminaux). Cela se traduit alors par de la pollakiurie et des “mictions de joie”, car cette incontinence est accentuée par l’excitation, mais aussi par la position couchée. Son traitement repose sur l’oxybutynine (Ditropan®(1)) à raison de 0,2 mg/kg en 2 prises quotidiennes. Il provoque parfois une sécheresse buccale. Les causes primaires (comme des calculs), l’inflammation et les infections doivent, bien entendu, être également prises en charge.
Le shunt de l’appareil vésico-sphinctérien peut être dû à une ectopie urétérale congénitale (situation la plus fréquente), une fistule postchirurgicale ou une persistance du canal de l’ouraque. Les labradors ou les golden retrievers y sont prédisposés. Les mictions sont normales, mais en dehors, les chiens perdent de petites gouttes, essentiellement lorsqu’ils se déplacent. Même lors d’ectopie bilatérale, il existe parfois un reflux urétro-vésical qui entraîne un remplissage rétrograde de la vessie, donc la possibilité de petites mictions normales. 70 % des animaux qui présentent une ectopie urétérale montrent aussi une incompétence sphinctérienne, alors aggravée en position couchée.
Les trois types de shunts se traitent en priorité par une intervention chirurgicale. Elle améliore les symptômes de 80 à 90 % des chiens et les rend parfaitement continents dans 50 à 60 % des cas. Lors d’échec ou d’impossibilité de la pratiquer, il convient d’essayer la phénylpropanolamine.
Lors de défaut de vidange, un trouble au moment de la miction est systématique : dysurie, pertes de gouttes, volume résiduel de liquide dans la vessie plus important que le volume résiduel normal, qui ne doit pas dépasser 0,2 à 0,4 ml/kg après une émission d’urine.
Ces défauts de vidange peuvent être liés à une anomalie du détrusor. Le jet est faible (il tombe à la verticale pour les mâles) lors d’hypotonie et l’animal ne se met pas du tout en position en cas d’atonie. Plusieurs origines sont possibles : myogénique (secondaire, à la suite d’une distension excessive et longue), neurogène (de type motoneurone périphérique ou central, donc toujours associée à un déficit des membres postérieurs, le chien ne se mettant pas non plus en position pour uriner), ou signe d’une dysautonomie (l’incontinence est parfois le seul symptôme, mais elle est souvent associée à un problème cardiaque ou oculo-moteur, un mégacôlon ou à de la sécheresse oculaire). Le traitement repose sur la néostigmine, le métoclopramide ou l’urécholine (5 à 75 mg/j en 3 prises quotidiennes, en gélules à demander aux écoles vétérinaires). Cette dernière molécule peut entraîner de l’hypersalivation et des troubles digestifs.
Lors d’hypertonie sphinctérienne, la miction est entrecoupée ou longue, car le tonus urétral persiste même au cours de celle-ci, et rend la vidange difficile. Elle peut être liée à une lésion de type motoneurone central (le chien ne se met alors pas en position pour uriner) ou à une dyssynergie vésico-sphinctérienne sans motoneurone central qui existe uniquement chez les mâles, principalement de grand format.
Le traitement fait appel à l’alfuzocine (Xatral®(1), 0,1 mg/kg en 2 prises quotidiennes) qui inhibe le sphincter lisse, et au dantrolène (Dantrium®(1), 3 à 5 mg/kg en 2 prises quotidiennes) qui favorise la relaxation du sphincter strié.
Lors d’obstacle, la miction est aussi entrecoupée ou longue. Cette incontinence est dite paradoxale, car au départ ces animaux sont plutôt bouchés, mais à force de se remplir, la pression vésicale peut être supérieure à l’obstacle et provoque alors une incontinence. L’obstacle est soit intraluminal (sténose, lithiase, tumeur) soit extraluminal (tumeur, fracture, syndrome prostatique, adhérences postchirurgicales). Le traitement de l’incontinence passe d’abord par la levée de l’obstacle.
Christelle Maurey-Guenec,
maître de conférences en médecine à l’école d’Alfort.
Article rédigé d’après la conférence « Gestion médicale de l’incontinence urinaire », présentée en décembre 2009 à Maisons-Alfort et lors d’une journée de formation sur les échecs thérapeutiques, organisée par l’Afvac Ile-de-France en octobre 2010 à Paris.
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