Formation
FAUNE SAUVAGE
Auteur(s) : SERGE TROUILLET
Le tamia de Sibérie, ou écureuil de Corée (Tamia sibericus barberi), se plaît bien en Europe ! 21 populations y sont recensées, dont 11 en France : la plupart en Île-de-France, d’autres en Normandie. L’espèce y a été introduite dans les années 60 à la suite de sa vente comme NAC. Vifs et difficilement apprivoisables, ces animaux ont été relâchés par leurs propriétaires lassés de leur compagnie. Ils sont ainsi présents dans la forêt de Sénart (Essonne) où ils forment, avec environ 10 000 individus, la plus grande population française de tamias.
Le Muséum national d’histoire naturelle de Paris, dans le cadre de sa mission de suivi des populations, s’est intéressé aux conséquences de l’introduction de cette espèce en France. Constatant que les tamias portaient des tiques, les scientifiques ont cherché à savoir s’ils étaient, comme leur cousin d’Amérique du Nord le tamia strié, des réservoirs potentiels de la maladie de Lyme. L’unité d’épidémiologie animale (UR 346) de l’Inra1 de Clermont-Ferrand-Theix s’est emparée de la question et Maud Marsot, jeune ingénieure agronome, d’AgroSup Dijon, y a consacré son stage de master et sa thèse.
La borréliose de Lyme est la maladie vectorielle transmise par les tiques la plus prévalente dans l’hémisphère Nord. En France, 12 000 cas sont recensés chaque année. Caractérisée au stade primaire par un érythème migrant, elle peut entraîner des conséquences neurologiques et rhumatologiques graves si elle n’est pas traitée à temps. Elle est due à des bactéries d’un complexe d’espèces, Borrelia burgdorferi, dont 4 pathogènes pour l’homme, transmises par la piqûre d’une tique de l’espèce Ixodes ricinus.
Celle-ci, à ses différents stades de larve, de nymphe puis d’adulte, s’infecte lors de ses repas sanguins, au contact de ses hôtes, principalement des oiseaux et des rongeurs. Parmi ces derniers, le campagnol roussâtre et le mulot sylvestre sont identifiés, dans la forêt de Sénart fréquentée par plus de 3 millions de visiteurs par an, comme des réservoirs compétents pour la maladie de Lyme. Le rongeur tamia l’est-il aussi ? Répondre à cette question, c’est vérifier qu’il est capable :
→ d’héberger la bactérie ;
→ de la transmettre aux tiques ;
→ de la maintenir en son sein, une fois infecté.
« Après sa capture, nous avons constaté qu’il portait bien la bactérie, avec une prévalence de 35 %, versus 15 % seulement pour le campagnol ! Qui plus est, il peut héberger 3 espèces pathogènes, contre une seule pour le campagnol. Pour la transmission, nous avons analysé les restes des repas sanguins des tiques. Nous avons en effet collecté des nymphes (second stade, avec 4 paires de pattes) à l’affût sur la végétation, en quête d’hôtes, juste avant leur repas. Nous avons ensuite analysé les restes d’ADN de l’hôte sur lequel elles s’étaient gorgées au stade précédent (larve, avec 3 paires de pattes seulement). Sur 1 500 nymphes, 80 s’étaient gorgées sur le tamia, autant que tous les autres rongeurs réunis, et 7 étaient positives. Cette transmission se réalise donc dans la nature », indique Maud Marsot.
« Quant à la maintenance, elle pouvait, selon nous, être affectée par l’hibernation du tamia : une hibernation relative puisqu’il se réveille toutes les semaines pour se nourrir avant de se rendormir. Il n’en est rien ! Nous avons capturé des tamias avant et après hibernation, après les avoir marqués entre-temps. Sur 13 positifs avant hibernation, 6 l’étaient restés après. Ils sont donc potentiellement capables de garder l’infection. En conclusion, ils sont sans aucun doute des réservoirs compétents pour la maladie de Lyme. Les données de terrain sont concluantes même si, dans le cadre d’une démarche scientifique incontestable, ces résultats doivent être confirmés par une infection expérimentale, actuellement en cours. »
Maud Marsot travaille maintenant à quantifier la contribution du tamia à la maladie de Lyme, comparativement aux autres réservoirs connus que sont le campagnol et le mulot : « Nous savons dorénavant que sa présence peut augmenter le risque acarologique, mais cela reste à prouver. Bien entendu, il est infecté, abondant, peu effrayé par l’homme, mais de nombreux paramètres interfèrent : le nombre et la localisation des chevreuils, qui sont l’hôte principal des tiques adultes, la fréquentation des promeneurs dans la forêt hors des chemins, etc. À terme, cela peut poser la question de la future gestion de l’espèce. »
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