« L’adoption d’un basis core curriculum est indispensable »

Comment mettre en œuvre une harmonisation de la formation vétérinaire au niveau mondial ?

Difficile de connaître le nombre exact d’établissements d’enseignement vétérinaire dans le monde, car il évolue rapidement, voire de différencier les formations de vétérinaire et de technicien vétérinaire (appelé aussi paraprofessionnel) dans certains pays.

Dans les États où la privatisation de l’enseignement supérieur a été poussée très loin, ils ignorent même le nombre d’établissements d’enseignement qui existent sur leur territoire !

Il y a donc d’abord un travail de nature politique à réaliser afin de convaincre les gouvernements et les élus des enjeux liés à la qualité et au contenu de l’enseignement vétérinaire. Et pour les nombreux pays qui ne disposent pas d’établissements de formation, le but est de n’accepter que des vétérinaires formés dans des établissements extérieurs de qualité, qui respectent les recommandations internationales.

La stratégie de l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE) consiste à convaincre tous ses membres (178 pays) d’adopter l’obligation d’une liste minimale de matières à enseigner (basis core curriculum). Elle représente une partie (environ la moitié) de l’enseignement dispensé, le reste étant lié aux caractéristiques socioculturelles et au marché (la demande), qui relèvent de spécificités locales.

Il est actuellement impossible d’agir au niveau de l’harmonisation des critères de recrutement des étudiants dans les établissements, compte tenu des énormes disparités existantes, surtout dans les pays en développement.

Quelle est la faisabilité d’une telle démarche ?

Le futur succès de notre projet reposera sur un lobbying international intense, axé notamment sur les risques mondiaux liés à une formation vétérinaire inadaptée et à la résurgence de maladies animales non contrôlées, dans notre monde globalisé où un seul pays défaillant peut mettre en danger le reste de la planète. Nous avons déjà organisé ou coorganisé avec succès deux conférences mondiales à ce sujet.

Ce lobbying doit conduire à l’acceptation par tous nos membres du contenu du core curriculum, après un vote en assemblée générale des 178 délégués nationaux auprès de l’OIE. Cela permettra de considérer cette exigence comme une norme internationale reconnue par l’Organisation mondiale du commerce (OMC).

La réalisation effective de cette mesure sera longue et difficile. La première étape est en cours à l’OIE. Elle consiste à rechercher, notamment auprès de la Banque mondiale et d’autres institutions majeures de développement économique, des financements pour soutenir un programme international d’appui aux établissements d’enseignement vétérinaire des pays en développement. Nous recevons déjà des réponses positives, notamment pour des appuis financiers aux pays de l’Europe de l’Est. Nous pensons que la méthode dite des jumelages (twinning) est bien adaptée pour appuyer chacun des établissements qui ont décidé de respecter les normes internationales.

Le jumelage consiste à financer un établissement “parent” pour exécuter un programme d’appui au profit d’un établissement candidat, en permettant notamment des échanges d’enseignants et d’étudiants pendant plusieurs années (au moins un cycle complet de formation).

Cette formule a déjà largement fait ses preuves dans le cadre de notre programme mondial de jumelage Nord-Sud ou Sud-Sud des laboratoires de diagnostic.

À quel horizon cette harmonisation est-elle souhaitée

Il est évident que notre démarche s’inscrit dans les moyen et long termes.

Elle nécessitera une volonté politique dans la durée et beaucoup d’énergie pour convaincre. L’appui des médias sera également déterminant pour son succès.